samedi 21 novembre 2020

La Petite Boulangerie du Bout du Monde - Jenny Colgan.

Quand son mariage et son entreprise familiale font naufrage, Polly Waterford quitte Plymouth et trouve refuge dans un petit port tranquille d'une île des Cornouailles. Elle s'installe seule dans un minuscule appartement situé au-dessus d'une boutique laissée à l'abandon. Pour se remonter le moral, elle se consacre à son plaisir favori : fabriquer du pain. Alors qu'il n'y a plus dans le village qu'une boulangère irascible au pain sans saveur, les arômes de levain qui s'échappent de chez elle attirent très vite la curiosité et la sympathie des habitants. 

Petit à petit, d'échanges de services en petits bonheurs partagés, elle ravive l'esprit d'entraide et de partage dans le village. Au fil des rencontres farfelues (un bébé macareux blessé, un apiculteur dilettante, des marins gourmands) et au gré des événements heureux ou tragiques qui touchent la communauté, ce qui ne devait être qu'un simple " break " devient l'entreprise de sa vie. Polly se révèle enfin à elle-même : une femme déterminée et créative, prête à mordre dans la vie comme dans une mie de pain chaude et croustillante. 


Sans aller jusqu’à dire qu’il y a des mois que j’aime et d’autres que j’aime moins, je dois avouer ne pas trop aimer le mois de Novembre que je trouve long, gris et déprimant, la situation actuelle n’arrange rien. C’est pourquoi j’avais envie d’une lecture plus légère, surtout après ma lecture précédente, chaleureuse, un roman « feel good », qui fait du bien… sans aller dans la guimauve, ceci dit. Ce roman me faisait envie depuis un petit moment déjà, j’ai pensé que si je devais me mettre à lire un roman « feel good », ce devait être celui-là.


L’histoire débute assez mal pour notre héroïne, Polly. L’entreprise qu’elle a mené avec son compagnon a fait faillite, elle n’a plus les moyens de vivre dans son appartement et, en conséquence de ces événements, son couple bat de l’aile et son fiancé (et non pas son mari, comme annoncé dans la quatrième de couverture), Chris, décide de mettre un terme à leur relation et de retourner vivre chez sa mère. Déprimée et presque sans rien, Polly décide de prendre le large. Vu son petit budget, elle ne peut s’offrir que la location d’un appartement en piteux état à Mount Polbearn, une île dans les Cornouailles qui se révèle être un coin totalement perdu de l’Angleterre, avec peu de commerces et de divertissements. Heureusement, il y a une boulangerie, une aubaine pour Polly qui adore tout simplement le pain… Malheureusement pour elle, Mrs Manse, la boulangère et également la personne qui lui loue l’appartement, est une vieille dame acariâtre dont le caractère est aussi mauvais que son pain et ses pâtisseries. Polly se sent seule et désespère de remonter la pente, dans son petit appartement froid. Heureusement, elle se lie d’amitié avec les pêcheurs du coin, ainsi qu’avec un tout jeune macareux qui s’est inopinément retrouvé chez elle en pleine nuit, pendant une tempête. Et puisqu’elle ne trouve pas le pain local à son goût, elle décide de renouer avec son ancienne passion : faire du pain… sans se douter une seule seconde qu’elle allait attirer des curieux, des curieux affamés qui vont vite tomber sous le charme de ses préparations culinaires !


Le schéma de l’intrigue reste assez classique, on le retrouve facilement dans plusieurs fictions et notamment les films de noël : le personnage principal est au plus bas, il perd son emploi, conjoint, domicile ou autre, il déménage ailleurs pour changer d’air et changer de vie, il déprime, se remet en question, fait des rencontres, commence à aller mieux, se prend en main, trouve un emploi où il se sent épanoui, il se peut même qu’il rencontre l’amour de sa vie, la communauté dans lequel il est venu habiter est chaleureux, il y a de l’amitié et de l’entraide… Le roman reprend nombre de ces points, mais l’histoire reste assez plaisante pour qu’on ne s’en formalise pas. J’ai pris plaisir à suivre Polly tout au long de l’histoire, même si j’ai trouvé le début un peu long, son arrivée sur l’île, son emménagement, sa découverte des environs. J’ai beaucoup aimé la voir se lier d’amitié avec les pêcheurs du coin, tous les plus sympathiques les uns que les autres, et aussi sa rencontre avec un petit macareux qu’elle nommera Neil, qui aime suivre Polly partout et surtout manger ce qu’elle confectionne !


