samedi 26 juillet 2025

Un dragon dans ma cuisine - Riri Shimada et Miyoshi Furumachi.


Europe de l'Est, dans les années 80…

Alors que Nono, une étudiante japonaise, trouve un œuf étrange, voilà que de celui-ci émerge un petit dragon. La jeune fille l'élève dans sa cuisine, à l’insu de tous. La créature grandit alors doucement, mais sûrement…

Découvrez le quotidien paisible et attendrissant de la jeune fille et du dragon, dans la petite cuisine d’une maisonnette nichée au cœur d’un pays à l’histoire foisonnante.



Ce manga me faisait de l’œil depuis un moment déjà, cependant je dois m’avouer, après lecture, que ce n’était pas exactement ce à quoi je m’attendais.


C’est un manga court (quatre tomes) tournée sur la relation entre Nono, jeune fille japonaise venue étudier en Europe de l’Est, et un dragon qu’elle a recueilli et élevé, sans savoir de prime abord qu’il s’agissait d’un dragon. C’est un manga tranche de vie plutôt mignon, cocooning et touchant, qui se présente aussi comme une sorte de fable philosophique avec notre héroïne qui doit choisir son chemin, sortir de sa bulle d’artiste coupée du monde, prendre des décisions par soi-même, tandis qu’elle étudie dans un pays en crise.


J’ai d’ailleurs apprécié la tentative des mangakas de nous offrir plus qu’un manga « tranche de vie » mignon, mais d’y insérer aussi un contexte géopolitique intéressant, à savoir les bouleversements sociaux et politiques des années 1980 en Europe de l’Est qui ont progressivement mené à des révolutions des peuples, sous domination soviétique, puis l’affaiblissement du régime soviétique. Les mangaka proposent de nous faire découvrir cet épisode méconnu de l’Histoire à travers les yeux d’une étudiante étrangère qui connaît finalement peu le pays dans lequel elle fait ses études et qui n’est pas affectée par ces crises de la même façon. Un choix assez étrange que d’incorporer cela dans un manga feel good mais j’ai trouvé la chose intéressante. Malheureusement, le sujet est rushé et surtout trop peu exploité, comme si les mangakas ne voulait pas aller jusqu’au bout ou ne voulait pas trop s’éloigner du sujet de départ, à savoir la relation entre Nono et son dragon. Au final, on assiste à cela de loin, à l’instar de la protagoniste.


De la même façon, j’ai trouvé intéressant d’en apprendre un peu plus sur la perception des dragons par les humains d’Europe de l’Est. La plupart a peur de ces créatures qui sont ainsi chassées ou détruites, d’autres cherchent à les protéger, mais le sentiment général qu’il y a eu dans le passé était principalement la peur et la méfiance. Or, le manga met un point d’honneur à montrer à quel point l’amour de Nono pour son dragon, et leur proximité, fait du dragon une créature unique, qui s’est épanouie en ce qu’elle est grâce à l’amour de son humain. C’était très intéressant, mais finalement peu exploité. J’aurais voulu en savoir plus sur l’histoire des dragons dans cet univers et leur relation avec les humains.


Il y a pourtant des tentatives pour pimenter l’intrigue, apporter un peu de tension ou d’approfondissement mais ça part aussi vite que c’est arrivé, comme un bon morceau de chocolat vite repris avant qu’on ait eu le temps de le savourer.


Au moins, la relation entre Nono et son dragon est mignonne et touchante. On appréciera la façon de notre héroïne d’élever un dragon, avec les défis que cela relève, les imprévus, les difficultés, les moments drôles ou touchants comme les moments un peu plus stressants. On voit l’influence positive que l’un a sur l’autre et inversement. Il y a un lien très fort entre eux, et on ne peut y rester insensible. Il y a des moments très touchants entre eux, surtout lorsque Nono se rend compte que son dragon grandit et qu’elle ne pourra pas toujours le garder auprès d’elle, et qu’en sera-t-il le jour où elle devra retourner auprès des siens, au Japon, une fois ses études achevées ?


