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Françoise Siefridt est aujourd'hui une dame de 88 ans, coulant des jours heureux au Havre. Ancienne Résistante, elle fut emprisonnée en 1942 pour avoir porté l'étoile jaune en signe de solidarité pour les juifs.



/ ! \ Challenge Histoire. / ! \


Quatrième de couverture :

Le témoignage unique d'une jeune chrétienne, internée dans les camps français pour avoir porté l'étoile jaune.

C'est le jour même de l'ordonnance nazie imposant le port d'un insigne à tous les Juifs que Françoise Siefridt, une étudiante chrétienne de dix-neuf ans, décide d'arborer l'étoile jaune avec l'inscription " Papou ", pour en dénoncer le caractère barbare et humiliant. Un geste de solidarité courageux qui lui vaut d'être aussitôt arrêtée par la police française. De juin à août 1942, au cours de son internement comme " amie des Juifs " aux camps des Tourelles puis de Drancy, Françoise Siefridt a tenu un Journal dans lequel elle rapporte les scènes poignantes dont elle a été témoin
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Mon avis :

C'est sur le blog de Wild World que j'ai repéré ce titre. D'habitude, je ne lis pas trop de témoignages, à part peut-être quand c'est historique et encore, j'ai tendance à éviter les témoignages de juifs lors de la WWII, pas que ça m'intéresse moins mais parce que ça me rend malade à chaque fois que je lis les horreurs et les injustices dont on été victimes les juifs pendant la seconde guerre mondiale, surtout quand ces-dits témoignages prennent lieu dans des camps de concentration. Je me rappelle avoir eu la nausée après ma lecture de Si c'est un homme de Primo Levi, livre que j'ai d'ailleurs eu du mal à terminer, c'était une lecture difficile.

Néanmoins, j'ai voulu retenter l'expérience des journaux intimes/témoignages lors de cette époque terrible mais intéressante à étudier. Voici donc le journal intime de Françoise Siefridt, jeune chrétienne et résistante, durant sa durée d'emprisonnement dans un camp de concentration français. Son crime : avoir sympathisé avec des juifs et en montrant à tous son soutien pour eux en arborant une étoile jaune avec l'inscription Papou.

Nous n'accedons pas pourtant tout de suite au journal de Françoise Siefridt, avant nous avons une préface d'environ 80 pages, de Jacques Duquesne, plutôt longue mais détaillée où nous avons un récapitulatif instructif sur cette période funeste, il nous dresse un portrait de la France dans laquelle les élèments retracés dans le journal vont avoir lieu. Nous avons un bref rappel de cette période, de la seconde guerre mondiale, du gouvernement de Vichy, la collaboration avec l'occupant allemand, la place des juifs dans cette société dominée par les Nazis, en France ainsi que la position de l'église épiscopale française sur ce sujet, sur la question des Juifs, sur les silences fréquents des autorités religieuses concernant les rafles, les déportations et les faits des Résistants, notamment des Résistants chrétiens. C'est une preface longue que nous livre Jacques Duquesne, certes, mais elle est intéressante (même s'il y a eu quelques débordements de matières par-ci par-là)

Passons au journal, son auteur est une jeune femme adorant la vie et, entraînée par les vagues de protestations, elle s'attire les foudres des autorités. Elle a eu le cran de s'opposer à elles en témoignant sa sympathie pour les juifs et en portant, elle une chrétienne, une étoile de David. Emprisonnée dans un camps pour son acte, elle nous raconte son long séjour en prison. On sent bien sa jeunesse, elle est assez candide ou ignorante parfois et n'hésite pas, comme beaucoup à cette époque quand l'impact de la religion était toujours aussi grand, à se réfugier derrières ses croyances lorsque la situation dérapait ou paraissait floue. Parfois, on pourrait presque oublier où elle se trouve car elle en vient des fois à ressentir du plaisir à vivre sa détention, à rencontrer d'autres personnes, mais sa bonté de coeur lui permet de traverser cette expérience affreuse (car elle fut tout de même prisonnière dans deux camps) en aidant ses co-détenyes et à des enfants, c'est un geste admirable. Le journal en lui-même est court et s'ouvre sur Françoise et son amie, Paulette, lorsqu'elles ont décidé en ce 7 Juin 1942 de défier les autorités allemandes et françaises en arborant l'étoile jaune. Une provocation presque taquine qui va leur valoir trois mois de détention (pour Françoise) au camp des Tourelles puis Drancy. Il y a la peur avant de prendre des habitudes, se faire des amis même avant que le destin ne décide qui restera et qui partira vers d'autres camps - de concentration ou d'extermination. Françoise Siefridt nous raconte ce quotidien avec émotion, enfermée avec d'autres. Elle a eu la chance de survivre à cette expérience. C'est une femme admirable, on le constate à travers son journal.

Après le journal vient la postface de Cédric Gruat qui analyse la situation, oriente le sujet sur les actions de Françoise Siefridt et ceux qui ont protesté comme elle, par acte de protestation et de foi, qui cherche à prouver que chrétiens et juifs ne sont pas différents. Monsieur Gruat revient sur certains évènements narrés dans le journal pour mieux les éclairer dans le contexte historique, comme une sorte de bilan sur cette révolte civique qui eu des conséquences tragiques, il précise aussi que le journal a été rédigé avec un soupçon d'auto-censure par peur des représailles si jamais ce manuscript venait à être découvert. Démarche analytique intéressante, elle permet de mieux comprendre et de faire découvrir au lecteur des détails qui pourraient lui avoir échappé. A noter aussi la présence d'annexes qui terminent l'ouvrage et qui offre une aide à la compréhension du contexte historique, lieux, protagonistes...

Mes impressions concernant ce livre... je dirais que c'était une lecture instructive, de bonne qualité, intéressant malgrè une préface plutôt longue. Suivre le quotidien de Mme Siefridt à travers son journal est émouvant quand on lit ce qu'elle a vécu. Niveau documentation, rien à redire, c'est un livre complet en informations et explications. Une agréable découverte, pas inoubliable mais instructive surtout.

Extrait :

Nous chantons de toute notre âme, nos voies sont émues. Derrière leurs barreaux, Sonia, Raïssa, les isolées écoutent. Leurs visages s'illuminent d'une joie extraordinaire, d'une joie qui résulte d'une immense souffrance vaincue par une espérance qui veux espérer contre tout espoir. Et nos chants montent dans l'air, le timbre des voix est pur, spiritualisé, pour ainsi dire désincarné. Il donne l'impresion d'avoir été dépouillé par la souffrance de toute la chaleur de la joie terrestre. "Il y a longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierai".