L'auteur :
Né en 1964, Frédéric Lenormand est un écrivain français, auteur de nombreux livres et séries de livres, essentiellement des romans policiers historiques, dont sa série Voltaire mène l'enquête, récompensée en 2011 par le prix Historia et le prix Arsène Lupin.
Quatrième de couverture :
Qui a osé assassiner la baronne chez qui Voltaire coulait des jours heureux ?
En ce froid février 1733, c'est la rue qui attend notre philosophe (ou pire, la Bastille !). Il lui faut donc retrouver le criminel sans délai avant que celui-ci ne s'en prenne à d'autres honnêtes gens - à lui-même, par exemple.
Heureusement, avec l'aide providentielle d'Emilie du Châtelet, Voltaire ne manque pas de ressources. Brillante femme de sciences, enceinte jusqu'au cou, celle-ci va l'accompagner dans son enquête où les subtilités féminines triompheront bien souvent de la philosophie. Ensemble, ils devront affronter de redoutables héritières en jupons, des abbés benêts et des flûtistes sanguinaires, décrypter des codes mystérieux, et surtout échapper à un lieutenant général de police prêt à embastiller Voltaire au moindre faux pas...
Mon avis :
Cela faisait un petit bout de temps que cette série me faisait envie... pour le peu de livres que j'ai lu de cette catégorie, le policier historique me séduit, et Voltaire est l'un des auteurs et personnages historiques qui m'intéressent le plus, et j'étais curieuse de voir ce que cette série « Voltaire mène l'enquête » pouvait offrir. Cela part déjà sur une bonne idée : Voltaire ayant déjà élucidé quelques affaires au nom de la justice et de la tolérance (je vous réfère à l'exemple de l'affaire Calas), je n'avais aucune peine à l'imaginer – même dans une fiction – à résoudre des affaires au nom de la justice et même de la philosophie. Ce genre de série me fait un peu penser à celle de Gyles Brandreth qui a choisi Oscar Wilde comme personnage pour résoudre des enquêtes.
J'avouerai ne pas être une experte sur le personnage de Voltaire mais je crois pouvoir dire que l'auteur a fait pas mal de recherches pour nous pondre un Voltaire plus vrai que nature, de le rendre crédible aux yeux des lecteurs, d'autant plus qu'il met en scène des personnages ayant réellement existé (ne serait-ce que Émilie du Châtelet partagea pendant quelques années la vie du philosophe). J'ignore dans quelle mesure les faits et informations historiques que nous avons sont véridiques, mais en tout cas le personnage de Voltaire est tel que je me l'imagine, cependant avec un côté « drama queen », du style j'aime-bien-exagérer-les-choses. Il y a un côté décalé dans ce roman qui m'a plu. L'intrigue policière est bien menée, je ne vais pas le nier et j'ai pris plaisir à la suivre, mais le but premier de l'auteur est de divertir le lecteur avant tout et pour ce but, il ne manque pas d'outils ! Roman décalé certes mais bien mené tout de même. Une enquête pas trop glauque ou effrayante mais une énigme à résoudre pour laquelle Voltaire n'exclue par l'espionnage et l'usage de la philosophie.
Voltaire, portrait peint par Nicolas de Largillière. |
Intelligent, sarcastique, amoureux de la philosophie, très attaché à son bien-être, avec une tendance à exagérer parfois les choses, il m'a fait rire de nombreuses fois et ce fut un plaisir de le suivre tout au long du roman. Il s'accorde très bien avec Émilie qui nous paraît d'abord comme une femme raisonnable avant de s'affirmer, de montrer ses vraies couleurs. C'est un duo très dynamique, amusant malgré lui, et attachant, je me demande si Émilie est présente dans les autres tomes... La fin du roman laisse présager que oui, j'espère aussi revoir l'abbé Linant, et le lieutenant de police Hérault qui m'est devenu plutôt sympathique malgré son envie d'offrir à Voltaire un séjour à la Bastille.
L'écriture de l'auteur est fluide et agréable à lire, il a su reconstituer Paris telle que la capitale l'était à l'époque, avec les difficultés pour certains auteurs de se faire publier. Il a su également faire référence quelques éléments de la vie de Voltaire : l'écriture de ses Lettres Philosophiques, ses séjours à la Bastille, les difficultés de la censure, sa préférence pour lire les nouvelles dans les journaux hollandais, beaucoup plus francs que ceux français qui ont tendance à ne pas parler de tout... sur le coup, je me demande si ce sera également le cas dans les autres tomes, s'il compte faire intervenir d'autres personnages ayant coutoyé Voltaire comme les philosophes des Lumières ou encore Frédéric II de Prusse avec qui Voltaire a partagé une relation à la fois amicale et tumultueuse...
Les chapitres sont courts pour la plupart, les personnages attachants pour les principaux, l'humour du roman est un délice à savourer, le roman est décalé mais l'enquête n'est pas négligée bien que j'avoue avoir eu du mal quelques fois, j'ai l'impression que c'était parfois chaotique et souvent entrecoupée, et j'ai eu du mal à différencier les suspects, qui est qui, qui fait quoi, qui avait quelle relation avec la victime... Sinon, la présence d'un petit fascicule à la fin du roman contenant une frise chronologique de la vie de Voltaire et des extraits de ses sources et de la correspondance de Voltaire sont très appréciables aussi et montrent bien le travail de recherche de l'auteur. En somme, je dirais avoir passé un bon moment avec ce roman et qu'il n'est pas exclue que je lise les tomes suivants prochainement...
Extrait :
Il ne fallut pas longtemps à Emilie pour comprendre que les accusations du philosophe n'étaient pas sans fondement. C'était bien à une messe janséniste qu'on l'avait menée, sous un Christ dont les bras à la verticale exprimaient l'idée que les élus seraient très peu nombreux. [...] Dans son sermon, le curé dressa une liste des mécréants voués aux flammes éternelles : les philistins, les sodomites, les adultères, les athées, les ministres du roi qui soutenaient la répression de la vraie foi. Quand il se mit à citer des noms, la marquise constata que celui de Voltaire suscitait des signes de croix nerveux.
Chapitre seizième. Où il n'est question que de saintes, d'anges et de papillons.
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