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mardi 26 septembre 2023

Chambre 1408 - Stephen King.


« Dans une maison abandonnée ou dans le donjon d’un vieux château, votre incrédulité peut vous servir de protection. Dans la chambre 1408, elle ne fera que vous rendre encore plus vulnérable. »


Mike est écrivain et chasseur de fantômes. Non pas qu’il y croie lui-même, bien au contraire. Jusque-ici, rien n’est encore parvenu à vaincre son scepticisme. Rien, jusqu’à cette enquête qui le mène à l’hôtel Dolphin de New York, réputé pour sa tristement célèbre chambre 1408. Une chambre supposée hantée…


Je n’avais pas prévu de faire la catégorie sur la lecture commune pour le challenge, mais en découvrant les PAL des autres participants j’ai trouvé ce titre et j’ai voulu à tout prix l’ajouter à ma propre PAL. Cela faisait un petit moment que je voulais lire à nouveau Stephen King et une histoire du maître incontesté de l’horreur tombe à pile pour la saison.



Il s’agit d’une histoire courte dans laquelle nous suivons Mike, pas crédible ou impressionné pour un sou, et qui fait fortune en écrivant des livres où il relate ses visites dans des lieux paranormaux comme des châteaux, des maisons ou des cimetières. Pour son prochain livre, il s’attaque aux hôtels hantés et décide, pour cela, d’aller dormir dans la chambre d’un hôtel new-yorkais réputée hantée et dans laquelle ses précédents occupants ont trouvé la mort ou la folie.



Pendant la première partie de l’histoire, nous suivons Mike qui rencontre et écoute les nombreuses mises en garde d’Olin, le gérant de l’hôtel, qui fait tout pour convaincre Mike de ne pas mener son projet à terme et de faire demi-tour avant qu’il ne soit trop tard, lui racontant le passé de la chambre 1408 et les nombreuses tragédies vécues par les précédents occupants de la chambre mais aussi les mésaventures subies par le personnel qui vient nettoyer la chambre. Mort subite, accident peu de temps après, perte soudaine d’un sens. Tout porte à croire qu’il y a quelque chose de mauvais dans la chambre qui cause le malheur à celui ou celle qui foule son sol. Mike se borne pourtant, refusant d’y croire et déterminé à passer la nuit dans la chambre 1408 et c’est ainsi que nous abordons la seconde partie de l’histoire. Nous découvrons ensuite la chambre aux côtés de Mike. Si tout paraît anodin de prime abord, avec des détails étranges mais sans plus (par exemple des cadres penchés ou les murs d’un jaune un peu trop flamboyants), les étrangetés se multiplient [spoiler] les personnages des tableaux qui bougent, des appels téléphoniques effrayants, des hallucinations [/spoiler]. Très vite, on se sent oppressé en même temps que le personnage dans cette chambre où tout peut arriver.



Bien que je classe cette nouvelle dans le genre de l’horreur, je dois avouer qu’elle ne m’a pas vraiment fait frissonner, du moins en tant que lectrice car si j’avais vécu ce que le personnage principal a vécu, j’aurais été si traumatisée que des années de psy ne parviendraient à arranger. Encore que je n’aurais jamais mis les pieds dans cette chambre, voire même l’hôtel, même si l’on m’offrait tout l’or du monde. La façon de Stephen King d’effrayer son lecteur est ici subtile. Comme Mike, on ignore au début si c’est réel ou le fruit de son imagination. L’ambiance est oppressante et inquiétante. On se sent observé et étouffé. Sans avoir été effrayée, j’ai tout de même senti un certain malaise ainsi qu’un sentiment d’oppression.



Je trouve que Stephen King a su balancer l’histoire et son personnage parfaitement entre la folie et le « surnaturel ». À la fin, nous ne pouvons pas trancher si ce qui s'est passé dans cette chambre est dû à la folie de Mike ou quelque chose se cache bien entre ces murs. Peut-être un peu des deux, qu’il y a quelque chose de foncièrement mauvais et dérangeant qui joue beaucoup sur la psychose des personnages pour les mener à la folie puisqu’on ignore avec certitude si ce que Mike a vu est réel ou le fruit de son imagination [spoiler] que la personne que Mike a croisé quand il a fui la chambre s’est retrouvé étrangement attiré par la chambre et qu’il y serait entré si Mike ne l’en avait pas empêché [/spoiler].



