dimanche 22 décembre 2013

Rebelle.

Brave/Rebelle,
Réalisé par Mark Andrews et co, et les studios Disney/Pixar.
1h35min.
Sorti en 2012.



Avec les voix de :

VO : Kelly Mcdonald, Billy Connolly, Emma Thompson, Julie Walters, Kevin Mckidd, Craig Ferguson, Robbie Coltrane...

VF : Bérénice Bejo, Jacques Frantz, Nathalie Homs, Cathy Cerdas, Pascal Casanova, Paul Borne, Patrick Osmond...





Synopsis :


Depuis la nuit des temps, au cœur des terres sauvages et mystérieuses des Highlands d'Ecosse, récits de batailles épiques et légendes mythiques se transmettent de génération en génération. Merida, l'impétueuse fille du roi Fergus et de la reine Elinor, a un problème... Elle est la seule fille au monde à ne pas vouloir devenir princesse ! Maniant l'arc comme personne, Merida refuse de se plier aux règles de la cour et défie une tradition millénaire sacrée aux yeux de tous et particulièrement de sa mère. Dans sa quête de liberté, Merida va involontairement voir se réaliser un voeu bien malheureux et précipiter le royaume dans le chaos. Sa détermination va lui être cruciale pour déjouer cette terrible malédiction...

Mon avis :

Film d'animation des studios Disney-Pixar sorti l'an dernier, j'ai eu l'occasion de le visionner il y a plusieurs mois. Il m'avait avant tout attirée par la beauté de ses graphismes et pour le lieu où le film prend place : en plein cœur de l'Ecosse médiévale. A l'instar de l'Irlande, l'Ecosse est un pays anglophone qui m'attire, sans pour autant avoir eu la chance de le visiter. Ne serait-ce que pour la beauté de ses paysages et le folklore qui tient une place importante, l'Ecosse est un pays qui m'attire beaucoup et de ce fait, j'étais curieuse de voir Rebelle, ne serait-ce que pour la qualité des paysages. Rebelle ne m'a pas déçue de ce côté-là. Quelle beauté que ces graphismes !

Le film nous offre de magnifiques représentations des paysages écossais, on est immergé en plein cœur du pays celtique, dominé par plusieurs substances de verts, de paysages naturels, presque sauvages, à couper le souffle ! Disney-Pixar nous offre une magnifique réalisation de décors magiques. Mais l'ambiance de l'Ecosse n'est pas également représentée par ses paysages, mais également par sa musique. L'avantage du partenariat de Disney avec Pixar est qu'il y a peu de chansons et qu'elles sont rarement niaises ou romantiques, et la soundtrack est une petite merveille de sonorités celtiques formant des morceaux excellents, j'ai particulièrement accroché à Noble Maiden Fair (ou A Mhaighdean Bhan Uasal, une chanson chantée en gaélique écossais qui est tout simplement enchanteresse). Ainsi, soundtrack et graphisme furent les principaux points auxquels j'ai particulièrement accroché, passons maintenant à l'histoire.

Nous suivons les péripéties de Mérida, jeune princesse écossaise, dotée d'un fort caractère et particulièrement douée au tir-à-l'arc, activité pourtant peu convenable et conseillé à une jeune princesse. En grandissant, Mérida devient une archère hors pair, au caractère un peu sauvage et indomptable, qui souhaite demeurer libre et mener sa vie de princesse comme elle l'entend, ce qui n'est pas de l'avis de sa mère, la Reine Elinor, avec qui elle se dispute régulièrement, sa mère souhaitant que Mérida se conduise comme une princesse se doit. Lorsque Mérida entre en âge de se marier, elle refuse catégoriquement de choisir un prétendant et tente le tout pour le tout pour changer son destin... ce qui aura malheureusement des répercussions sur sa mère... et le royaume d'Ecosse.


Harris, Hubert et Hamish (ne me demandez pas qui est qui, je n'en sais rien !), les triplés et frères cadets de Mérida.


Mérida s'éloigne donc radicalement des princesses traditionnelles : rebelle, drôle, impétueuse, ne se conduisant pas comme une princesse se doit, elle cherche à mener sa propre vie comme elle l'entend et faire comprendre à sa mère qu'elle est trop jeune pour le mariage, souhaitant bouleverser des siècles de tradition, bien qu'elle s'y prenne de façon quelque peu maladroite, adolescence oblige. Loin de se clamer une féministe ou de ne plus vouloir être une princesse, Mérida se révèle assez attachante, drôle et un sympathique personnage à suivre, d'autant plus qu'il n'y a aucune histoire d'amour avec elle et un prince quelconque, puisse que Mérida désire rester libre, sans être mariée jeune à un parfait inconnu. La seule romance qu'il pourrait y avoir dans ce film serait entre la reine Elinor et le roi Fergus, mais ils sont adorables ces deux-là, surtout que le roi Fergus est bourru, fêtard, et à mourir de rire (quel contraste avec Elinor !) et que le film ne se centre pas sur la romance entre le roi et la reine, mais sur la relation entre Mérida et Elinor. La reine elle-même se révèle être un personnage attachant : reine écoutée et respectée, très attachée à sa fille même si elle est un peu maladroite avec elle... j'ai aussi bien aimé sa façon de conserver sa dignité et ce, peu importe ce qui lui arrive !

A l'instar de La Reine des Neiges, le film se base donc plus sur des relations familiales qu'une romance, ici il s'agit de Mérida et sa mère, une histoire de tensions et d'amour entre une mère et sa fille opposées par leurs idées et tempéraments. Le film nous offre une histoire d'amour entre une mère et sa fille, une histoire d'un lien brisé par un manque de communication que Mérida et Elinor vont devoir régler, c'est un aspect très moderne je trouve, une façon de représenter à l'écran un problème récurent de l'adolescence : problème et conflit avec un parent, souvent du à un manque de communication. La touche d'humour est ici représentée par la présence des Triplés, les frères cadets de Mérida, trois facétieux jeunes farceurs qui en feront voir des vertes et des pas mûres au personnel du château, leur présence donne lieu à des scènes sympathiques et divertissantes, ainsi que les fameux prétendants de Mérida et leurs pères qui sont loin de l'image que l'on se fait du prince charmant ! On peut comprendre pourquoi Mérida préfère fuir le mariage ! Malgré cela, ils se montrent unis et divertissants.

C'est un beau film qui touche aux symboles et légendes celtiques, cependant je dirais qu'il manque quelque chose pour faire de ce film quelque chose d'inoubliable, car si ce film demeure fort sympathique, ce ne fut pas un coup de cœur absolu, juste un film sympathique avec une jolie soundtrack et de beaux graphiques. Rien d'inoubliable, mais de quoi passer un bon moment. Une belle magie, de sympathiques personnages, de magnifiques paysages. Un bon Disney-Pixar, mais manquant de corps et de moments marquants pour en faire un film inoubliable. Côté animation et ambiance, rien à dire, c'est sublime ! Script intéressant et personnages sympathiques, mais bon, comme je l'ai dit, rien de marquant. Un film bien sympathique mais pas le meilleur qui s'est fait chez Pixar. Enfin, j'ai tout de même passé un agréable moment et la soundtrack me transporte toujours.

mercredi 18 décembre 2013

La Reine des Neiges.

Frozen/La Reine des Neiges,
Réalisé par Chris Buck, Jennifer Lee et les studios Disney.
102 min/1h30min.
Sorti en 2013.


Avec les voix de :

- VO : Idina Menzel (Elsa), Kristen Bell (Anna), Josh Gad (Olaf), Jonathan Groff (Kristoff), Santino Fontana (Hans)
- VF : Anaïs Delva (Elsa), Emmylou Homs (Anna), Dany Boon (Olaf), Donald Reignoux (Kristoff), Guillaume Beaujolais (Hans)





Synopsis :

Anna, une jeune fille aussi audacieuse qu’optimiste, se lance dans un incroyable voyage en compagnie de Kristoff, un montagnard expérimenté, et de son fidèle renne, Sven à la recherche de sa sœur, Elsa, la Reine des Neiges qui a plongé le royaume d’Arendelle dans un hiver éternel… En chemin, ils vont rencontrer de mystérieux trolls et un drôle de bonhomme de neige nommé Olaf, braver les conditions extrêmes des sommets escarpés et glacés, et affronter la magie qui les guette à chaque pas.

