mardi 26 juin 2012

L'auberge de l'Ange Gardien - La comtesse de Ségur.






Du même auteur  :







Quatrième de couverture :

Deux enfants dorment au bord d'une grande route, sous un vieux chêne touffu... Il fait froid. Ils n'ont rien à manger. Leur mère est morte, leur père a été emmené par les gendarmes... Si le début de cette histoire paraît triste, il n'en va pas de même pour la suite, car le hasard veut qu'un brave sergent démobilisé passe sur la route. Délaissant l'auberge Bournier, dirigée par un couple cupide, c'est vers l'auberge de l'Ange-Gardien qu'il dirigera ses protégés et ni eux ni ses lecteurs n'auront à s'en plaindre.

Mon avis :

Vers les premières semaines de Juin, j'ai retrouvé l'envie soudaine de relire les livres de la comtesse de Ségur que je connaissais déjà. En quelques après-midi sont passés en relectures François le bossu, Après la pluie le beau temps, Les malheurs de Sophie, Les petites filles modèles, Les vacances, Quel amour d'enfant, les contes écrits par la comtesse... mais ce n'était pas suffisant ! Déjà surprise par la vitesse à laquelle j'avais englouti ces bouquins, il m'en fallait encore mais j'avais déjà relu ceux que je connaissais, alors j'ai pioché dans ma bibliothèque un des livres d'elle encore inconnus et j'ai choisi ce titre dont le titre et la couverture me tentaient. Cette période Relisons-la-Comtesse-de-Ségur s'en est allée avec mes nombreuses révisions et examens et maintenant qu'ils sont terminés, je suis plus dans une période Relisons-les-mangas-bien-tragiques-et-ambigüs-de-Riyoko-Ikeda (Très cher frère, La rose de Versailles, La fenêtre d'Orphée...), donc malgré tout ça, j'espère avoir encore assez de souvenirs pour faire un billet complet de ce volume !


Ce roman débute sur une note tragique : deux enfants, Jacques et son petit frère Paul, seuls et perdus, victimes du froid et de la faim, qui n'ont trouvé qu'un vieux chêne comme lieu de repos. Leur mère est morte et le père a été emmené par des gendarmes. Leur famille étant pauvre, ils n'ont nulle part où aller. Un jeune soldat, démobilisé après une guerre, et son chien tombent sur les deux enfants. Le soldat ne peut se résoudre à les laisser à leur triste sort et décide de les emmener à l'auberge la plus proche afin qu'ils puissent se restaurer. Il trouvera bien vite l'auberge de l'Ange-Gardien, tenus par deux sœurs : Elfy et madame Blidot, qui porte très bien son nom... Un lieu chaleureux, de rencontres, d'amour, d'amitié, de tolérance et de bonne humeur.


Ça fait du bien de relire un classique de temps en temps, même si c'est un classique jeunesse. On est plongé dans une autre époque, on voit toute la différence avec les romans d'aujourd'hui. On voit bien la nette évolution. Je l'ai bien remarqué en lisant, les mentalités ont changé depuis le XIXe siècle. Mais ça fait plaisir de se plonger dans la littérature jeunesse, de permettre soi-même de rajeunir, de se retrouver un peu en enfance. Les deux enfants, Jacques et Paul, sont adorables, serviables, courageux face à l'adversité, proche et loyaux envers l'autre. Ils trouveront en Elfy et madame Blidot deux mères adoptives adorables et aimantes, un ami très cher en Moutier, le soldat qui les a trouvé, mais aussi en la personne du général Dourakine, malgré ses défauts. Nous avons des personnages attachants pour la plupart : Moutier, le jeune soldat bon et courageux ; Elfy, la jeune sœur, un peu inconsciente mais aimante et douce ; madame Blidot ; le général Dourakine, un homme colérique, têtu, qui a tendance à tirer des conclusions un peu trop rapidement, un peu changeant, mais bon malgré tout, courageux, un brave homme qui saura se repentir de ses fautes ; Dérigny ; le curé et les autres...