C’est un roman qui donne faim ! Le pain est l’élément moteur de cette histoire. Du pain, du pain et encore du pain. Polly voue presque un culte au pain, si bien qu’elle aurait très bien pu emménager en France, elle y aurait trouvé son bonheur, car elle ne le trouve pas auprès de la boulangerie de l’île. Polly en profite donc pour mettre la main à la pâte, et de redécouvrir une ancienne occupation qu’elle adorait : confectionner du pain. Il y en a pour tous les goûts ! Pain blanc, bagel, beignets au maïs, petits pains à la cannelle, etc. C’est à nous mettre l’eau à la bouche, on imagine presque l’odeur du pain chaud et croustillant qui sort du four et plus on avance dans le livre, plus on a désespérément envie de manger du pain. Polly adore le pain et c’est très communicatif ! Je la jalouse presque de ce talent ainsi que de sa chance de se remettre sur pied et de la voir trouver un emploi qui lui plaît et des amis !


Couverture des éditions Folio
que j'aime beaucoup

La gourmandise tient donc une grande place dans ce livre (au point où l’héroïne participe, sans l’avoir imaginé au départ, à un trafic secret de ses pains !) , ainsi que les paysages de l’île. Une ville, presque un village, où tout le monde se connaît, une vie près de la mer… c’est une ode aux choses simples de la vie, comme s’asseoir face à la mer tout en dégustant une brioche, confectionner une mie de pain, rendre visite aux commerçants, aller voir ses amis pêcheurs et leur apporter une boisson chaude et des pâtisseries et discuter autour de cette collation. C’est un livre qui fait l’éloge des choses simples, avec Polly découvrant qu’elle n’a pas d’autre choix que de se contenter du minimum, mais prend goût peu à peu à sa nouvelle vie.


Les personnages sont plaisants à suivre, pour la plupart. Je me suis attachée à ce groupe de marins pêcheurs, notamment Tarnie, marin taciturne un peu brut mais sympathique, et Jayden, jeune pêcheur qui n’aime pas la pêche. Kerensa, la meilleure amie de Polly, était plutôt pétillante et pleine d’entrain, et une vraie citadine qui, si elle ne comprend pas le changement de vie de Polly, est toujours là pour elle. Huckle, l’Américain qui a changé de vie pour être apiculteur, est plutôt sympathique dans l’ensemble, bien qu’un peu distant. Quant à l’héroïne, j’ai pris plaisir à la suivre sans l’adorer ni la détester. J’ai aimé sa passion pour le pain, sa capacité à se relever, son courage pour tout reprendre à zéro avec peu de moyens, sa bonne humeur… et surtout son petit macareux !! J’ai aimé son évolution (et j’ai été un peu jalouse, avouons-le, c’est le genre d’évolution heureuse qu’on souhaiterait vivre) et la voir se familiariser avec une île qui lui paraissait d’abord sombre et hostile et la voir comme son chez soi, un lieu apaisant, simple et chaleureux, avec une communauté sympathique dans laquelle l'océan tient une place prépondérante.


La Petite Boulangerie est un roman sympathique, distrayant et qui détend bien, ce dont j’avais besoin. Je déplore toutefois certaines situations peu crédibles et rocambolesques [spoiler] je n’ai pas été convaincue par la relation Polly/Huckle, et le coup classique de la femme qui part retrouver son aimé à l’autre bout du monde pour le convaincre de revenir. Je n’ai pas non plus été convaincue par la romance rapide entre Kerensa et Reuben qui a donné lieu à un mariage, alors qu’ils ne connaissaient à peine [/spoiler] ainsi que certaines facilités scénaristiques : Polly travaille en tant que boulangère, oui pourquoi pas, sauf que l’auteure idéalise un peu trop le métier de boulanger et néglige de parler de l’aspect financier, l’organisation, la vente, et les nombreux aléas du métier. Sans doute parce que c’est un livre feel good, même si cela n’a pas empêché l’auteure de mettre en scène un drame au cœur de son roman.


Malgré tout, le charme du récit opère, et ce roman se révèle être croustillant et chaleureux, l’idéal pour se détendre, sans besoin de réfléchir ou d'analyser, juste le plaisir de se laisser porter par l'odeur de l'iode et du pain, la pluie, le vent, les bons sentiments. J’ai fini par m’attacher à cette petite île, son port de pêche, ses habitants, son mode de vie, son isolement, ses paysages et, bien sûr, sa petite boulangerie. Malgré les petits défauts, j’ai pris plaisir à lire ce roman, c’est une histoire qui fait du bien, comme un chocolat chaud alors qu’il pleut et fait gris à l’extérieur, j’ai aimé ces habitants sympathiques et j’ai envié Polly. J’ai également apprécié l’initiative de l’auteure, en petit plus, de mettre en fin de roman les recettes que Polly utilise tout au long du roman. De quoi donner envie de les reproduire chez soi...


Polly entretenait un rapport très particulier avec le pain. En fait, elle lui vouait un véritable culte. Et il en avait toujours été ainsi. Quand il était de bon ton d'en manger, comme l'inverse, enfant comme adulte. C'était d'ailleurs ce qui faisait sa joie, au restaurant. Elle l'aimait grillé, aussi bien que nature. Elle l'aimait sous toutes ses formes, bagels, tartines gratinées au fromage, ou encore pain d'épices, ou pain tressé à l'italienne.

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