Quel mystère pourrait le dérouter ? Disparition de bijoux inestimables, suicide suspect, espions retors, meurtre crapuleux, escroquerie du haut vol ou sombre affaire d'héritage, rien ne lui résiste. Mais surtout, pas d'acrobaties à quatre pattes dans l'herbe, une loupe à la main. Pas de dissertation sur un mégot taché de rouge à lèvres. Non, Hercule Poirot laisse ces divertissements aux besogneux de Scotland Yard.
Il se contente de s'installer dans un fauteuil et de laisser fonctionner ses illustres petites cellules grises.
Je débute le Ice Cream Summer Challenge avec un recueil de nouvelles d’Hercule Poirot, parce que je ne peux pas envisager un challenge littéraire sans policier mais aussi parce que j’ai pris l’habitude de lire un livre d’Agatha Christie en été.
Les Enquêtes d’Hercule Poirot est donc un recueil de 14 nouvelles :
L’énigme de « l’Etoile de l’Occident » : Poirot reçoit la visite d’une célèbre actrice qui lui explique avoir reçu trois lettres de menace au sujet d’un diamant dont elle est propriétaire : l’étoile de l’Ouest. Hastings, l’ami de Poirot, reçoit quant à lui la visite d’une autre dame possédant un diamant, l’étoile de l’Est, qui aurait elle-aussi reçu des lettres de menace concernant son diamant. Si les deux pierres ne sont pas restituées, elles seront volées.
Tragédie à Marsdon Manor : Poirot est amené à enquêter sur une affaire de meurtre. Pourtant, tout porte à croire que le riche Maltravers est mort dune simple hémorragie interne. Sûrement le fait qu’il ait contracté une police d’assurance maladie d’un montant de 50 000 livres n’a rien à voir…
Un appartement trop bon marché : où l’on apprend que même un détective peut s’intéresser à une affaire concernant un appartement dont le loyer est curieusement bien bas. En se penchant sur l’affaire, Poirot découvre une vérité bien plus sombre… Il se pourrait bien que des histoires d’espion et de mafia se cachent derrière tout ça !
Le mystère de Hunter’s Lodge : Poirot est grippé et cloué au lit… mais n’allez pas croire que cela l’empêchera de mettre de la lumière sur une sombre affaire de meurtre. Envoyant son ami Hastings et l’inspecteur Japp sur place, Poirot prouvera que même la maladie ne saurait avoir raison de ses cellules grises et qu’il est tout à fait capable de résoudre un meurtre depuis sa chambre.
Un million de dollars en bons volatilisés : Des bons de valeur ont disparu de la banque Bentley et Son. Les soupçons se portent vite sur des employés et des clients influents. À Hercule Poirot de les innocenter sur cette affaire bien énigmatique.
La malédiction du tombeau égyptien : Plusieurs membres d’une expédition archéologique en Égypte sont retrouvés morts de façon bien mystérieuse après avoir découvert la sépulture d’un pharaon. Nouveau mystère à la Toutankhamon ou meurtrier se servant des superstitions pour commettre ses méfaits ? Poirot et Hastings se rendent en Égypte pour découvrir la vérité.
Vol de bijoux à l’Hôtel Métropole : Ciel, mes bijoux ! Mme Opalsen est dans tous ses états, on lui a volé ses bijoux ! La bonne et la femme de chambre de Madame s’accusent. Lorsque les bijoux sont retrouvés dans le lit de la bonne, Japp croit l’affaire classée, mais Poirot n’est pas de cet avis.
L’enlèvement du Premier Ministre : Poirot doit enquêter sur la mystérieuse disparition du premier ministre britannique, enlevé juste avant une conférence internationale de grande importance, en France. Qui a kidnappé le premier ministre et dans quel but ?
Une étrange disparition : Un banquier et célèbre homme d’affaire a disparu, et son coffre-fort forcé et son contenu (de l’argent et des bijoux) envolés. Son collègue est vite soupçonné, d’autant plus qu’ils n’étaient pas en termes très chaleureux. Poirot, en revanche, porte ses soupçons ailleurs…
Un dîner peu ordinaire : Hercule Poirot et Hastings reçoivent la visite d'un de leurs amis et voisin proche, le docteur Hawker. Alors qu’ils discutent de cas d'empoisonnements criminels, la femme de chambre de Hawker surgit, affolée, affirmant avoir reçu par téléphone l'appel à l'aide d'un homme disant avoir été « tué ». Lorsqu’ils se rendent sur place, il est déjà trop tard. Seuls indices, les restes d’un dîner et une statuette ensanglantée…
L’affaire du testament disparu : Violet Marsh a hérité un petit manoir de son vieil oncle. Celui-ci, doutant des capacités intellectuelles de sa nièce et regrettant qu’elle ait choisi les études à une vie de femme au foyer, a rédigé un testament selon lequel elle avait un an pour trouver le second testament soigneusement caché dans la maison, faute de quoi l'ensemble de l'héritage sera attribué à des œuvres caritatives. En dépit de ses efforts, Violet ne trouve rien et vient solliciter l’aide de Poirot…
La boîte de chocolats : à la demande de son ami Hastings, Poirot révèle une enquête dans laquelle il a échoué, tout ceci à cause d’une boîte de chocolats et une mort suspecte d’un adversaire farouche du catholicisme, alors que Poirot était enquêteur dans la police…
La mine perdue : Le directeur de la banque de Londres doit acheter une carte d'une mine d'argent en Birmanie mais le porteur, un homme d'affaires chinois, a disparu. Il engage donc Poirot pour retrouver le Chinois et la carte…
La femme voilée : Poirot reçoit la visite d’une femme voilée, fiancée du duc de Southshire, dont une lettre écrite pendant la guerre est tombée dans de mauvaises mains… celles d’un maître chanteur qui lui réclame une somme importante en échange de la lettre, somme que la dame ne peut se permettre de payer. Le temps jouant contre elle, elle se tourne vers le détective en désespoir de cause.