C'est un peu gnan-gnan, il faut dire, c'est plein de bon sentiments, les gentils sont récompensés, les méchants finissent par se repentir ou par être punis, on a le happy ending pour la plupart des personnages, c'est assez prévisible, c'est plein de bonté, d'entraide, de charité à offrir sans rien à attendre en retour... comme dans la plupart des livres de la comtesse de Ségur. Dans ses œuvres, les bons sentiments sont mis en avant, les gentils sont récompensés ou sortis de leur triste situation, les méchants, quand ils ne se repentissent pas, sont punis pour leurs mauvaises actions. Il y a de la bonté, de la charité, on vit d'amour et d'eau fraîche, d'amitié, de loyauté. Mais dans ce monde de brute dans lequel nous vivons, ça fait du bien de lire de genre de chose, d'en retrouver même si c'est dans la littérature. Et puis, le livre est ancré dans son époque, après tout, les valeurs de l'époque et de l'auteur sont véhiculées dans cette oeuvre. Ainsi, les enfants doivent être bons, bien élevés, sages et obéissants ; la religion tient une place très importante, le curé est un personnage important dans le village, il faut prier le bon Dieu et la Sainte Vierge Marie pour une personne ou lorsque l'on est dans une triste situation, il faut savoir donner une seconde chance, pas de violence gratuite ; le patriotisme est important aussi, la fierté nationale, le devoir à son pays...


Donc, cette oeuvre a beau être un peu naïve, gnan-gnan, prévisible, il faut savoir qu'elle véhicule les valeurs de l'auteur et son époque, que les livres de la comtesse se ressemblent tous dans le fond (la bonté, l'amour, amitié et loyauté glorifiés, la place de la religion, des études, du patriotisme, les gentils récompensés, les méchants punis...), mais ce genre de chose se perd dans la littérature, tout cela fait la force des œuvres de la comtesse. Des livres comme elle en a fait, on en retrouve plus des comme ça, et si c'est parfois naïf et gnan-gnan, ça fait du bien d'en lire parfois. Pour retrouver un peu de tendresse dans ce monde de brute, de chaleur dans ce monde froid, pour comprendre les mentalités de l'époque et ses valeurs, pour comprendre l'auteur. Donc si ce n'est pas mon livre préféré de la comtesse de Ségur, ça reste un livre bien sympathique, tendre, abordable, avec plein de bons sentiments, de tolérance et de l'humour parfois (rien qu'avec le général Dourakine, et ses changements d'humeurs brusques parfois risibles), ça fait du bien de lire le quotidien de cette heureuse bande au sein de l'auberge et du village, leurs aventures, leurs rencontres... Je lirais sans doute la suite, Le général Dourakine, un jour, par curiosité et pour retrouver les protagonistes...



Extrait :


LE GÉNÉRAL.
Il faut donc bien du temps en France pour tout cela [les préparations de mariage] ! Chez nous, en Russie, ça va plus vite que ça. Ainsi, je vois Mme Blidot ; vous me convenez, je vous conviens ; nous allons trouver le pope qui lit des prières en slavon, chante quelque chose, dit quelque chose, vous fait boire dans ma coupe et moi dans la vôtre, qui nous promène trois fois en rond autour d'une espèce de pupitre, et tout est fini. Je suis votre mari, vous êtes ma femme, j'ai le droit de vous battre, de vous faire crever de faim, de froid, de misère.

MADAME BLIDOT, riant.
Et moi, quels sont mes droits ?

LE GÉNÉRAL.
De pleurer, de crier, de m'injurier, de battre les gens, de déchirer vos effets, de mettre le feu à la maison même dans les cas désespérés.

MADAME BLIDOT, riant.
Belle consolation ! A quel sort terrible j'ai échappé !

LE GÉNÉRAL.
Oh ! mais moi, c'est autre chose ! Je serais un excellent mari ! Je vous soignerais, je vous empâterais ; je vous accablerais de présents, de bijoux ; je vous donnerais des robes à queue pour aller à la cour, des diamants, des plumes, des fleurs !

Chapitre XX. Première inquiétude paternelle.

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