C’est un charmant petit manga cozy, plein d’émotion et d’amour entre Nono et son dragon, mais l’univers en lui-même (qu’il s’agisse du contexte des révolutions des années 1980 ou de l’histoire des dragons dans cet univers) n’est malheureusement pas suffisamment exploité par les mangakas. Il y a du matériel, des aspects prometteurs mais le manga ne va pas jusqu’au bout des choses. Le manga reste trop léger et rapide dans son histoire pour avoir su me marquer. Ça restera une lecture mignonne et divertissante mais sans plus.

dimanche 20 juillet 2025

Reine d'Égypte - Chie Inudoh.


C'est le début d'une nouvelle ère dans l'Égypte des Pharaons : le mariage de la jeune Hatchepsout et de son demi-frère Séthi fait de ce dernier l'héritier légitime du trône, sous le nom de Thoutmôsis II. Représentants des dieux sur terre, ils resplendissent sous leurs parures, et forment à première vue un couple parfait. Mais sous ses airs d'épouse idéale, Hatchepsout cache une colère profonde... Elle ne veut pas être simple reine, mais plutôt devenir pharaon elle-même, comme son guerrier de père ! Enfant, elle n'a cessé d'humilier Séthi au combat à l'épée, et elle est imbattable au tir à l'arc. Pourquoi ne serait-elle pas digne d'accéder au rang suprême, juste parce qu'elle est née femme ?

Pour Hatchepsout, c'est le début d'un combat pour s'affranchir des conventions ancestrales d'une des plus grandes civilisations du monde !



Reine d’Égypte est un manga en neuf tomes qui raconte la vie de la reine-pharaon Hatchepsout et comment l’Égypte a prospéré sous son règne. Je ne connais que très peu la vie de cette célèbre souveraine, ainsi je ne peux pas m’avancer sur la fidélité du manga concernant son histoire et la véracité des faits racontés mais sans doute que la mangaka a tissé une version romancée de la vie de cette pharaonne, comme le fait la plupart des fictions historiques.



Cependant, j’ai trouvé intéressant cette fenêtre sur l’Égypte antique. La mangaka touche à tout concernant cette époque : l’importance de l’art et notamment de l’architecture, la religion et ses rituels, les rites funéraires, le commerce, la guerre et l’armée, la vie du peuple comme des nobles ou des prêtres, la musique, etc. Le tout sans que cela donne l’impression d’un condensé d’informations, tout est montré et expliqué de façon fluide. Par ailleurs, les décors représentant l’Égypte, ses paysages, ses palais, les vêtements et tout le reste, sont très joliment représentés. On sent que la mangaka s’est bien documentée !



J’ai trouvé intéressant que l’histoire ne soit pas édulcorée et que la mangaka n’ait pas peur d’évoquer, voire de montrer, des thèmes un peu plus sombres avec des scènes assez violentes. Il est parfois question de viol, de meurtre, de fausse-couche. On a aussi quelques scènes de nudité, ou des scènes assez sanglantes. Toutefois, la mangaka ne montre pas cela pour attirer du public, ou juste pour montrer de la violence comme ont tendance à le faire la plupart des fictions historiques.



Hatchepsout est dépeinte comme une femme forte, têtue et ambitieuse ayant une volonté d’acier, décidée à rester seule maîtresse de sa destinée et à prouver qu’elle est capable de régner malgré son sexe. C’est une figure féministe, bien que ce soit à prendre avec des pincettes puisqu’elle entretient une relation conflictuelle avec son sexe tout au long de la série. Elle veut prouver être capable de régner malgré son sexe et que celui-ci n’est pas un frein, pourtant elle se travesti, souhaite se faire représenter comme homme dans ses statues, elle n’aime pas être considérée ou représentée comme femme (j’ai par ailleurs trouvé très intéressant ses scènes avec Meryet, sa (future) belle-fille, dans les derniers tomes, lui permettant ainsi de mieux accepter son identité de femme et qu’elle ne doit pas dénigrer cette identité pour prouver qu’elle est une bonne souveraine).