Je suis assez mitigée concernant cette nouvelle. D’un côté, j’apprécie le fait que cette histoire d’horreur repose sur une atmosphère oppressante qui joue sur la psychologie, sans jumpscare ou montre sanguinolent ou mauvais esprit, d’un autre côté je m’attendais à être plus effrayée, à ce que le mal qu’abrite la chambre soit plus concret, que d’autres manifestations apparaissent un peu selon la façon d’agir de l’hôtel Overlook dans Shining qui jouait sur les craintes de sa victime et qui causait des manifestations maléfiques. J’ai eu un sentiment de trop peu avec Chambre 1408. Certes, Stephen King nous prouve qu’il n’a pas besoin d’écrire une longue histoire pour effrayer son lecteur, mais l’histoire a été trop courte pour que je me mette à angoisser.



En résumé, c’est une histoire qui se laisse lire, d’autant plus qu’elle est courte, et qui parvient à créer un sentiment de malaise et d’oppression avec efficacité. Pour autant, elle reste assez oubliable et ce n’est pas avec ce titre que je conseillerais pour découvrir Stephen King.


« Vous aurez quelque chose à redouter. Parce qu’il n’y a pas de fantômes, dans la chambre 1408, et il n’y en a jamais eu. Il s’y trouve par contre quelque chose, une chose dont j’ai moi-même ressenti la présence, mais il ne s’agit pas d’une présence spirituelle. Dans une maison abandonnée ou dans le donjon d’un vieux château, votre incrédulité peut vous servir de protection. Dans la chambre 1408, elle ne fera que vous rendre encore plus vulnérable. »

lundi 20 juin 2022

Joyland - Stephen King.



Après une rupture sentimentale, Devin Jones, 21 ans, débarque l’été 1973 à Joyland, petit parc d’attraction sur le littoral de la Caroline du Nord. Il est embauché avec d’autres étudiants pour compléter l’équipe de forains, à la fois étrange et joyeuse.  

Sa rencontre avec un petit garçon doué de voyance, atteint d’une maladie grave, et surtout de sa mère, va changer la vie de Devin. 

Obsédé par le mystère du train fantôme soi-disant hanté par le spectre d’une femme égorgée 4 ans auparavant, le jeune homme se lance dans l’enquête. Un nouveau meurtre est-il possible ? Parviendra-t-il à l’éviter ? Une chose est sûre, l’aventure le changera à jamais...




Qui aurait cru que lire Stephen King pourrait donner envie d'aller dans une fête foraine ou dans un parc d'attraction, sans y trouver de clown terrifiant (ceux-là sont dans les égouts…)



Son année scolaire terminée, Devin Jones, 21 ans, aspirant écrivain mais pas devin (oui avouons-le, c'est un jeu de mot terrible), cherche un job d'été. Alors qu'il prévoyait de rester auprès de Wendy, sa petite-amie, celle-ci le lâche pour aller travailler au loin avec son amie. C'est le cœur brisé et la tête remplie d'incertitudes que Devin postule chez Joyland, un parc d'attraction près de la côte, mêlant son quotidien à celui des forains, apprenant leur dialecte, vendant du rêve aux enfants sous le costume de la mascotte, et découvrant le mystère qui entoure la maison de l'horreur, cette attraction où une jeune femme a trouvé la mort…



Point d'horreur dans ce roman. Ici, le maître incontesté de l'horreur nous offre une histoire dans laquelle se mêlent nostalgie, un brin de fantastique, une petite intrigue policière mais surtout la tranche de vie d'un jeune homme qui va vivre des expériences qui vont lui apprendre à grandir, à mûrir. Ce n'est pas exactement un policier, l'enquête arrivant assez tardivement dans l'intrigue. C'est davantage un roman d'apprentissage rempli de nostalgie avec des pointes de mystère. Ajoutons à cela quelques notes d'humour avec, notamment, des personnages qui n'ont pas peur des répliques drôles ou sarcastiques.



J'ai aimé cette atmosphère de fête foraine avec ses forains et la parlure (langage forain inventé par l'auteur), les coulisses d'un parc d'attraction, ses manèges, ses visiteurs, comment les forains vendent du rêve aux visiteurs. C'est l'odeur des hot dogs et des barbes à papa, ce sont les cris des enfants, la musique des attractions. On baigne dans cet univers comme un poisson dans l'eau grâce aux descriptions plus vraies que nature.



Les personnages sont émouvants, on ressent pour eux beaucoup de tendresse. Je pense notamment au jeune Mike et sa maman, bien que Devin ne soit pas en reste. Ils sont terriblement humains et touchants. On retrouve bien-sûr l'aspirant écrivain qui mène l'enquête et l'enfant doté d'un pouvoir psychique, des figures fréquentes dans les romans du maître King. J'ai aimé la dynamique entre ces trois personnages et, malgré la méfiance compréhensive et initiale de la mère, les voir s'attacher et former un trio attachant. Le sort de Mike ne peut que nous toucher et la fin est un déchirement. Il y a un sentiment assez bittersweet dans cette fin, et on aurait voulu qu'ils restent ensembles tous les trois.