Mon avis :

Ce mois-ci est sorti le dernier Disney dans nos salles de cinéma.
Je regarde la plupart du temps les nouvelles productions Disney quand celles-ci sortent au cinéma, c'est presque devenu une tradition.

Reprise d'un conte de Andersen du même nom, La Reine des Neiges ne suit pas exactement la trame de l'oeuvre d'Andersen, et nous raconte plutôt l'histoire de deux princesses : Elsa et Anna du royaume d'Arendelle, si Anna a tout d'une petite fille normale, Elsa, elle, possède l'étrange don de conjurer de la neige et de la glace. Très proche de sa sœur, elle se sert régulièrement de ses pouvoirs pour amuser Anna jusqu'à ce qu'un accident arrive, forçant le roi et la reine à prendre des mesures radicales. Sous les conseils de ses parents, Elsa s'éloigne d'Anna dont elle évite tout contact, et les portes du château sont fermées au peuple, pour mieux garder secret le don d'Elsa qui pourrait être vu d'un mauvais œil chez certains. Pendant des années est gardé secret les dons d'Elsa qui évite tout contact avec Anna qui grandit seule dans un château luxueux mais fermé, et n'aspire qu'à connaître le monde extérieur. Puis vient un jour le jour du couronnement d'Elsa, l'héritière au trône, forçant le royaume à ouvrir ses portes au peuple, pour le plus grand plaisir d'Anna... mais moins celui d'Elsa qui craint de révéler ses pouvoirs, dont elle n'a aucune maîtrise, aux yeux de tous... Chose qui arrivera lorsqu'Anna mettra malencontreusement Elsa à bout, la forçant à utiliser ses pouvoirs. Malheureusement, elle plonge tout le royaume d'Arendelle dans un hiver profond, et, mortifiée, fuit le royaume. Se sentant coupable, Anna décide de partir à sa recherche dans l'espoir de sauver la situation, et se retrouve en pleine nature plongée au plein cœur de l'hiver, accompagnée de Kristoff, un montagnard, accompagné de Sven, son renne et seul ami...

J'ai généralement du mal à accrocher aux dernières productions Disney depuis ces dernières années, pour la plupart, j'aime assez, je les trouve fort sympathiques, mais ce n'est pas le coup de cœur que j'ai connu pour les Disney qui ont bercé mon enfance. Finie la magie du Roi Lion, de la Belle et la Bête, de Mulan, de Pocahontas, de Toy Story, des Aristochats... pourtant, je dois avouer que si je n'ai pas eu de coup de cœur pour La Reine des Neiges, j'ai beaucoup aimé ce film d'animation 3D, j'ai eu un faible pour ce film, sans que ce soit une révélation. J'ai vu ce film deux fois et l'ai trouvé très sympathique, la soundtrack et l'animation y sont certes pour beaucoup, mais ce fut une bonne découverte. J'ai découvert en ce film un bon Disney, visuellement très beau, avec une belle soundtrack (je frissonne en écoutant White out, j'ai écouté non-stop Let it go/Libérée, délivrée, que ce soit sa version anglaise ou française, mais aussi avec Frozen Heart, Vuelie, Do you want to build a snowman) à laquelle j'ai accroché, ce ne fut pas le cas avec les précédents Disney et une bonne soundtrack fait toujours monter un film dans mon estime, comme pour beaucoup d'ailleurs, même si j'ai remarqué qu'il y avait vraiment beaucoup de chansons : j'ai compté au moins 11 chansons pour une heure et demie de film, ça fait beaucoup et c'est limite agaçant si on n'accroche pas à toutes les chansons ! Cependant, j'ai remarqué aimer plus de chanson dans leur version originale que française, notamment Love is an open door et For the first time in forever, et je trouve que le chanson du début, Frozen heart, donne quelques références au film notamment avec des phrases telles que "Ice has a magic, it can't be controlled" et "Beware the frozen heart" (ou soit, en français, "La glace a une magie que l'on ne peut contrôler" et "Prenez garde au cœur de glace")

Olaf, le bonhomme de neige enchanté d'Elsa.


L'animation est également un point fort. Quelle beauté, ces graphismes ! A l'instar du film d'animation Brave/Rebelle, j'ai été impressionnée par les magnifiques paysages et par la beauté des graphismes, que ce soit pour les paysages, les bâtiments ou la neige et les figures de glace invoquées par Elsa. Concernant le scénario, on se centre surtout sur la relation fraternelle entre Anna et Elsa, la romance est là mais n'empiète pas sur l'histoire et n'est pas le principal sujet ; on s'éloigne également des scénarios habituels avec le traditionnel gentil et méchant, avec un méchant qu'on ne repère pas tout de suite et qui se révèle de façon surprenante et complexe ! Le méchant n'est pas méchant pour être méchant, ou pour des raisons telles que renverser la reine, avoir la gloire, la jeunesse éternelle ou d'autres raisons similaires. On ne sait même pas qu'il est l'antagoniste avant les trois quarts du film, j'aurais juste souhaité une scène ou eux pour bien approfondir ce personnage.

Les personnages sont attachants, bien que je regrette qu'Elsa ne soit pas plus développé que ça, on sait peu de choses sur elle, j'ai l'impression qu'elle n'est pas assez exploitée, on n'apprend pas notamment d'où lui viennent ses pouvoirs, pourquoi en possède-t-elle et pas sa sœur également ? A l'inverse, on est davantage centré sur Anna et les autres personnages. Anna est adorablement attachante, par ses réactions et ses émotions réalistes, on peut s'identifier à elle. On en apprend beaucoup sur elle, ses pensées, elle est adorable, maladroite, enthousiaste, c'était un plaisir de la suivre. J'ai beaucoup aimé aussi Kristoff, le montagnard qui préfère la compagnie de son renne à celle des hommes, il est plutôt attachant, et Olaf m'a souvent fait mourir de rire, même si c'est en partie du à la voix prêtée par Dany Boon qui a le don d'adopter différents tons de voix hilarants. J'ai été très attachée à ce bonhomme de neige enchanté, drôle et attachant, qui ne rêve que de câlins et de découvrir l'été. J'ai également apprécié les clins d’œil au film Raiponce, d'autant plus qu'il me semble que les réalisateurs de La Reine des Neiges sont les mêmes que ceux de Raiponce, d'ailleurs c'est la même animation.

Autre aspect qui m'a plu : le changement des mentalités, avec notamment une critique du concept du coup de foudre où la princesse rencontre le prince, et bim ! en une journée à peine, ils s'aiment, et veulent se marier, comme on a pu le voir dans les premiers Disney (qui gardent cependant toute leur magie !), ajoutons à cela une représentation de l'antagoniste assez... inattendue. Anna rencontre ici le prince Hans dont elle en tombe immédiatement amoureuse et lorsque les deux veulent se marier, Elsa refuse et rétorque qu'on ne se marie pas avec quelqu'un que l'on ne connait que depuis une journée, on rencontrera aussi ce même genre de discours avec le montagnard Kristoff que je trouve plus sympathique et décontracté que le prince Hans. A travers cela, on a l'impression que Disney va de l'avant et se détache un peu de son traditionalisme. Certains clichés sont encore là, et certaines chansons restent bien niaises, mais je garde un bon souvenir de ce film. C'est certainement un film que je rajouterai dans ma DVDthèque !

mardi 17 décembre 2013

Le fait du prince - Amélie Nothomb.





Il y a un instant, entre la quinzième et seizième gorgée de champagne, où tout homme est un aristocrate.













Comme toujours avec les romans d’Amélie Nothomb, la quatrième de couverture est énigmatique et ne révèle presque rien de l'intrigue du roman, c’est la couverture qui m’a attiré.


