mardi 12 juillet 2011

Cosmétique de l'ennemi - Amélie Nothomb.



Sans le vouloir, j'avais commis le crime parfait : personne ne m'avait vu venir, à part la victime. La preuve, c'est que je suis toujours en liberté. 

C'est dans le hall d'un aéroport que tout a commencé. Il savait que ce serait lui. La victime parfaite. Le coupable désigné d'avance. Il lui a suffi de parler. Et d'attendre que le piège se referme. 

C'est dans le hall d'un aéroport que tout s'est terminé. De toute façon, le hasard n'existe pas.




Dans ma tête, j'ai une liste des auteurs que je veux découvrir un jour, et j'avais toujours dans l'idée de découvrir Amélie Nothomb. Beaucoup critiquent la dame, ne serait-ce que par son look, mais personnellement, il y a un je-ne-sais-quoi chez elle qui attire et j'ai toujours voulu essayer un ou même plusieurs de ses écrits sans jamais le faire. C'est à présent chose faite !

Pour une première expérience, c'était réussi. L'auteure m'a bluffé, pourtant, rien ne le laissait présager au départ. C'est en avançant dans la lecture petit à petit pour arriver à la fin qui m'a époustouflé littéralement. C'est un livre littéralement et positivement machiavélique, un vrai casse-tête avec une longue conversation entre deux êtres opposés entre répliques cyniques et citations de personnalités célèbres, puis la peur finit par grimper, on tourne les pages sans s'en rendre compte pour enfin connaître le dénouement final. Ça risque d'être difficile de parler de ce livre sans révéler quoi que ce soit !

Dans un aéroport à Paris, Jérôme August, veuf, attend son vol direction Barcelone pour un voyage qu'il doit effectuer pour son travail. La voix sonore dans les micros annonce un retard pour son vol et c'est non sans un quelque agacement que Jérôme décide d'attendre, en lisant. Il est accosté par un inconnu nommé Textor Texel qui souhaite faire la conversation. Jérôme n'est pas d'humeur mais jamais son étrange voisin ne s'en formalisera, il lui parle encore et encore, de choses et d'autres, de sa vie puis s'installe une conversation quelque peu 'forcée' entre les deux hommes, une conversation... mortelle, étrange, dérangée. Un dialogue plein de cynisme, un humour noir ou ironique, des paroles vives, des citations. Cela peut paraître si simple mais cette écriture si simple a donné un roman brillant et surprenant, l'écriture devient originale, palpitante et entraînante.

Ces deux personnages sont entourés d'inconnus mais qui semblent ne pas exister car il n'y a que Jérôme August et Textor Texel qui dominent le roman, eux-mêmes sont des étrangers mais au fil des pages on apprendra bien plus, les deux personnages ne sont pas si éloignés qu'on pourrait le croire. Textor Texel se présente d'abord comme un inconnu bien gentil voulant faire la conversation même si son interlocuteur ne veut pas l'écouter, puis il finit par lui raconter une drôle d'histoire, une histoire dérangée, presque noire. Difficile vraiment d'aller plus loin sans tout révéler ! Cette conversation est comme un piège qui, doucement, se referme. Ce livre m'a rappelé des histoires de [spoiler] doubles maléfiques car Textor étant Jérôme est comme son autre lui, son alter ego maléfique qui a tué et tuera même son autre lui, c'est comme une douce folie, c'est comme les réflexions de Freud sur l'inconscient et ses désirs refoulés [/spoiler], j'ai souvent pensé à mes cours de philosophie, surtout quand on parlait de Freud.

Bien-sûr, l'un des désavantages du roman serait qu'on doit le lire d'une traite car il n'y a pas de pause, pas de chapitres, juste une conversation du début à sa fin. Heureusement le livre étant court, on ne passe pas plus d'une heure (environ) sur le bouquin, le récit étant majoritairement composé de dialogues entre les deux personnages. C'est tordu, c'est dérangé puisque Textor Texel fait de sombres révélations à Jérôme August alors qu'il avance dans le dialogue. Il y a une maîtrise de l'auteur entre ironie et humour sadique tout en amenant les lecteurs à des réflexions sur l'être, le conscient et l'inconscient et c'est pourquoi j'ai repensé à Freud, de tous les sujets durant mes cours de philosophie de mon année de Terminale L, j'ai surtout retenu Freud (si Monsieur R. me lisait, il serait exaspéré), et la fin était renversante bien que je finissais par m'en douter un peu, et d'un côté j'aurais aimé [spoiler] un vrai meurtrier de chair et d'os qui aurait choisi sa victime à l'avance, et non pas une partie de l'inconscient de la victime [/spoiler] et d'un côté non, étrange mais c'est comme ça, j'aime les deux idées après tout. Sans m'être attachée aux personnages, j'ai surtout aimé ce côté de l'histoire où l'on cherche la vérité sans jamais savoir où elle se trouve, le dialogue étrange mais prenant, les révélations sombres de la vie de Textor, les caractères forts et les références philosophiques.

Vraiment, pour un premier Nothomb, j'ai été conquise ! Bien-sûr je me rends bien compte qu'elle a un style spécial qu'on ne peut pas retrouver dans tous les romans qu'elle a écrit, que certains ont plu mais d'autres pas, mais je suis prête à renouveler l'expérience !


Cosmétique, l'homme se lissa les cheveux avec le plat de la main. Il fallait qu'il fût présentable afin de rencontrer sa victime dans les règles de l'art.

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