mardi 23 avril 2024

Lore Olympus - Rachel Smythe.


Perséphone, jeune déesse du printemps, est nouvelle au Mont Olympe. Sa mère, Déméter, l'a élevée exprès dans le royaume des mortels, pour la protéger des tentations. Mais après que Perséphone lui a promis de s'entraîner comme vierge sacrée, elle est autorisée à aller à l'université et à vivre dans le monde glamour et trépidant des dieux. Lorsque sa colocataire, Artémis, l'emmène à une fête, sa vie entière change : elle y rencontre Hadès et l'étincelle est immédiate avec le souverain charmant mais incompris des Enfers.

Tout s'accélère alors, Perséphone doit maintenant naviguer entre les jeux stratégiques et les relations déroutantes qui régissent l'Olympe, tout en trouvant sa place et en affirmant son pouvoir.



Avec tout l’engouement dont fait preuve Lore Olympus, il était grand temps que je découvre enfin ce webcomic. J’étais pourtant récalcitrante, au début, à cause du style de dessin. A chaque personnage, sa propre couleur… et pas que les vêtements ! Héra en jaune, Déméter en vert, Zeus qui flirte avec le violet (et avec tout ce qui bouge même), mais aussi Perséphone en rose et Hadès en bleu… Bonjour le cliché ! Le côté contemporain me rendait encore plus récalcitrante, n’étant pas friande des mythes à la sauce contemporaine. Seulement voilà, j’ai été tellement happée par l’histoire que le côté contemporain a fini par me plaire et que j’ai fini par m’habituer aux graphismes.

 

La saga reprend donc sans surprise le mythe d’Hadès et Perséphone sur ses grandes lignes pour mieux les adapter à notre monde moderne et y apporter sa petite touche. Ici, par exemple, c’est bien malgré lui qu’Hadès emmène Perséphone aux Enfers et, gentleman, il se garde bien de la séquestrer chez lui en lui proposant des grains de grenade. Les dieux gardent malgré tout leurs caractéristiques et attributs, et sont bel et bien ancrés dans notre époque. L’occasion de montrer que certains de ces dieux, à qui on vouait un culte jadis, n’étaient pas tout rose et même toxiques.

 

Mais, toxique, la relation entre Hadès et Perséphone ne l’est pas. J’ai beaucoup aimé la façon de l’auteure de peindre leur histoire d’amour, une relation en slow burn, donc qui prend le temps de bien se mettre en place, sans pour autant prendre trop de temps, et qui s’éloigne des clichés de romances style Harlequin ou, pire, les dark romances. C’est une relation saine, basée sur le respect, et qui ne laisse pas la différence de statut social ou d’autres obstacles la mettre à mal. C’est vraiment une bouffée d’air frais face à l’invasion dans nos librairies des dark romances (qui sont, la plupart du temps, des relations bien toxiques). Ils sont dévoués l’un à l’autre, on rit et pleure avec eux, et chaque étape franchie est un triomphe pour eux comme pour nous… Et dieu sait quels obstacles vont se dresser sur leur route !

 

Car, oui, j’ai aimé que Lore Olympus ne soit pas QUE de la romance, bien que la relation Hadès/Perséphone soit le cœur de cette série et qu’elle le porte à merveille. Nous suivons plusieurs sous-intrigues qui vont servir à l’intrigue principale, il y a des épreuves (la scène du procès… je n’en dirai pas plus), des dangers et des menaces (ah, Kronos…), des mystères (notamment sur les déesses fertiles, qui sont-elles, pourquoi ont-elles disparues, etc).

 

C’est aussi une histoire de famille (aussi bien la relation mère-fille compliquée entre Déméter et Perséphone que Zeus et Héra et leurs enfants, par exemple), de traumatismes (aussi bien pour Hadès que pour Perséphone), de justice, d’amour (oui car il n’y a pas que la romance entre Hadès et Perséphone, même si elle est la principale de la saga). Les dieux de l’Olympe, tout comme les nymphes et autres êtres, sont au final comme nous. Ils ont leurs joies, leurs peines, leurs qualités, leurs imperfections, leurs problèmes. C’est facile de s’attacher à eux, de craindre pour eux, de rire et d’espérer avec eux, et c’est l’autre force de Lore Olympus.

