jeudi 29 décembre 2022

Les amants de Baker Street (T.3) Les années Sussex - Isabelle Lesteplume.


Un détective peut-il vraiment prendre sa retraite ?

Angleterre, début du XXe siècle.

Propulsé par la révolution industrielle, le monde est en plein changement. Sherlock Holmes et John Watson sont désormais célèbres, leurs méthodes sont utilisées par la police et leur courrier déborde de propositions d’enquêtes.

Mais plus le temps passe, plus l’âge les rattrape et plus ils sont fatigués de devoir constamment cacher leur relation. Ils commencent à imaginer une vie différente dans un petit havre de paix perdu dans le Sussex...

Hélas, l’Histoire n’a pas dit son dernier mot. Embarqués malgré eux dans la tourmente de plusieurs événements dramatiques, ils devront se battre pour survivre...

Et pour sauver le monde entier.



Quelle bonne façon de terminer l’année et d’en commencer une nouvelle avec Sherlock Holmes et ses aventures plein la tête ! J’attendais avec impatience ce dernier tome, dévorée de curiosité en me demandant comment l’auteure allait conclure sa trilogie et ce que ce troisième tome nous réservait.



C’est la fin d’une époque ! Sherlock Holmes rend son tabli… son deerstalker pour une retraite bien méritée dans le Sussex en compagnie de son compagnon. Mrs Hudson n’est plus, nous fermons les portes du 221B Baker Street. Holmes et Watson profitent de leur retraite… oui mais pas pour très longtemps ! Une affaire importante du gouvernement britannique, en la personne de Mycroft Holmes et de son jeune agent secret, tirent Holmes et Watson de leur retraite. Il en va de la sécurité du pays, voire même de l’Europe qui est sous tension. Une guerre mondiale menace… Afin de récupérer des documents officiels importants, Holmes et Watson doivent traverser l’Atlantique et se rendre en Amérique. Pour cela, le gouvernement leur propose le nec plus ultra ! Un magnifique paquebot qui est sur le point d’effectuer son premier voyage en avril 1912… ça vous dit quelque chose ?



Holmes et Watson embarquent donc au sein du RMS Titanic ! Certains lecteurs pourraient trouver que cela fait de trop. Faut-il donc s’attendre à ce qu’ils rejouent Jack et Rose ? Si j’ai été surprise que l’auteure ait inclus le Titanic dans son roman, je ne suis pas choquée. Ce n’est pas le premier pastiche holmesien à faire embarquer nos deux héros sur le célèbre paquebot. Sherlock Holmes a été cuisiné à toutes les sauces dans les nombreux pastiches holmesiens. Il aura rencontré Sigmund Freud, confronté Arsène Lupin, le fantôme de l’opéra ou Jack l’Eventreur, enquêté sur l’affaire Mayerling, participé à la Première Guerre Mondiale en tant qu’espion… alors le faire voyager à bord du Titanic ne m’étonne pas. Je dois même avouer avoir couiné de plaisir lorsque j’ai appris qu’une partie de l’intrigue était consacrée au Titanic. Est-ce que j’ai écouté la soundtrack du film en lisant ces chapitres ? Bien-sûr que oui ! Mais je promets ne pas avoir imaginé Holmes et Watson refaire la fameuse scène à l’avant du paquebot.



Afternoon, de suwi (Source)
J’ai pris beaucoup de plaisir à lire cette partie consacrée au Titanic, le voyage aussi bien que le naufrage, d’autant plus qu’elle est chargée en émotion, ajoutons à cela que l’auteure a également introduit des personnalités qui ont bel et bien vécu et qui ont péri dans le naufrage. On se doute bien-sûr que Holmes et Watson vont s’en sortir, bien que cela ne nous empêche pas de craindre pour eux tant ils craignent de perdre l’autre et chaque séparation nous donne envie de voir les heureuses retrouvailles, après une bonne dose d’angst. J’ai également eu mal au cœur en lisant la disparition de certains personnages [spoiler] et notamment celle du jeune agent secret, qui a péri dans le naufrage [/spoiler].