Ce roman commence avec une conversation des plus insolites, ensuite nous suivons le narrateur le lendemain. On sonne à sa porte, un homme se présente et demande à passer un coup de téléphone, son portable ne fonctionnant plus et sa voiture étant en panne. Bon samaritain, le narrateur - nommé Baptiste Bordave - le laisse passer son coup de fil. Jusqu'ici, tout va bien, mais voilà qu'en faisant l'appel, l'individu en question fait une attaque et meurt sur le coup ! Alarmé, Baptiste se demande que faire et se souvient de la conversation insolite qu'il a eue avec un inconnu chez des amis communs hier : mieux vaut ne pas appeler la police ou un médecin sous peine de devenir suspect. Que faire de cet homme qui a eu l'indélicatesse de venir mourir chez lui ? Baptiste choisit une solution osée : prendre la place et l'identité du défunt et se faire passer pour lui...

Amélie Nothomb nous offre une fois de plus un roman court, qui possède un aspect rocambolesque plutôt plaisant. Le début nous mène dans une conversation plutôt originale mais intéressante qui nous fait tout de suite plonger dans le roman, survient ensuite une péripétie où le narrateur vit une situation peu commune où un parfait inconnu vient mourir chez lui. Au lieu de prévenir les autorités, il panique et prend le risque fou de prendre la place du défunt. Commençant donc de façon plutôt glauque, le roman devient vite assez loufoque et nous mène dans l'improbable, comme souvent chez les romans de l'auteur. Si ce roman ne fait certainement pas partie de mes préférés, il a le mérite d'être intéressant et l'auteure garde toujours son style décalé que j’aime tant.



Surprenant, déroutant et absurde seraient les mots pour décrire ce roman, j'ai juste moins accroché et adhéré selon certaines parties [spoiler] le personnage qui prend goût à sa nouvelle vie de luxe, la compagne du défunt qui accepte facilement la présence d'un inconnu chez elle même en croyant que le narrateur est un collègue de son compagnon, le narrateur qui croit pouvoir facilement séduire la compagne… [/spoiler] et la fin qui m'a paru précipitée et pas très palpitante, j'ai été assez déçue), mais je dois avouer que ce roman sur le changement d'identité est un sujet intéressant à exploiter et le narrateur s’aperçoit que ce n'est pas si facile que d'endosser et même de dérober l'identité de quelqu'un d'autre... surtout de quelqu'un de riche et d'influent, cela ne se fait pas sans séquelles ! Elle nous fait se questionner sur l'identité : qui sommes-nous réellement ? Peut-on décider du jour au lendemain de devenir un autre ? Adopter l'identité d'un inconnu, c'est connaître le large, c'est connaître des horizons nouveaux, mais il y a des événements et des sentiments qui nous font parfois prendre conscience qu'on est allé trop loin, mais quelque loin, au lieu de s'arrêter avant que tout dégénère, l'ivresse de la situation nous fait continuer. Impossible de freiner.

Loin d'être mon préféré, ce roman est pourtant assez pétillant, et Amélie Nothomb est la reine des citations, elle écrit toujours des formules chocs qui plaisent au lecteur et donnent un peu de dynamique à l'histoire. L'auteur se révèle ici déjantée, inventive et dérangeante ; bref, la Nothomb qui me plaît le mieux. Elle a vraiment le don d'écrire des scénarios improbables mais pourtant convaincants dans un sens et c'est toujours difficile de parler de ses romans sans trop en dire, de tout gâcher.  



- Si un invité meurt inopinément chez vous, ne prévenez surtout pas la police. Appelez un taxi et dites-lui de vous conduire à l'hôpital avec cet ami qui a un malaise. Le décès sera constaté en arrivant aux urgences et vous pourrez assurer, témoin à l'appui, que l'individu a trépassé en chemin. Moyennement quoi, on vous fichera la paix.
- Pour ma part, je n'aurais pas songé à appeler la police, mais un  médecin.
- Cela revient au même. Ces gens-là sont de mèche. Si quelqu'un à qui vous ne tenez pas a une crise cardiaque à votre domicile, vous êtes le premier suspect.
- Suspect de quoi, si c'est une crise cardiaque ?
- Aussi longtemps qu'on n'a pas prouvé que c'est une crise cardiaque, votre appartement est considéré comme une scène de crime. Vous ne pouvez plus toucher à rien. les autorités envahissent votre domicile, c'est à peine si elles n'inscrivent pas l'emplacement des corps avec de la craie. Vous n'êtes plus chez vous. On vous pose mille questions, mille fois les mêmes.
- Où est le problème si l'on est innocent ?
- Vous n'êtes pas innocent. Quelqu'un est mort chez vous.



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vendredi 29 novembre 2013

Le Fils de Sobek - Rick Riordan.


Du même auteur :











Quatrième de couverture :

La rencontre de Percy Jackson et de Carter Kane.

« Oui, c’est vrai, je l’ai fait ! Mes fans me le demandent depuis des années, alors j’ai décidé de me lancer ! Jetons Percy et Carter dans un grand dilemme gréco-égyptien et voyons voir ce que cela donne, me suis-je dit !
Je me suis tellement amusé à écrire cette nouvelle ! »
Rick Riordan.

Mon avis :

Une rencontre entre Percy Jackson et Carter Kane, les fans l'ont rêvé, Rick Riordan l'a fait !
J'en rêvais moi-aussi en lisant le premier tome des Chroniques de Kane, et pas seulement parce qu'une rencontre entre les deux héros de Rick Riordan me tentait beaucoup, mais aussi parce qu'une éventuelle rencontre entre les deux héros semblait bien possible, avec les références et clins d’œil à la saga Percy Jackson dans La Pyramide Rouge, notamment quand Carter tombe sur un livre de Percy Jackson en fouillant une bibliothèque ou lorsqu'Amos mentionne à Carter et Sadie que, de l'autre côté de Manhattan se trouvaient d'autres dieux et d'autres problèmes, et que c'était pourquoi les magiciens et dieux égyptiens n'intervenaient jamais de ce côté de la ville. J'ignore si l'auteur s'est amusé à écrire d'autres références à Percy Jackson dans les tomes suivants, mais ceux posés dans le premier tome donnent envie de découvrir ce que pourrait donner la possibilité d'une rencontre entre les héros des deux sagas.


Le dieu Sobek.

Après lecture de l'histoire, il y a une remarque qui me vient immédiatement aux lèvres : c'est trop COURT ! Le fils de Sobek est en effet une nouvelle, et non un roman ; or, c'est plutôt un roman qu'il faudrait écrire avec Carter et Percy, bien que je comprenne que l'auteur ait fait une nouvelle : c'est court, a choisi de ne pas prendre en compte de tout, pour mieux laisser les fans sur leur faim, et nous laisse la possibilité d'une nouvelle rencontre (qui se fera dans un futur plus ou moins proche, j'espère), je suppose que c'est déjà heureux qu'il ait écrit une rencontre entre Percy et Carter, même s'il a choisi de ne pas tout dévoiler, de ne pas tout déballer d'un coup, surtout qu'à l'origine, ils ne devaient pas se rencontrer : les demi-dieux grecs et les magiciens égyptiens ne sont pas supposer se rencontrer et interférer dans les affaires de l'autre, donc entre Percy et Carter, c'était déjà un peu la rencontre la plus improbable qui soit pour eux mais c'est ça qui est séduisant : la rencontre entre deux univers différents, deux personnages différents : Percy, la tête brûlée qui n'a pas la langue dans sa poche, mais attachant par son humour désopilant et son courage et sa loyauté sans limite et Carter, plus réfléchi et prudent mais non pas dénué de courage et de loyauté quand il le faut.