Hatchepsout est un personnage que j’ai pris plaisir à la suivre sans toutefois m’attacher spécialement à elle ou aux personnages en général. J’ai souvent déploré ses choix, ne sachant pas toujours sur quel pied danser avec elle, et déplorant des choix que je trouvais durs voire illogiques. Paradoxalement, c’est un aspect que j’ai trouvé intéressant chez ce personnage, le fait qu’elle ne soit pas édulcorée, ni parfaite mais tout simplement humaine.



Son ambition de devenir pharaon et son rôle une fois qu’elle l’est devenue la pousse à prendre des décisions qu’on peut juger contestables. Ses décisions sont politiques et souvent en décalage avec le bien-être de son entourage, voire même son propre bien-être. Elle ne pense jamais à elle en tant que femme ou personne, elle n’hésite pas à faire des choix difficiles, même pour elle-même, pour assurer la bonne continuité de son règne et pour l’Égypte, comme éloigner des personnes qui lui sont chères (mon cœur saigne encore quand je repense à sa relation avec Senmout), ce qui fait d’elle une reine froide, rationnelle, ambitieuse par le lecteur comme par ses proches. Toutefois, j’ai aimé qu’elle soit montrée ainsi, pas le cliché de la reine parfaite, douce, contre la violence, mais une diplomate qui n’hésite pas à sacrifier son bonheur et à se salir les mains, à être une guerrière impitoyable comme une reine généreuse et accueillante. J’ai aimé la voir grandir, évoluer tout au long de son règne jusqu’à ses dernières années.




On a aussi toute une panoplie de personnages, outre Hatchepsout, tous les plus colorés les uns que les autres. Ils sont soit bons, mauvais, calculateurs, loyaux, sournois, certains évoluent, d’autres restent ne changent pas. Ceux qui nous semblent être des menaces vont changer et mûrir, d’autres qui semblent loyaux se révèlent plus sombres que prévu. Parmi les personnages récurrents, nous avons Hapouseneb, prêtre d’Amon et proche conseiller de la reine, Senmout architecte et amant de la reine, Djehouty (alias Thoutmosis III) le beau-fils de la reine et l’héritier au trône, Néférouré, la fille d’Hatchepsout, Panéhésy le chancelier, Thoutmotis II le frère et époux d’Hatchepsout. Le récit est rythmé entre Hatchepsout et ses relations avec ces différents personnages, entre épreuves, machinations, trahisons, scènes tendres ou drôles.



Après, ça reste de la fiction historique, une version très romancée de la vie d’Hatchepsout et donc à prendre avec des pincettes. Sans bien connaître son histoire, je pense que la mangaka a pris beaucoup de libertés et s’est aussi basée sur des suppositions. Cela reste toutefois un manga historique que j’ai pris plaisir à suivre. Il m’a manqué un je-ne-sais-quoi pour que ce soit un coup de cœur, mais c’est une découverte sympathique que je recommande pour ceux et celles qui s’intéressent à l’Égypte ancienne.



lundi 14 juillet 2025

Reine de l'Ouest - H. Lenoir.



Boston, 1892. Vous incarnez Miss Jones, une jeune fille de bonne famille, curieuse et large d'esprit. Le mariage ? Non merci ! D'ailleurs, le Grand Ouest - et l'indépendance - et l'aventure - vous attendent... 

Entre les faussaires charmeurs, les hors-la-loi rugueux, les mesdames de lupanar, les majors poivre-et-sel, les héritières en fleur et autres rencontres fascinantes, vous aurez joyeusement l'occasion de vous fourrer dans le pétrin. Finirez-vous institutrice ? Chercheuse d'or ? Infirmière ? Trappeuse ? Épouse respectable ? Ou même... Reine de l'Ouest ? 

Dans tous les cas, vous resterez vous-même : brillante, drôle et libre, l'inimitable Miss Jones !




Avec ce livre, je découvre le genre « aventure dont vous êtes le héro/l’héroïne », j’ai trouvé l’expérience très divertissante et intéressante, bien que la lecture fut bien chaotique. Il faut savoir que chaque fin de chapitre nous propose plusieurs chemins différents et, si on veut tenter toutes les options et aventures, il faut s’armer d’un bloc-notes ou bien de marque-pages pour mieux s’y retrouver, tant les options sont nombreuses et la lecture sportive ! Ça n’a donc pas été évident pour moi de repartir en arrière pour tester une autre option, pour découvrir que ce chemin propose aussi différents chemins en fin de chapitre ! Cela dit, écrire ce genre d’histoire force l’admiration car ça ne doit pas être facile à construire.


Nous incarnons donc Miss Jones qui, pour échapper au mariage, est envoyée par son oncle et sa tante dans l’Ouest américain pour gagner sa vie, soit en tant qu’institutrice, soit en tant qu’infirmière, à moins qu’elle ne décide d’être exploratrice ou de faire carrière dans le crime. Les possibilités sont multiples pour Miss Jones qui, peu importe les histoires que nous choisissons de vivre à travers elle, aura une vie bien aventureuse dans l’Ouest mais aussi et surtout muy caliente.


Car oui, les aventures de Miss Jones sont aussi et surtout d’ordre sentimental et sexuel ! Pour une jeune fille de bonne famille, Miss Jones est plutôt libérée sur ce plan, pour son époque, et goûte à tous les plaisirs [spoiler] plan à trois avec des desperados, relation amoureuse avec la tenancière d’un bordel, matinée plaisir avec un sextoy, etc [/spoiler], ce qui m’a plutôt surprise car rien ne l’indiquait dans la quatrième de couverture. Alors que je m’attendais à tomber dans un roman qui me ferait voyager dans l’Ouest, où je choisirais plusieurs destins, entre deux métiers, deux villes… ce qui se dessine surtout, c’est des scénarios épicés pour la plupart d’entre eux, où la protagoniste doit choisir entre plusieurs prétendants et où ça finit toujours par une partie de jambes en l’air.


Autant dire que ce n’est donc pas le genre de récit qui m’attire habituellement. Pourtant, je me suis beaucoup amusée dans la lecture de ce roman. J’ignore si c’est une histoire à prendre au sérieux, je ne l’ai pas pris en tant que tel, cherchant plutôt le divertissement qu’une histoire sérieuse. J’ai également beaucoup aimé le format du roman qui nous propose plusieurs scénarios différents, le décor de l’Ouest américain que j’aime beaucoup, ainsi que l’écriture de l’auteure qui est très drôle, taquine et savoureuse. On sent que l’auteure s’est amusée à écrire toutes ces histoires, et elle le communique. On ne s’ennuie pas, peu importe l’aventure que l’on choisit. Prise d’otage, vie avec deux desperados, attaque dans un train, soigner des patients, enseigner à des enfants comme à des prostituées. Après, j’ai lu l’histoire avec un certain détachement, sans me considérer être l’héroïne mais la voir comme son propre personnage (jamais je ne me sentirais aussi aventureuse qu’elle sur le plan personnel comme sexuel haha).


En résumé, c’est drôle, original et divertissant ! Une agréable surprise car ce n’est habituellement pas le genre de récit (les romances érotiques comme les romans dont nous sommes le héro) qui m’attire, pourtant je me suis beaucoup amusée et je repense encore à Miss Jones et ses aventures. Une découverte plutôt sympathique donc, qui ne se prend pas au sérieux et qui offre plusieurs aventures certes épicées mais jamais ennuyeuses, le tout sous fond de western !