Il se dégage donc de cette histoire beaucoup de nostalgie (le fait que Devin raconte cette histoire des années plus tard ne fait que renforcer ce sentiment), d'insouciance, de légèreté mais avec les drames de la vie (la séparation, la mort, les illusions...). De la douceur dans ces souvenirs et le côté thriller/policier apporte une petite touche amère mais non désagréable. La présence d'une enquête relevée par un soupçon de surnaturel vient émoustiller la lecture. Si je regrette que l'enquête ne prenne finalement pas une grande place, je reconnais que ce n'est pas le but premier du roman et, bien qu'elle ne fasse pas frissonner [spoiler] sauf la fin où Devin est confronté au meurtrier et la fin sanglante de l'assassin [/spoiler], cette enquête est assez intéressante pour qu'on veuille découvrir le fin mot de l'histoire... Est-ce simplement une histoire de meurtre dans une attraction, ou est-ce lié à quelque chose de plus profond, de plus sinistre ?



Ce n'est pas un roman mémorable mais j'ai passé un bon moment de lecture. J'ai aimé ce mélange de policier et de roman initiatique, une enquête surnaturelle qui se mêle à des tranches de vie, les premières blessures de l'amour, l'innocence, l'intuition qui aide parfois à jeter ses pas plus facilement dans l'inconnu, la nostalgie, le souvenir d'un été qui bouleverse une vie, des expériences qui nous métamorphosent et nous aident à grandir...

 

Mon père m’avait appris – surtout par l’exemple – que pour se rendre maître de sa vie, un homme doit d’abord se rendre maître de ses problèmes.

jeudi 27 janvier 2022

Shining : L'enfant lumière - Stephen King.


Situé dans les montagnes Rocheuses, l'Overlook Palace passe pour être l'un des plus beaux lieux du monde. Confort, luxe, volupté... L'hiver, l'hôtel est fermé. Coupé du monde par le froid et la neige. 

Alors, seul l'habite un gardien. Celui qui a été engagé cet hiver-là s'appelle Jack Torrance : c'est un alcoolique, un écrivain raté, qui tente d'échapper au désespoir. Avec lui vivent sa femme, Wendy, et leur enfant, Danny. Danny qui possède le don de voir, de ressusciter les choses et les êtres que l'on croit disparus. Ce qu'il sent, lui, dans les cent dix chambres vides de l'Overlook Palace, c'est la présence du démon. 

Cauchemar ou réalité, le corps de cette femme assassinée ? ces bruits de fête qui dérivent dans les couloirs ? cette vie si étrange qui anime l'hôtel ?




Avec une histoire de huis clos dans lequel une famille se retrouve coupée du monde, en plein hiver, dans un hôtel hanté, Shining s’imposait comme une évidence pour le Cold Winter Challenge. Cela faisait déjà quelques mois que je voulais incorporer ce roman dans le challenge, et l’opportunité s’est présentée avec la catégorie « Un chalet sous la neige (Huis clos/Solitude/Enfermement) ».


Faut-il encore résumer « Shining », l’une des œuvres majeures de Stephen King, dont l’adaptation de Kubrick avec Jack Nicholson dans le rôle de Jack Torrance est devenue culte ? Et pourtant… au risque de me faire des ennemis, je n’ai pas du tout aimé le film, le trouvant lent et peu palpitant, bien que je lui reconnaisse quelques qualités. Pourtant, même si ce n’était pas parti pour l’être, j’ai beaucoup apprécié le roman du maître King. Shining, c’est plus qu’une histoire d’horreur. C’est l’histoire d’une longue descente aux enfers, c’est l’histoire d’une famille, les Torrance.


Les Torrance est une famille qui navigue en eaux troubles. Pour un geste incontrôlé de violence sur un élève, Jack s’est fait renvoyer de son poste d’enseignant à l’université et peine à se défaire de ses vieux démons, son alcoolisme. Son couple avec Wendy bat de l’aile, elle qui l’a si souvent menacé de le quitter. Néanmoins, ils se laissent une seconde chance, au grand bonheur de leur fils Danny, cinq ans, qui redoutait de voir ses parents divorcer.