Et la rencontre est à la hauteur de mes espérances, il était évident que la rencontre se ferait quand l'un interférerait, même accidentellement, dans les affaires de l'autre, qu'elle se fasse dans l'action, en plein combat, en combattant un crocodile géant, sorti tout droit de la magie de Sobek, divinité égyptienne mi-homme mi-crocodile. S'ajoute à cela l'ignorance de ce qu'est l'autre, de ne pas savoir si l'autre est un ami ou un ennemi considérant le fait qu'il semble parler de choses inconnues et qu'il a des pouvoirs que ne parvient pas à identifier l'autre... bien que Carter finit par deviner un peu ce qu'il se passe, sans jamais oser trop demander ou aller trop loin. Ainsi, leur rencontre était à la hauteur de mes espérances, le tout combiné avec l'ignorance de ce qu'est l'autre et leur humour à tous les deux (pour ne donner qu'un exemple, Carter raconte que : "Ce n'était déjà pas marrant de me faire avaler par un crocodile géant, mais devoir en plus me farcir un m'as-tu-vu et son épée étincelante... Un vrai cauchemar !"), et le fait que ce soit uniquement Carter et Percy est très appréciable (ne le prenez pas mal, j'aime bien Sadie et Annabeth, mais je pense que c'était mieux que, pour une première rencontre, ce soit d'abord les deux garçons... la combinaison de l'humour de Percy et des sarcasmes de Sadie auraient été un peu trop explosif pour une nouvelle et pour la première rencontre... même si une rencontre Carter/Annabeth est alléchante, vu que les deux sont de vrais cerveaux et dictionnaires de connaissances, même Percy l'a remarqué !)

Ainsi, ce mélange mythologie grecque/mythologie égyptienne via le mélange des deux univers est alléchant, on en a eu qu'un bref aperçu de ce que ça peut donner et diantre, que ça donne envie ! Ce qui donne encore plus l'envie d'espérer que Rick Riordan n'en a pas fini avec ces deux-là et qu'il fera une nouvelle rencontre un jour (si possible après avoir fini sa saga Les Héros de l'Olympe que je dois découvrir d'ailleurs), avec nos deux garçons qui découvrent à peine qui est l'autre, qu'il y a d'autres dieux avec d'autres problèmes, d'autres monstres et d'autres conflits, et l'acte de Carter en fin de nouvelle laisse entendre que lui et Percy pourraient se revoir. Ils viennent à peine de se rencontrer, de faire connaissance et de découvrir qui est l'autre (combattre des monstres grecs ou égyptiens laisse rarement le temps pour discuter) et de sympathiser, ce serait dommage d'en rester là, mais pour une première rencontre, ce fut intéressant, l'auteur a su ne pas trop dévoiler en une nouvelle et rendre l'histoire intéressante, drôle et divertissante, je dirais même : j'en veux plus !!


Extrait :

Cette conversation commençait à me donner mal à la tête. Elle me rappelait un séjour en Ecosse où mon père - un célèbre égyptologue, devait donner une conférence. J'avais tenté de communiquer avec les gens du coin mais environ toutes les trois phrases, leur anglais se muait en une langue étrange et incompréhensible. Prononciation, vocabulaire, tout était différent. Je ressentais la même chose en écoutant Percy : lui et moi parlions presque la même langue - magie, monstres etc - mais pas avec les mêmes mots.

Ce billet est une participation au :


jeudi 28 novembre 2013

Challenge Nothomb.


Organisé par Chinouk, ce challenge propose à qui le souhaite de découvrir ou redécouvrir les romans d'Amélie Nothomb et ce, pendant une durée d'un an, jusqu'au 31 décembre 2014, et propose également quatre niveaux de lecture :

- Le niveau Mercure : lire un à cinq romans de l'auteur.
- Le niveau Catilinaire : lire cinq à dix romans de l'auteur.
- Le niveau Kobe : lire dix à quinze romans de l'auteur.
- Le niveau Rinri : lire les 22 romans de l'auteur.

Il y a possibilité de s'inscrire sur le topic sur Livraddict ou directement sur le blog de l'auteur du challenge. Pour ma part, je pense prendre le niveau Mercure qui me paraît déjà bien, mais je sais que j'aurais toujours la possibilité de changer de niveau en cours de route.

Bien que ne me considérant pas "fan" d'Amélie Nothomb, j'ai pourtant lu sept romans de la dame au grand chapeau sans avoir été déçue, et toujours dans ma découverte de ses romans dès que je suis d'humeur et que j'ai le temps. J'aime retrouver dans ses romans des personnages aux prénoms étranges, des références culturelles, le genre d'histoire courte et pas prise de tête, son ironie, son humour noir que l'on retrouve parfois, des histoires dérangeantes ou troublantes ou même étranges, sinon originales mais toujours décalées et satiriques. Voici d'ailleurs les romans que j'ai lu et chroniqué ici, pour les curieux :


Et mes participations au challenge : Le fait du prince. / Journal d'Hirondelle. / ...

jeudi 14 novembre 2013

Les chroniques de Kane (T.1) La pyramide rouge - Rick Riordan.



Les pharaons ne sont pas tous morts. Et les dieux d'Egypte non plus !

C'est ce que Sadie et Carter Kane découvrent, en apprenant qu'ils sont eux-mêmes les descendants de puissants magiciens. C'est sur eux que repose la responsabilité d'empêcher Seth, le dieu du Chaos, de revenir sur Terre. Ils ne seront pas seuls pour accomplir leur mission : la déesse Isis et son fils Horus vont leur prêter main forte !



Je vous avais déjà parlé un peu de Rick Riordan sur ce blog il y a environ deux ans, après avoir dévoré sa saga Percy Jackson qui était un délicieux mélange de mythologie grecque et de notre monde moderne, saupoudré d'humour, enrobé d'action à la ricaine avec un zeste de drame et de romance. Le tout donnant une sympathique saga jeunesse qui a le mérite d'être divertissante et de nous offrir une histoire qui se laisse lire... ou dévorer. Férue de mythologie, j'ai rapidement succombé à Percy Jackson et ai placé Rick Riordan sur la liste des auteurs-pas-encore-en-phase-d'être-un-de-mes-auteurs-préférés-mais-est-prometteur-et-donc-susceptibles-d'être-mon-prochain-auteur-chouchou. Ces derniers temps, son écriture et ses romans mélangeant la mythologie et la littérature jeunesse me manquaient beaucoup, ainsi j'ai pris le seul livre de lui qui était dans ma PAL.

Carter et Sadie Kane sont frère et sœur, pourtant, rien ne le laisse paraître. Tant par la différence physique qu'au niveau du tempérament ou du mode de vie. Orphelins très tôt de leur mère, les grands-parents maternels obtiennent la garde de Sadie - 12 ans, une rebelle aux cheveux blonds et au franc parler - qui passe sa vie en Angleterre pour ne voir son père et son frère que deux fois par an ; tandis que Carter - 14 ans, afro-américain, passionné d'Egypte et de mythologie égyptienne, calme et sérieux - reste auprès de son père, Julius Kane, égyptologue de renom, qui voyage à travers le monde, de pays en pays. Alors que Julius et Carter se rendent en Angleterre pour voir Sadie, à l'occasion de noël, et qu'il les emmène au Bristish Museum, Julius tente une expérience peu orthodoxe et énigmatique sur la Pierre de Rosette et relâche involontairement des individus peu ordinaires... avant de disparaître de façon très étrange !



Carter Kane.

Comme certains d'entre vous peuvent le savoir, je suis une férue de mythologie. Ma préférée depuis l'école primaire, c'est la mythologie grecque, mais le crush, avant, c'était la mythologie égyptienne et les romans/livres/documents sur l'Egypte Ancienne en général, ainsi j'ai été ravie que Rick Riordan s'essaye à la mythologue égyptienne, un peu de la même façon qu'avec Percy Jackson et si pour ce premier tome, je n'ai pas rencontré le coup de cœur que j'ai eu pour Percy Jackson, j'ai passé un très bon moment et ai englouti le roman en peu de temps. Ici, le roman est narré par deux personnages : Sadie et Carter, avec un changement de narrateur tous les deux chapitres. J'ai bien aimé ce procédé, les deux personnages ont une voix forte, qui sont attachants et ont plein de ressources ; même si j'avoue que ma préférence va à Carter qui est beaucoup plus calme, plus réfléchi et crédible que sa sœur qui, elle, est une vraie bombe à retardement, qui fait tout d'instinct et qui a son franc-parler. 