Vous devez prendre une décision : allez-vous accepter leurs avances, bien qu'ils soient deux bandits sans scrupules et - on plaisante, bien sûr que vous allez accepter ! Vous n'êtes pas arrivée jusqu'ici pour baisser les bras à la dernière seconde ! Ça fait plus de deux cents pages que vous leur courez après, en explorant toutes les pistes possibles et en recommençant dix fois l'histoire ! Non mais oh quoi !

jeudi 3 juillet 2025

Conclave - Robert Harris.



Le pape est mort.

Derrière les portes closes de la Chapelle Sixtine, cent dix-huit cardinaux venus des quatre continents vont participer à l'élection la plus secrète qui soit.

Ce sont tous des hommes de foi. Mais ils ont des ambitions. Et ils ont des rivaux.

En secret, les alliances se préparent.

Ce n'est plus qu'une question d'heures... L'un de ces cardinaux va devenir la figure spirituelle la plus puissante au monde. Sur la place Saint-Pierre, deux cent cinquante mille chrétiens attendent de voir la fumée blanche apparaître.




En avril, l’annonce de la disparition du Pape et le conclave à venir m’ont plongé dans le visionnage de nombreux films et documentaires, parmi eux le film Conclave qui aura bien fait parler de lui. Le visionnage de ce dernier m’a poussé par la suite à découvrir le roman dont il s’inspire.


Le Pape est mort, vive le Pape !


Le cardinal Lomeli (Lawrence dans le film), le doyen du collège des cardinaux, est chargé d’organiser le conclave qui élira le prochain à siéger sur le trône de Saint Pierre. Les cardinaux du monde entier se retrouvent pour voter et cohabiter ensemble. Lomeli entend bien que ce conclave se déroule dans les meilleures conditions possibles, mais il découvre bien vite que des mystères entourent la mort du Pape et que les cardinaux ont tous des secrets et des scandales qu’ils tentent de cacher. Entre les jeux de pouvoirs et les manigances, qui sera le nouveau pape ? Jusqu’où l’ambition des cardinaux peut-elle aller ?


J’ai beaucoup aimé ce huis-clos, dans lequel nos cardinaux sont enfermés et coupés du reste du monde. Ici, point de cadavre mais des magouilles, des scandales et secrets bien gardés, des révélations inattendues et des complots déjoués. Ce huis-clos devient plus plus oppressant au fur et à mesure que l’élection se poursuit, qui ravive peu à peu les tensions au fur et à mesure que les scandales et les secrets sont dévoilés. Les favoris des premiers scrutins tombent en disgrâces et de nouvelles figures de proues se dévoilent, certaines étant même assez inattendues.


Il s’agit ni plus ni moins qu’un thriller politique où les ambitions de chaque cardinal sont dévoilées petit à petit. Chacun clame vouloir servir l’Église et les hommes, mais l’Église n’en reste pas moins une puissance politique mondiale que chaque cardinal entend obtenir pour sa propre ambition. Comme dans chaque élection, il y a des jeux d’alliances, des intérêts qui guident dans l’ombre certains électeurs, des coups bas également pour affaiblir la crédibilité d’autres candidats.


Les cardinaux ne sont certes pas présentés comme des Saints mais ils ne sont pas des démons non plus, ce sont tout simplement des hommes avec leurs secrets, des ambitions, des qualités comme des défauts, quel que soit leur niveau de spiritualité ou leur rang ecclésiastique. J’ai même apprécié certains d’entre eux, notamment notre personnage principal, Lomeli, qui devient enquêteur malgré lui, et que chaque secret, chaque scandale découvert, a mis sa foi en l’homme et en l’Église à rude épreuve, ainsi que le cardinal Bellini et le cardinal Benitez, crée in pectore par le Saint Père. Et, bien qu’elle ne soit pas cardinal, Sœur Agnès en impose !


J’ai beaucoup aimé cette intrigue, pourtant rien ne le prédisait au départ. Je trouvais même l’histoire un peu longue, elle se laissait lire mais sans plus. Sans doute le roman aurait gagné en intensité avec quelques coupes et un rythme plus soutenu car l’intrigue a souvent été alourdie par de nombreuses descriptions. J’ai souvent eu l’envie de survoler certains passages. Cependant, j’ai persévéré et c’est progressivement que l’intrigue a capté mon intérêt et qu’elle est devenue un véritable coup de cœur. Ayant déjà vu le film, les rebondissements et la révélation finale sur l’identité du nouveau Pape ne m’auront pas surprise, cependant j’ai redécouvert l’histoire avec un réel plaisir, même si ce fut long au démarrage, mais mieux vaut tard que jamais !


C’était comme un roman policier où notre protagoniste principal enquête pour découvrir, bien malgré lui, les secrets de ses collègues cardinaux, le tout dans le contexte d’un conclave où les cardinaux électeurs sont tous enfermés pendant plusieurs jours en vue d’élire le prochain pape. À première vue, ça ne semble pas très palpitant, mais le conclave est un événement en lui-même que je trouvais déjà fascinant de prime abord. Je me rappelle avoir longuement scruté la cheminée, dans l’attente d’une fumée, en me demandant à quoi toute cette élection pouvait bien ressembler et l’auteur a fait un sacré travail de recherche, s’étant même rendu jusqu’au Vatican et interrogeant des cardinaux pour avoir le plus de détails possible et nous offrir un roman réaliste.


Ce scénario se déroule dans un contexte, encore d’actualité, d’attentats terroristes et de persécutions religieuses dans le monde. Il est aussi question de modernité dans l’Église avec, notamment, le sujet du divorce, de l’homosexualité, ou de la place de la femme, là où certains cardinaux souhaiteraient un retour aux traditions, au conservatisme d’antan avec les messes en latin ou un schéma plus traditionnel de la famille, ce qui nous pousse à réfléchir aux contractions d’une Église, une institution ancienne, confrontée au monde moderne.


Conclave est donc un thriller bien construit, qui sait maintenir en haleine, qui est brillamment construit, avec un travail de recherche remarquable pour nous rendre l’histoire la plus réaliste possible. Le conclave comme si on y était ! J’aurais tant aimé découvrir ce livre pendant le vrai conclave de mai 2025, mais ce livre était déjà emprunté à ce moment-là, victime de son succès… et de l’actualité ! Robert Harris a donc su faire mouche avec son Conclave, je serais tentée de découvrir ses autres romans dans le futur, notamment son Pompéi qui me fait de l’œil… histoire de rester encore un peu en Italie !


Ô Seigneur, Tu m’as chargé de l’organisation de ce très saint conclave… mon devoir est-il simplement de m’assurer du bon déroulement des délibérations de mes confrères, ou ma responsabilité m’oblige-t-elle à intervenir et à influencer l’issue du scrutin ? Je suis Ton serviteur et tout entier soumis à Ta volonté… Quelles que soient les mesures que je prendrai, l’Esprit-Saint ne manquera pas de nous orienter vers un pontife digne… Guide-moi, Seigneur, je T’en supplie, dans l’accomplissement de Tes désirs… Serviteur, tu dois trouver seul ton chemin…

Par deux fois, il [Lomeli] se leva de son lit et s’approcha de la porte, et par deux fois, il retourna s’allonger. Évidemment, il savait bien qu’il ne recevrait aucune révélation fulgurante, qu’il ne serait envahi par aucune certitude soudaine. Il n’attendait rien de tel. Dieu ne s’exprimait pas de cette façon. Il lui avait envoyé tous les signes dont il avait besoin. C’était à présent à lui d’agir. Et peut-être s’était-il toujours douté qu’il devrait en arriver là, ce qui expliquait pourquoi il n’avait pas rendu le passe et l’avait gardé dans le tiroir de sa table de chevet.