Un petit recueil bien sympathique ! Il y a pas mal de références et clins d’œil à Sherlock Holmes (Poirot qui se plaint, comme Holmes, du manque de cas criminels, le mot qui fait référence à un échec du détective, un personnage du nom de Violet, une affaire en rapport avec le premier ministre, etc), ce que l’amatrice holmesienne en moi a beaucoup apprécié.
C’est un recueil dans lequel le personnage d’Hercule Poirot s’affirme, où l’on découvre plus de détails sur ce personnage, notamment son aversion des voyages, lui qui aime tellement son petit confort, sa maniaquerie (qu’on pourrait aussi appeler « toc » car Poirot aime quand tout est symétrique et rangera des objets selon sa taille ou sa forme), le fait aussi qu’il se nomme parfois « Papa Poirot ». On découvre davantage de facettes de ce personnage, autant l’homme que le détective, ce que j’ai beaucoup apprécié.
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Poirot et Hastings (source) |
Je ne peux malheureusement pas en dire autant de son ami, le capitaine Hastings, qui n’a guère l’occasion de briller dans ces nouvelles. Ce garçon n’est pas bien brillant, et il peut être parfois franchement désagréable avec Poirot, à manquer de patience avec lui et à prendre la mouche pour rien. À se demander pourquoi Poirot continue d’apprécier sa compagnie et de l’amener dans ses enquêtes. Pourtant, je voudrais bien aimer ce brave Hastings, il a souvent un bon fond, quand son sale caractère ne prend pas le dessus. Il peut être un ami sympathique et il ne se laisse pas faire, mais ce n’est pas le couteau le plus aiguisé du tiroir… Bien-sûr, il faut un Watson à qui le détective doit expliquer les tenants et aboutissants de l’enquête et sa résolution, mais enfin, même Watson avait ses moments d’éclat et d’utilité. J’aurais voulu qu’Hastings brille un peu, pas une lumière en lui-même mais un conducteur de lumière, voire qu’il se rende utile au moins une fois.
Pour parler des nouvelles, celles-ci sont d’intérêt inégal. J’en connaissais déjà quelques-unes pour les avoir déjà lu dans de précédents recueils mais je les ai redécouvertes avec plaisir. Certaines nouvelles ne me laisseront pas un souvenir mémorable, mais d’autres ont été un pur régal de lecture. Je pense notamment à La malédiction du tombeau égyptien qui nous emmène en Égypte et qui n’est pas sans rappeler la malédiction de Toutankhamon, mais aussi l’affaire du premier ministre disparu, celui du testament caché, La boîte de chocolats ou encore Un dîner peu ordinaire. J’ai beaucoup aimé certains retournements de situation (l’accusé idéal qui est en fait innocent, parfois c’est même le client de Poirot le vrai coupable, on a même la présence de la mafia et du premier ministre, rien que ça !). Les enquêtes sont diversifiées, certaines sont résolues grâce à des déguisements, des tours de passe-passe, mais d’autres sont plus complexes et auraient mérité d’être un roman plutôt qu’une nouvelle !
Encore une réussite donc pour Lady Agatha Christie, je retrouve toujours son petit détective belge avec grand plaisir. Si certaines nouvelles ne me laisseront pas un souvenir bien marquant et seront vite oubliées, je relirai d’autres avec plaisir !
— Pardonnez ma franchise, mais étant donné le gâchis que vous avez fait, ne croyez-vous pas qu'il serait plus délicat de notre part de quitter les lieux ?
— Et que devient le dîner ? Cet excellent dîner préparé par le chef de lord Yardly ?
— Bah ! quelle importance ! m'exclamai-je, impatient.
Poirot eut un geste horrifié. On eût dit un Français, alors qu'il n'est après tout que Belge.
— Seigneur ! Dans ce pays vous traitez vraiment la gastronomie avec une indifférence criminelle.