Carter est plus crédible dans le sens où Sadie croit rapidement en l'existence de divinités égyptiennes et trouve tout cela logique alors que Carter, malgré toutes les choses étranges qui se sont déroulées, a du mal à y croire et prendre cela au sérieux et met plus de temps à y croire. Tout comme je trouve incroyable que Sadie - en plus de croire rapidement que les dieux d'Egypte existent et qu'il existe aussi des magiciens égyptiens - a un pouvoir plus conséquent et qu'elle semble plus importante que son frère. J'imagine que je suis frustrée car on accorde un peu moins d'importance à Carter qui a moins de facilité à manier ses pouvoirs. Cependant, j'ai beaucoup aimé l'évolution de leur relation : au départ, ce sont des étrangers l'un pour l'autre, autant dire qu'ils s'entendent aussi bien que chat et chien et que Sadie ne peut pas s'empêcher de balancer des piques désagréables à son frère, mais au fur et à mesure qu'on avance dans le roman, ils doivent travailler en équipe et apprennent peu à peu à se faire confiance, à lire sur le visage de l'autre, à s'inquiéter pour l'autre, même à deviner les intentions de l'autre et au final, même s'ils s'envoient toujours des piques de temps en temps, il y a un lien qui existe entre eux et une entente qu'il n'y avait pas avant. J'ai aussi apprécié le fait que l'un comme l'autre est persuadé que c'est l'autre qui a eu la meilleure vie : Carter aurait aimé une vie tranquille, sans avoir à bouger partout dans le monde, il aurait voulu avoir des racines dans un lieu, avoir des amis, aller à l'école, être comme les jeunes de son âge, réagir comme un jeune de son âge au lieu de devoir être mature avant l'heure ; Sadie, elle, aurait aimé passer toute l'année avec son père, voyager dans le monde, découvrir des pays, s'échapper de Londres où elle est vue comme hors-norme.

La mythologie égyptienne est bien exploitée : ni trop peu, ni pas assez. Nous avons l'occasion de rencontrer des dieux tels qu'Isis, déesse magicienne, son fils Horus, dieu de la guerre et un peu imbu de sa personne mais assez attachant dans un sens, Thot, dieu nerd, inventeur du langage et de l'écriture, Bastet, déesse chat très protectrice de ses deux chatons (à savoir Carter et Sadie) et amatrice d'armes tranchantes, Seth, dieu du chaos avec une personnalité intéressante et juste hilarante par moment ("Maintenant, faites un vœu !" et pouf ! Osiris out !), Anubis, dieu des morts, présenté sous les traits d'un jeune homme séduisant et ténébreux, et encore d'autres présents ou mentionnés comme Geb, Nout, Apophis, Osiris, Nephtys, Sekhmet, Sobek... On fait la connaissance de plusieurs divinités, dont certaines intéressantes, avec une histoire et des liens familiaux intéressants à exploiter, notamment entre Isis, Horus et Seth. J'ai aussi eu le plaisir de lire deux scènes de la mythologie égyptienne sous la plume de l'auteur, notamment celle où Seth piège Osiris dans un sarcophage.

Comme pour ses autres romans, Rick Riordan a une écriture très vivante, très dynamique. L'action démarre dès les premières pages et ne faiblit pas tout au long de l'intrigue, on a même un peu trop d'action, presque à chaque chapitre il se passe quelque chose et les personnages doivent fuir ou se battre, je suppose que c'est typiquement américain de saupoudrer une histoire d'une tonne d'action ? J'aurais voulu un peu moins d'action, même si je dois avouer qu'on ne s'ennuie pas. Suspense et rebondissements sont au programme, avec quelques petites révélations. Le dénouement est plutôt satisfaisant, bien que je commencer à me douter qu'un certain personnage se serait pas le grand méchant loup de la série. Néanmoins, je crois pouvoir affirmer que Rick Riordan fait preuve d'un certain génie lorsqu'il s'agit de raconter des histoires reprenant les mythologies anciennes et de les mélanger à notre monde moderne et d'en faire une histoire drôle, dynamique, riche en détails amusants et intéressants, bien construite, avec plein de rebondissements, de révélations et retournements de situation !

On notera bien-sûr qu'il utilise à peu près la même recette que dans Percy Jackson, cependant, j'ai plaisir à voir qu'il n'a pas cherché à renouveler et de céder à la facilité en faisant la même chose que pour ses autres romans, par exemple ici, il n'y a pas d'enfants demi-dieu, né d'un(e) mortel(le) et d'une divinité. Ça fonctionne chez Percy Jackson car les dieux grecs sont connus pour faire des gosses à droite à gauche, et qu'ils ont déjà engendré des demi-dieux, ce qui n'est pas le cas dans la mythologie égyptienne où ici on aura plutôt des magiciens utilisant de la magie comme pratiquée dans l'ancienne Egypte avec quelques modifications, et des magiciens qui sont parfois des hôtes à des dieux. Donc, ça a beau ressembler un peu à Percy Jackson, je pense qu'on sent quand même un travail de recherche avec de bonnes références, et une passion de l'auteur pour la mythologie. Sinon, ce fut une lecture bien satisfaisante et je lirai sans peine la suite un jour (... dès que le tome deux sortira en version poche !)





Il faut te dire que papa n'a le droit de la voir [Sadie] que deux jours par an, un en été, un en hiver. Tout ça parce que nos grands-parents le détestent. Quand maman - leur fille - est morte, ils ont engagé une bataille judiciaire contre lui. Après avoir usé six avocats, deux explications à coups de poing et une agression à la spatule qui aurait pu être fatale (crois-moi, mieux vaut ne pas connaître les détails), ils ont obtenus le droit de garder Sadie. Elle avait six ans, moi huit. Ils ne pouvaient pas nous élever tous les deux - enfin, c'est ce qu'ils ont raconté. Aussi, à elle la vie tranquille en Angleterre pendant que je faisais le tour du monde avec papa. Donc, on voyait Sadie deux fois par an, et ça m'allait très bien comme ça.


1. L'aiguille de la mort.


Ce billet est une participation au challenge :


Broderies - Marjane Satrapi.


Quatrième de couverture :


En marge de Persépolis, à la fois dans la forme et dans le sujet, Marjane Satrapi profite de la collection Côtelette pour réunir des anecdotes vraies de femmes Iraniennes. Chez les Satrapi, lors des fêtes de famille, le ventre bien rempli et les hommes à la sieste, les femmes se réunissent autour d'un samovar pour pratiquer la "ventilation du cœur " : c'est à qui racontera l'histoire la plus croustillante, et l'on comprendra bientôt le sens ambigu du terme Broderies.







Mon avis :

Cela fait déjà un petit bout de temps que j'ai fait connaissance avec les œuvres de Marjane Satrapi et leurs adaptations, et je ressortais toujours de chaque rencontre avec un avis positif. Sans me considérer comme une fan, je prends plaisir à lire les BD concoctées par l'auteur. En ce moment à la fac, manque de temps pour pouvoir lire un roman digne de ce nom, je me rabats sur les mangas et BD qui ont l'avantage de me faire passer un moment de divertissement et de ne pas m'accaparer beaucoup de temps de lecture. Ainsi, quand j'ai eu la surprise de découvrir une BD signée Marjane Satrapi à la bibliothèque de la fac, je n'ai pas hésité.

A l'instar des deux BD chroniquées ici, Marjane nous livre un peu plus de sa famille à travers le crayon. De Persépolis, on se souviendra bien-sûr de la grand-mère de Marjane et de son caractère si particulier mais qui la rendait attachante, un personnage difficile à oublier que nous retrouvons ici en compagnie de sa petite-fille, Marjane, et d'autres femmes de la famille qui, après un dîner de famille, s'accordent un moment à elle. C'est le moment privilégié du samovar où les femmes de la famille boivent du thé longuement préparé tout en papotant. Papoter n'est cependant pas le mot adéquat, plutôt  assister à une séance de ventilation du cœur, joliment nommé par la grand-mère qui affirme que : "parler derrière le dos des autres est le ventilateur du cœur". Ainsi, sept femmes se retrouvent après le dîner, laissant leurs hommes entre eux, pour ventiler, principalement sur les femmes de la famille et leurs déboires amoureux et sexuels.

Ainsi, la grand-mère racontera une anecdote amusante sur une ancienne amie qui, de leur jeunesse, est venue un jour la voir, désemparée, car elle était promise en mariage et qu'elle avait perdu sa virginité avec un amant et qu'elle redoutait la réaction de son mari s'il venait à apprendre que la belle n'est pas aussi pure qu'il ne le pensait. La grand-mère lui offrit alors une astuce pour sauver la mise... On passe au récit d'une autre femme qui, malgré un mariage et quatre enfants, ne vit jamais un sexe et des organes masculins et Grand-Mère de rétorquer "Tu n'as rien raté !". Vient le récit d'une tante de Marjane qui a été forcée d'épouser, à l'âge de 13 ans, un homme de 56 ans son aîné... et qui a choisi de s'enfuir, la nuit de noce venue, chez sa tante aux idées plus modernes. Une autre femme parlera de ses amours avec des européens. Marjane parlera d'une amie qui, pour "libérer" son amant de l'emprise d'une mère trop encombrante, a utilisé des moyens peu orthodoxes... et d'autres histoires s'ajoutent à cela.

En plus d'apporter des éléments biographiques sur sa famille, l'auteur nous montre à travers ces histoires la place de la femme en Iran avec le poids des coutumes et de la société iranienne, leur émancipation progressive, entre conservateurs et modérés. Par chance, la famille de Marjane est plus libérée, moderne et non coincée dans les traditions conservatrices. Nous avons ici affaire à un groupe de femme aux expériences diverses et issues de différentes classes sociales, ce qui nous permet d'explorer leur condition : mariage arrangé, port du voile, virginité... mais qui nous éloigne des images des femmes orientales que l'on perçoit comme cloîtrées, battues et exploitées.

Comme d'habitude, la présence de la grand-mère est très appréciée. C'est une femme de caractère, opiomane, qui s'est mariée trois fois, qui respecte son mari mais n'a pas peur de lui demander d'aller voir ailleurs si elle y est. J'aime son franc parlé, sa façon de voir et prendre la vie, c'est un personnage hors-norme et je regrette qu'on sache peu de choses de sa vie. J'aime beaucoup aussi le personnage de la mère de Marjane, qui me séduit par sa modernité dans un pays qui ne l'est pas forcément. Elles détonnent dans une société traditionaliste.

Cet ouvrage est une petite source de divertissement, une agréable bouffée d'air et un parfait exutoire pour les femmes en mal d'amour, sans tabou et avec humour, avec des thèmes comme le mariage, la sexualité, la virginité, la liberté. L'auteur nous offre des histoires divertissantes mais touchantes, racontées sans mièvrerie. L'auteur va droit au but dans une BD où le décors reste simple, naturel, mais le décors n'a pas d'importance ici, l'essentiel reste l'humain et surtout les femmes qui nous livrent leurs expériences et leur façon d'envisager l'amour, le mariage et la fidélité. C'est assez provocateur et féministe... autant dire que les hommes n'ont pas toujours le beau rôle dans cette BD , gentiment étiquetés et justement critiqués, même si je dois saluer le mot de la fin dite par le grand-père après s'être "gentiment" fait rabrouer par sa femme : "Quand le serpent vieillit, la grenouille l'enc*le".

Petit extrait : "Le mariage, c'est comme à la roulette : des fois on gagne, souvent on perd."

lundi 28 octobre 2013

Le crime d'Halloween - Agatha Christie.



Du même auteur :




Emprunt médiathèque.



Quatrième de couverture :


Le 31 octobre, les sorcières s'envolent sur leur manche à balai : c'est Halloween, la fête du potiron. À cette occasion, Mrs Drake a organisé une soirée pour les "plus de onze ans". Les enfants participent aux préparatifs, sous l’œil nonchalant de Mrs Oliver, qui croque son éternelle pomme. "Savez-vous que j'ai eu l'occasion d'assister à un vrai meurtre ?" se vante Joyce, une fillette à la langue bien pendue, devant la célèbre romancière. Tout le monde lui rit au nez : Joyce ne sait plus qu'inventer pour se rendre intéressante. La fête est un succès, et les enfants font un triomphe au jeu du Snapdragon qui clôt la réception. Tous les enfants ? C'est en rangeant la maison, après le départ des invités, qu'on découvre le cadavre de la petite Joyce dans la bibliothèque. Bouleversée, Mrs Oliver fait aussitôt appel à son ami, le grand Hercule Poirot.


Mon avis :

J'ai lu ce roman, tout d'abord parce d'une part, je voulais lire un policier d'Agatha Christie, et d'autre part, je voulais lire quelque chose pour me mettre un peu dans l'ambiance d'Halloween, d'où ce titre. Dans ce roman, cependant, Halloween ne sert que de toile de fond à l'intrigue qui trouve plutôt ses racines dans des faits antérieurs. Cependant, c'était intéressant de découvrir - le temps des premiers chapitres - comment se déroulait une fête d'Halloween dans l'Angleterre du XXe siècle, avec la pêche aux pommes à récupérer avec les dents dans une bassine d'eau, le jeu du Snapdragon, le jeu qui consiste à regarder dans un miroir dans l'obscurité et la rumeur qui dit que le premier visage que l'on voit sera celui de sa moitié...

Bien qu'en suivant Hercule Poirot, nous ne découvrons l'identité du coupable qu'au moment où il la révèle. Il énumère les faits, interroge, nous laisse la possibilité de réfléchir pour démasquer le criminel alors que les personnages se dissimulent derrières des alibis, des masques. Concernant le meurtre, je crois que c'est bien la première fois que je lis un roman policier dans lequel la victime est jeune, vraiment jeune (Joyce avait beau être un personnage plutôt antipathique, désagréable, c'est moche de mourir à 13 ans), et même les proches et connaissances ne peuvent s'empêcher, malgré le fait qu'il est d'usage de ne pas dire du mal des morts, de la critiquer mais comme dit Hercule Poirot, il n'est jamais méchant d'expliquer ce qu'était la victime, même si le portrait d'elle n'est pas flatteur, car la personnalité de la victime est l'une, si ce n'est la, cause directe de bien des meurtres. Car ici Joyce, son défaut de raconter sans cesse des histoires pour être intéressante et sa manière d'enjoliver la vérité lui ont été fatals... 


L'auteur.
Une fois de plus, je n'ai pas réussi à deviner, avant que Poirot ne le révèle, l'identité de l'assassin, une fois encore, j'ai été menée par le bout du nez par l'auteur ! Cependant, ce roman a également été une occasion pour moi de faire la connaissance d'Ariadne Oliver, personnage plus ou moins récurrent dans les histoires d'Agatha Christie. Romancière qui écrit des romans policier mettant en scène un détective finlandais, au tempérament un peu "foufou", dotée d'une imagination débridée, féministe persuadée de la supériorité de l'intuition féminine, et étant fréquemment vue en train de croquer un fruit (ici la pomme puis les dattes), un personnage très sympathique et dans lequel l'auteur se serait parodiée. J'ai bien aimé ce personnage que j'ai trouvé sympathique, drôle et divertissant et je serais ravie de la retrouver dans d'autres romans d'Hercule Poirot (j'ai justement Une mémoire d'éléphant dans ma bibliothèque... roman où elle est présente !), elle a été la touche légère et divertissante du roman.


Comme toujours, j'ai été attirée par l'ambiance très bristish du roman, avec l'essence des milieux bourgeois très bien décryptée, le fait qu'on apprenne à découvrir les habitants de cette bourgade paisible, en pleine campagne, où à peu près tout le monde connaît tout le monde. En général, je suis sensible à ce genre d'histoire prenant place dans une petite ville paisible où tout le monde connaît tout le monde, avec les commérages qui fusent, et dans laquelle un drame survient, perturbant la petite ville tranquille, et où l'on apprend à connaître chaque personnage.  L'humour de l'auteur chez des paroles de certains personnages ou dans la narration sont, comme toujours, très appréciables, un véritable délice. Voici deux exemples, pour vous mettre en bouche : "Ils regardèrent tous les deux Poirot de l’air satisfait qu’ont les chiens lorsqu'ils ont retrouvé les pantoufles dont leur maître avait besoin" et "Je ne suis pas psychiatre moi-même, Dieu merci. J'ai quelques amis psychiatres. Certains d'entre eux sont des gens parfaitement sensés. Certains autres... ma foi, j'irai jusqu'à dire qu'ils auraient besoin eux-mêmes d'une expertise psychiatrique."

La mise en scène et les dialogues rendent le récit très vivant, ce qui fait qu'on ne s'ennuie pas pendant la lecture, d'autant plus que c'est un roman plutôt court, et que le récit s'accélère dans les 40 dernières pages jusqu'à la solution de l'énigme, les pages se tournent donc toute seules jusqu'à la solution de l'affaire. Ce roman ne fera certainement pas parti des œuvres d'Agatha Christie à m'avoir marqué, comme Dix petits nègres, Mort sur le Nil ou Le crime de l'Orient-Express, mais ça reste une lecture très divertissante, bien que je me sois un peu perdue au départ dans les liens qu'entretenaient les personnages.


Extrait :

Hercule Poirot jeta un coup d’œil par-dessus le portillon d’entrée de La Crête du Pin, ravissante maisonnette moderne. Il était légèrement hors d’haleine. Cette charmante maison avait été bien nommée, perchée qu’elle était au sommet d’une colline plantée de quelques pins épars. Un homme de bonne taille et d’un âge certain poussait une brouette, dans une allée de son petit jardin bien entretenu, un énorme arrosoir en fer galvanisé.
Au lieu des quelques mèches de cheveux blancs qu’il aurait dû avoir sur les tempes, la chevelure du commissaire Spence était devenue d’un gris uniforme. Et il avait pris du ventre. Il s’arrêta de secouer son arrosoir et regarda le visiteur planté à sa porte. Hercule Poirot ne bougeait pas.
- Dieu me pardonne ! s’exclama le commissaire Spence. Ce n’est pas possible, et pourtant si. Oui, c’est bien lui. Hercule Poirot, aussi vrai que j’existe.
- Tien, tiens ! sourit Poirot. Vous m’avez reconnu. Cela fait plaisir.
- Pourvu que vos moustaches ne cessent jamais de pousser !

lundi 30 septembre 2013

Les Misérables - Victor Hugo.



Pour aller plus loin :








Emprunt bibliothèque fac.





Quatrième de couverture :

Le destin de Jean Valjean, forçat échappé du bagne, est bouleversé par sa rencontre avec Fantine. Mourante et sans le sou, celle-ci lui demande de prendre soin de Cosette, sa fille confiée aux Thénardier. Ce couple d’aubergistes, malhonnête et sans scrupules, exploitent la fillette jusqu’à ce que Jean Valjean tienne sa promesse et l’adopte. Cosette devient alors sa raison de vivre. Mais son passé le rattrape et l’inspecteur Javert le traque

Mon avis :

Petite précision avant tout concernant la quatrième de couverture, le roman ce n'est pas que l'histoire de Cosette et de Jean Valjean, et si vous croyez dur comme fer que Javert est le méchant de l'histoire, on ne peut pas être ami. Les Misérables, ça suit plusieurs tranches de vie de divers personnages qui vont, qui viennent, qui partent, qui restent ; c'est une peinture réaliste du Paris du début du XIXe siècle et de la société française de l'époque avec ses hauts, ses bas, ses richesses, ses beautés, ses injustices, c'est une part d'âme que l'auteur a laissé et écrit. C'est un classique incontournable de la littérature française.

Poussée par le fandom, j'ai eu, ces derniers temps, la curiosité de découvrir ce classique alors que je ne m'y attendais pas, que je ne pensais pas attaquer un classique (un "gros" classique qui plus est) de sitôt après Le comte de Monte-Cristo lu cet été.
Les Misérables, on peut dire que c'est ma véritable grande approche de l'oeuvre de Victor Hugo. Après avoir commencé petit il y a des années, au lycée, avec Claude Gueux et Le dernier jour d'un condamné, je me suis attaquée ici à un pavé plus impressionnant. 1600 pages pour mon édition qui était une édition intégrale ! Et si j'avais hâte, surtout vers la fin, de terminer enfin ce gros pavé, je dois dire que les personnages vont me manquer...


Victor Hugo.
Je crois que vous l'avez compris, j'ai aimé ma lecture, mais je dois avouer que lire Les Misérables, c'est un peu devoir s'armer de patience ; pas forcément parce que c'est un gros pavé, mais parce que certaines parties - surtout les quatre premières - sont descriptives, et il ne se passe pas grand chose. Pour ne donner qu'un exemple, l'auteur consacre au moins dix chapitres, si ce n'est plus, au personnage de l'évêque de Digne qui - même s'il est un personnage intéressant, amusant et l'image qu'on aimerait tous se faire de l'homme religieux idéal (alias bon, généreux, souriant, pieux, pardonne, n'est ni dur, sévère ou corrompu) - peut parfois lasser au bout d'un temps et pourtant j'ai adoré le personnage de l'évêque, sans compter qu'il a joué un rôle important dans la vie de Jean Valjean, l'un des personnages principaux de l'oeuvre.


L'auteur nous consacre parfois de longs chapitres pour parler d'un personnage, pour nous peindre le tableau social/politique/religieux/tout ce que vous voulez de la France, et surtout du Paris du XIXe siècle. Une vraie fresque d'histoire (on passe de Napoléon, à la Restauration jusqu'à l'époque des révolutions de 1830), de politique, de la société française de la première moitié du XIXe siècle, il nous parle beaucoup de Paris aussi (il a même consacré quelques chapitres aux égouts de Paris, c'est pour dire, mais ces égouts vont jouer un rôle dans l'histoire) et le décrit même plutôt bien, on a vraiment l'impression de vivre dans ce lieu, à cette époque. On évolue dans ce Paris, dans cette société française coincée entre une Restauration finissante et une monarchie de Juillet condamnée. Sans être vraiment un roman historique à proprement parler, les événements historiques tiennent une grande place dans le roman et les moments les plus marquants sont relatés dans ce roman (on a plusieurs chapitres consacrés à la bataille de Waterloo, aux barricades de l'insurrection de l'enterrement du général Lamarque...). Donc Victor Hugo décrit presque tout et bien (je dis presque tout... je n'aurais pas été contre à ce qu'il nous en révèle un peu plus sur certains personnages... dont Javert), à un point où ça peut paraître long, affreusement long, et j'ai un peu honte d'avouer que j'ai sauté plusieurs pages tellement je n'en voyais pas la fin. Quelques fois, je prenais mon mal en patience.

Plus que ça, l'auteur se fait omniprésent dans cette oeuvre, c'est également pour cela que j'ai écrit que Victor Hugo avait probablement laissé une partie de lui-même enfouie dans ce livre. Les choses qu'il raconte, les thèmes qu'il aborde sont indissociables de l'auteur et montrent sans doute ce qu'Hugo pense, ses convictions sur la politique, la société française... on retrouve bien-sûr un thème cher à Hugo : la condamnation de la prison, de la peine de mort, l'éducation des hommes qui favoriserait mieux l'homme dans la vie, dans la société et qui permettrait de moins remplir les prisons car un homme instruit vit mieux et vit sans délinquance  que ce n'est pas l'homme qui est mauvais, qui devient mauvais de lui-même, c'est la société qui le façonne ainsi. L'image du père et du grand-père est aussi très présente avec Jean Valjean et le grand-père Gillenormand. Jean Valjean qui découvre l'amour paternel en prenant soin de Cosette, ils se découvrent, apprennent à s'aimer, découvrent chez l'un et l'autre une soif, un besoin d'amour, de contact. Valjean change avec Cosette, il apprend à être un père. Les chapitres avec eux sont d'ailleurs très touchants, il y a ce passage que j'aime beaucoup :

La nature, cinquante ans d’intervalle, avaient mis une séparation profonde entre Jean Valjean et Cosette ; cette séparation, la destinée la combla. La destinée unit brusquement et fiança avec son irrésistible puissance ces deux existences déracinées, différentes par l’âge, semblables par le deuil. L’une en effet complétait l’autre. L’instinct de Cosette cherchait un père comme l’instinct de Jean Valjean cherchait un enfant. Se rencontrer, ce fut se trouver. Au moment mystérieux où leurs deux mains se touchèrent elles se soudèrent. Quand ces deux âmes s’aperçurent, elles se reconnurent comme étant le besoin l’une de l’autre et s’embrassèrent étroitement.
(Livre quatrième - La masure Gorbeau ; chp.III : Deux malheurs mêlés font du bonheur)

Il y a aussi le grand-père Gillenormand envers Marius, le vieux a beau être parfois dur, sévère, très axé sur ses convictions politiques et a beau avoir fait des choix que l'on peut voir comme froids (je pense au père de Marius qui m'aura vraiment brisé le cœur), il tient sincèrement à Marius, cela se voit dans le chapitre où il est au chevet de Marius. Le point fort de l'oeuvre aura aussi été les personnages, j'aimerais tous vous les présenter mais ils sont nombreux, je crois que je ne parlerais que de ceux qui m'ont marqué, à commencer par Jean Valjean : condamné à 19 ans de prison pour avoir volé du pain pour nourrir sa famille (jusque là, il a un destin similaire à celui de Claude Gueux) et pour avoir tenté de s'échapper quatre fois, il est remis en liberté mais sans cesse jeté à la porte parce qu'il est un ancien forçat. Écœuré par sa propre noirceur, sa rencontre avec l'évêque de Digne marque le commencement de sa rédemption, de sa volonté de changer, car la générosité de cet évêque va l'inciter à devenir un homme meilleur. Sa rédemption est très touchante et frappante, il devient un autre homme mais est sans cesse rattrapé par son passé. Il saura pourtant prouver qu'il a changé, que cet ancien forçat est un homme bon, secourable, généreux, doux... avec une légère tendance au martyr !

Vient ensuite l'inspecteur Javert. Inspecteur de police, il est sans cesse à la recherche de Jean Valjean. Son devoir, c'est la loi, la justice, il l'applique bien mais parfois avec excès, il ne vit que pour les lois. N'allez pourtant pas croire que c'est le méchant de l'histoire ! Il n'a pas eu une vie facile et croit que la justice est juste, est bonne, qu'elle ne peut pas se tromper. A part cela, c'est un excellent inspecteur, il est intelligent, rapide, rusé, n'a pas froid aux yeux. A l'instar du commissaire Vauvert dans L'enfant des cimetières, Javert m'a paru comme étant impayable, terrible, inimitable. Il est sarcastique aussi, sassy comme diraient les anglophones, il suffit de lire le chapitre où il est face aux Thénardier et au gang de criminels Patron-Minette, et où il lance à une Madame Thénardier qui le menace avec une brique : "la mère ! tu as de la barbe comme un homme mais j'ai des griffes comme une femme !". Il prouve aussi vers la fin qu'il n'est pas fermé d'esprit, à vrai dire, toute son existence va s'en retrouver chamboulée lorsqu'il aura la preuve que Valjean a bel et bien changé, que le monde n'est pas noir et blanc, et la lettre qu'il poste avant [ qu'il ne se suicide ] qui est en fait une liste de recommandation pour rendre la vie des prisonniers un peu moins misérables, pour corriger aussi le comportement peu tolérable de certaines forces de l'ordre. Le chapitre Javert déraillé est vraiment quelque chose, tout le conflit qui règne chez cet homme ! Je me suis vraiment attachée à Javert, même si je n'ai pas approuvé tout ce qu'il a fait (je pense notamment à l'épisode avec Fantine), et ce, malgré son obsession pas toujours très nette envers Jean Valjean :


Vingt fois, quand il était dans cette voiture face à face avec Jean Valjean, le tigre légal avait rugi en lui. Vingt fois, il avait été tenté de se jeter sur Jean Valjean, de le saisir et de le dévorer, c’est-à-dire de l’arrêter
(Livre cinquième : Jean Valjean ; chp.IV : Javert déraillé) 

Outre Javert et Valjean, nous assistons aux malheurs de Fantine, prête à tout pour donner tout ce qu'elle a pour sa fille ; nous avons les Amis de l'ABC avec Pretty Face alias Enjolras, à la fois un Saint-Just et un Robespierre et leader du groupe ; Grantaire, prêt à tout pour Enjolras qui, lui, passe son temps à douter de lui ; Courfeyrac ; Combeferre qui est un peu la figure intellectuelle et philosophe du groupe ; le jeune Gavroche, Bossuet, Jean Prouvaire et autres qui se préparent à la révolution (d'ailleurs, les chapitres avec la barricade sont spectaculaires !), j'ai aimé la façon de l'auteur de nous les présenter, je me suis beaucoup attachée à eux. Vient ensuite Marius, l'amoureux transi qui se trouve presque malgré lui au cœur des insurrections de juin 1835, il y a la jeune Cosette, il y a le couple sans scrupules des Thénardier... beaucoup de personnages donc, tous très bien fouillés, et qui, à un moment ou à un autre, sont ou seront ce qu'il convient d'appeler "un misérable", de différentes manières : socialement, politiquement, sentimentalement, financièrement...

Je ne vais pas m'attarder davantage sur ce roman, je n'ai pas tout dit mais il vaut mieux que je m'arrête là, sinon cet article risque de s'avérer plus long que prévu. Tout ça pour dire que malgré les longueurs et la patience dont il faut s'armer pour tout lire, Les Misérables est un bon classique, un très bon classique, avec des personnages tous les plus intéressants les uns que les autres, très bien racontés, très bien fouillés. Victor Hugo écrit très bien, il a une manière très humaine de raconter les émotions humaines, les relations humaines, il nous peint avec réaliste le Paris et la France de la première moitié du XIXe siècle, une véritable fresque historique, sociale, politique. Les descriptions qu'il nous offre sont puissantes, comme un mélange grandiose entre Histoire et Humanité. Les développements sur la psychologie et la nature humaine sont avant-gardistes... bref, un roman prenant qui place le lecteur devant sa propre humanité. J'ai beaucoup aimé ce roman et je retenterai sans hésiter une autre oeuvre de Victor Hugo un jour !



Image tirée de la dernière adaptation en date des Misérables.



Extrait :

Il achevait à peine qu’un effroyable fracas ébranla la boutique. Une vitre de la devanture venait de s’étoiler brusquement. Le perruquier en devint blême.
_ Ah Dieu ! cria-t-il, c’en est un !
_ Quoi ?
_ Un boulet de canon.
_ Le voici, dit le soldat.
Et il ramassa quelque chose qui roulait à terre. C’était un caillou.
Le perruquier courut à la vitre brisée et vit Gavroche qui s’enfuyait à toutes jambes vers le marché Saint-Jean. En passant devant la boutique du perruquier, Gavroche […] n’avait pu résister au désir de lui dire bonjour, et lui avait jeté une pierre dans ses carreaux.
_ Voyez-vous ! hurla le perruquier qui de blanc était devenu bleu, cela fait le mal pour le mal. Qu’est-ce qu’on lui a fait à ce gamin-là ?

Chapitre 3 : Juste indignation d'un perruquier. (Livre onzième : L'atome fraternise avec l'ouragan)