 

Lore Olympus nous présente toute une panoplie de personnages auxquels on s’attache, qu’ils soient des personnages principaux, secondaires ou tertiaires. Ils sont attachants pour la plupart, mais tous bien travaillés et ont des relations finement tissées. Ils ne sont pas que noir ou blanc. Même les plus purs ont leur part d’ombre, même les plus imparfaits ont des moments de rédemption ou qui nous montrent juste qu’ils ne sont pas de parfaits salopards. J’aurais bien aimé que Poséidon soit un peu plus exploité, au lieu d'être fréquemment vu comme le frère goofy, car il y a du potentiel puisqu’il a le même traumatisme qu’Hadès car il a aussi été dévoré par Kronos, et que ce traumatisme faisait qu’Hadès et Poséidon se comprenaient mieux que Zeus qui n'a jamais été dévoré, qui n’a jamais eu besoin de s’acclimater à la vie à la surface.

J'aime beaucoup Héra, ce qui change de la vision d’Héra que j'ai souvent vu dans la fiction. Je la trouve vraiment mise en avant et vue de façon plus positive. J'aime aussi que Zeus soit plus complexe qu’il n'y paraît plusieurs de ses décisions sont discutables, il a souvent agi comme un connard et ça aurait été tellement facile de le représenter comme tel, mais c'est un personnage qui tient sincèrement à sa famille, qui essaye de réparer ses tords parfois, de même qu’Arès que j’ai beaucoup aimé aussi, ainsi qu’Éros, Hermès et Artémis. J’aurais bien voulu voir Athéna un peu plus. Par contre, le seul personnage qui n’a aucune qualité pour le sauver, c’est bien Apollon, mais je n’en dirais pas plus…



Une excellente surprise donc que ce webcomic. On alterne entre les moments de calme, avec humour, légèreté et tendresse, et les moments forts, avec de l’action, des rebondissements, de la tension, des révélations inattendues. Les personnages sont bien travaillés et évoluent avec justesse, c’est un plaisir de les voir grandir et évoluer, surtout voir Perséphone gagner en expérience, prendre de plus en plus confiance en elle et s’imposer comme la déesse qu’elle est.

 

En résumé, une bande dessinée contemporaine, à la fois drôle, sensible et décalée. Sous des dehors légers et festifs, Rachel Smythe aborde donc des sujets plus profonds et sensibles tels que, le poids et l'influence de la communauté, le regard des autres, le viol, la maltraitance et les relations toxiques. Bref, Lore Olympus, c’est validé et même un coup de cœur !


dimanche 7 avril 2024

Les Carnets de l'Apothicaire - Natsu Hyuuga, Itsuki Nanao et Nekokurage.


À 17 ans, Mao Mao a une vie compliquée. Formée dès son jeune âge par un apothicaire du quartier des plaisirs, elle se retrouve enlevée et vendue comme servante dans le quartier des femmes du palais impérial ! Entouré de hauts murs, il est coupé du monde extérieur. Afin de survivre dans cette prison de luxe grouillant de complots et de basses manœuvres, la jeune fille tente de cacher ses connaissances pour se fondre dans la masse.

Mais, quand les morts suspectes de princes nouveau-nés mettent la cour en émoi, sa passion pour les poisons prend le dessus. Elle observe, enquête... et trouve la solution ! En voulant bien faire, la voilà repérée... Jinshi, haut fonctionnaire aussi beau que calculateur, devine son talent et la promeut goûteuse personnelle d'une des favorites de l'empereur. Au beau milieu de ce nid de serpents, le moindre faux pas peut lui être fatal !



Série de mangas adaptant des light novels, Les carnets de l’apothicaire nous plonge dans le quotidien de Maomao, élevée et formée par un apothicaire puis capturée alors qu’elle partait à la cueillette d’herbes pour être vendue comme servante dans le quartier des femmes du palais impérial. Afin de survivre dans cette cage dorée grouillant de complots, Maomao cache ses connaissances pour se fondre dans la masse. Cependant, sa curiosité se retrouve piquée lorsque les morts inexpliqués et suspectes de bébés des courtisanes mettent la cour en émoi. De par sa connaissance des poisons et son sens de l’observation, elle parvient à résoudre le mystère et se fait remarquer par Jinshi, l’intendant de la cour, et par la favorite de l’empereur, Gyokuyô qui décide de la prendre à son service comme dame de compagnie et goûteuse. Très vite, Maomao se retrouve entraînée dans les intrigues du palais qu’elle est appelée à résoudre de par ses connaissances en matière de remèdes et de poisons.