Après cette partie, la suite n’en est pas moins chargée en émotions et en rebondissement. Un antagoniste bien connu refait parler de lui, en Amérique cette fois-ci, obligeant nos personnages principaux à tout mettre en œuvre pour éliminer cette menace, ce qui amène de nouvelles scènes d’action, de tension et de rebondissements et… je dois avouer qu’un élément de cette partie du roman m’a semblé vraiment too much et qui a surtout servi à créer davantage de drama entre nos différents personnages [spoiler] à savoir que Mary Morstan Watson et son amante, Cecil Forrester, ont survécu à leur naufrage et ont fait croire à leur mort pour vivre dans la clandestinité en amoureuses puis plus tard en tant que super espionnes. Pour ce coup, la rancœur de Watson m’a paru plus que justifiée [/spoiler].



Il y a aussi l’ombre de la Première Guerre Mondiale qui plane et assombrit l’intrigue. Nous sommes bien loin de l’époque victorienne et, loin de leurs premières enquêtes, Holmes et Watson doivent survivre dans un Londres en guerre tout en prêtant main forte, notamment dans les hôpitaux pour soigner les blessés. Ce dernier roman est donc riche en action et en rebondissement, avec très peu de temps morts. L’écriture de l’auteure reste très vivante et dynamique, elle captive notre attention et nous donne envie de dévorer la suite.



Malgré les moments de tension et de drame, l’auteure ne néglige pas les moments plus tendres où notre couple peut se reposer et profiter de l’autre. Malgré les obstacles qu’ils continuent de rencontrer, ils restent ce couple très uni et toujours amoureux qu’on aime, et on saura apprécier les moments de domesticité (notamment durant leur retraite dans le Sussex) autant que les moments plus dramatiques, et j’ai d’ailleurs apprécié que l’auteure reprenne l’aventure des Trois Garridebs, et son interprétation des personnages reste fidèle et intéressante à suivre. On sent véritablement que Holmes et Watson ont vieilli. S’ils restent fidèles à eux-mêmes, on sent qu’ils n’ont plus les mêmes capacités que lorsqu’ils étaient plus jeunes, qu’ils ne peuvent plus se permettre le même genre d’aventure qu’avant. Watson, notamment, qui est limité. Il se fatigue plus vite, ne parvient plus à courir aussi vite et aussi longtemps, et cela pèse sur son moral, il doute de sa valeur, s’il a encore sa place auprès de Holmes dans leurs aventures, a peur d’être mis de côté et à la fois de ralentir et limiter Holmes dans ses enquêtes.



L’auteure nous a offert un dernier tome aussi riche en émotion, en action et en rebondissement que les précédents, et elle clôt avec brio sa trilogie sur Sherlock Holmes que je referme à regret, tant j’aurais voulu lire d’autres aventures du détective et de son Boswell sous sa plume. J’ignore si elle se consacrera de nouveau à cet univers, toujours est-il que je suivrai sa bibliographie avec intérêt et que je découvrirai un jour avec plaisir ses réécritures M/M des contes de fées.


Le monde changeait à toute allure en ce début de siècle, lancé dans une course au progrès qui le transformerait à tout jamais. Et eux, dans tout cela ? Trouveraient-ils une place dans cette nouvelle ère ? 

— Nous ne sommes pas encore de vieux croulants, tout de même ! s’exclama Holmes, le tirant de ses rêveries mélancoliques. 

Il s’aperçut qu’ils venaient d’atteindre le 221b. Il soupira, habitué à ce que son compagnon suive le train de ses pensées sans qu’il les ait partagées à haute voix, et sortit sa clé.

(...) — Je n’ai jamais pensé que nous étions de vieux croulants, lâcha le docteur en se laissant tomber sur le sofa. Mais j’ai quelques fois l’impression d’appartenir à un univers en train de disparaître. Pas vous ? 

Holmes lui tendit son verre et s’assit à côté de lui. 

— Mon pauvre Watson, répondit-il affectueusement. Ne vous en faites pas, je suis certain que tous les hommes de votre âge depuis le début de la civilisation ont réagi de la même façon. 

— Voilà qu’on me traite de sénile, à présent…

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