Ce manga est une excellente découverte pour ma part. J’empruntais les tomes à la médiathèque que je dévorais et j’avais bien du mal à attendre l’arrivée des tomes suivants tant il me tardait de lire la suite. Cela fait bien longtemps que je n’avais pas autant accroché à une série littéraire !



Les carnets de l’apothicaire nous présente un univers riche, intriguant et plus sombre qu’il n’y paraît. Les enquêtes sont bien menées et prenantes, et la plupart sont rythmées par des enjeux qui mettent en lumière les rôles de la femme et ce qu'elle devait faire pour survivre à cette époque. Il n’y a pas encore de grosse intrigue qui se présenterait comme le fil rouge de l’histoire mais pour le moment, le manga parvient encore à suffisamment me captiver pour que cela ne me gêne pas. On sent que la mangaka (ou plutôt l’auteure car, je le rappelle, le manga est une adaptation de romans) ne nous dit pas tout, il y a encore tant de questions, tant de mystères.



Jinshi et Maomao


Les dessins sont par ailleurs très jolis et nous plongent dans un bel univers de Chine ancienne à la fois historique et fictive qui s’intéresse aussi bien aux concubines impériales qu’aux servantes ou courtisanes des quartiers du plaisir. Les personnages sont bien campés et ont leur part de mystère.



Notre protagoniste, Maomao s’affirme de tome en tome. C’est une héroïne vraiment unique dans son genre. Elle possède une curiosité insatiable et des connaissances solides dans le domaine des poisons et tout ce qui touche au métier d’apothicaire qui la passionne. Elle n’hésite d’ailleurs pas à goûter du poison pour son propre plaisir et à se faire mordre ou piquer par un animal venimeux pour voir les effets sur son corps. Elle est en extase devant les réserves d’herbes médicinales, cherche à lire des ouvrages qui lui sont interdits, elle agit souvent comme un chat. Elle est complètement délurée, loufoque, passionnée, cynique, intelligente et capable. Je l’adore. C’est une héroïne terriblement attachante et c’est un plaisir de la voir évoluer. Il me tarde de voir ce que l’avenir lui réserve !



L’autre personnage à se démarquer est bien sûr Jinshi, eunuque à la beauté surnaturelle, qui officie à la cour du palais où résident les concubines en tant qu’intendant. Sa beauté est telle qu’il attire hommes comme femmes. L’ironie de la situation est que Maomao est la seule pour qui il ressent de l’attirance, mais la jeune fille est la seule à ne pas être intéressée par lui. Cela dit, ils forment un duo très intéressant. Jinshi aime beaucoup la taquiner, mais on sent que son attirance se transforme peu à peu en des sentiments plus profonds et qu’il tient de plus en plus à elle, et si Maomao n’est pas attirée par lui (pas encore ?), elle sera amenée à se rapprocher de lui et lui être loyale. J’ai hâte de voir comment leur relation va évoluer et en apprendre plus sur Jinshi qui n’est pas celui qui semble être et qui a un passé et des origines mystérieuses. En tout cas, nos deux personnages forment un duo intéressant, drôle et attachant.



Parmi les autres personnages que nous sommes amenés à rencontrer plusieurs fois, il y a les principales concubines de l’empereur dont Gyokuyô, le père de Maomao, les courtisanes du quartier des plaisirs où a grandit Maomao et qu’elle considère comme ses sœurs, les servantes de la cour, etc.



Ce manga regroupe plein d’ingrédients attrayants ! Humour, mystères, enquêtes, amour, drame, secrets, complots, condition de la femme, une riche galerie de personnages dont des personnages féminins complexes. J’ai vraiment eu un coup de cœur pour ce manga et c’est avec grand plaisir que je lirai les prochains tomes (vivement le tome 14 !)



Droite : image tirée de l'anime
Gauche : couverture du premier tome du roman (ou light novel)