Grâce à un ami qui lui trouve un emploi, Jack espère se remettre sur pied en travaillant comme gardien à l’Overlook, grand hôtel de luxe perdu dans les Montagnes Rocheuses du Colorado, fermé au grand public et vidé de ses employés pendant toute la période hivernale. Afin de ne pas laisser Jack seul à s’occuper de l’hôtel pendant tout l’hiver, Wendy et Danny décident de l’accompagner pour vivre avec lui à l’Overlook. Pour Jack, cet isolement et cette tranquillité devraient lui permettre de se consacrer pleinement à l’écriture de sa pièce (un thème récurrent chez King que d’avoir un auteur parmi ses personnages), tandis que Wendy espère que cela les aidera à resserrer les liens de leur couple.


Avant son départ, ils font la connaissance de Dick Halloran, cuisinier de l’Overlook, qui remarque très vite la particularité du petit garçon. Car Danny a un don, appelé le Shining, un pouvoir psychique qui lui permet de découvrir certains objets cachés ou avoir des visions du passé ou du futur. Dick, qui possède également le Shining mais à un degré moindre, fait promettre à Danny de faire appel à lui télépathiquement si quelque chose venait à arriver, car il y a dans l’Overlook quelque chose de mauvais…

Le fameux "Redrum" ou TROMAL dans la VF, mot
qui revient souvent dans le roman.


Une histoire classique d’un lieu hanté ? Pas que.


Cela fait quelques années que j’ai commencé ma découverte de Stephen King. Si j’ai longtemps hésité à découvrir Shining, c’est pour ma réticence à lire des personnages souffrant de problèmes de violence et d’alcoolisme. Pourtant… pourtant, Jack Torrance est bien plus que ça. C’est un personnage très complexe, intéressant et tridimensionnel. Finalement, le point fort du roman n’est pas tant l’hôtel maléfique et les esprits malveillants qu’il contient, mais l’épaisseur psychologique de ses personnages principaux.


Il y a Wendy, qui possède une force incroyable et insoupçonnable, un ange de patience et une mère dévouée et prête à tout pour son fils. Dick Halloran m’a bien plu également, on devine déjà une complicité avec Danny de par le don qu’ils partagent, et qui est prêt à tout sacrifier pour une famille qu’il connaît à peine. Danny, bien-sûr, un petit garçon très avancé pour son âge, son don en étant la principale raison. Il a cette particularité d’être mature et très observateur mais de rester un enfant, malgré tout et qui est très attaché à ses parents et notamment à son père. Ils ont un lien profond et assez unique, presque fusionnel que j’ai beaucoup aimé.


Il y a également l’hôtel Overlook. Personnage ? Assurément. C’est un lieu bien trop vivant pour n’être qu’un simple bâtiment, et pas seulement à cause des esprits qu’il renferme. C’est un lieu où se sont déroulés tant de drames sanglants qu’il a fini par acquérir une conscience malfaisante, qui est attiré par le pouvoir psychique de Danny et qui va essayer de s’approprier le garçon en passant par son père. C’est un lieu qui est capable d’influencer et contrôler ses victimes en alternant entre la séduction, la pression et la terreur pour finir par prendre possession de sa victime et faire d’elle ce qu’il veut, comme un pantin dans les mains d’un marionnettiste, et à jouer avec les peurs de ses victimes qui, au départ, ignorent s’il s’agit d’une hallucination ou quelque chose de bien réel.



The Stanley Hotel (Colorado, USA), qui a inspiré Stephen King pour l'Overlook. Il y a également séjourné avec sa femme et passé une nuit d'angoisse et de cauchemar dans la fameuse chambre 217...



Et, last but not leastJack Torrance, écrivain, qui a plongé dans l’enfer de l’alcool et qui redouble d’efforts pour devenir enfin un bon époux et un bon père. Je me suis attachée à lui, malgré ses défauts, ce pauvre bougre hanté par ses vieux démons, son alcoolisme et son passé trouble. Ce n’est clairement pas un personnage que l’on aurait envie d’aimer, de prime abord. Pourtant, lorsque King nous parle de lui, en nous faisant découvrir le récit ce que fut sa vie, sa jeunesse, en nous parlant de ses ambitions perdues, de son père violent, de l'amour profond qu'il ressent pour son fils, Danny [spoiler] que même l’Overlook ne parviendra à estomper [/spoiler], on ne peut pas s’empêcher de ressentir de la pitié et de l’empathie pour lui. On ressent vraiment de la pitié pour ce personnage dont on voit la progression de son histoire tragique… et il n’est pas coupable de tout, en fin de compte, car on est témoin de ses changements à cause de l’Overlook qui infiltre l’esprit de Jack avec lenteur, prenant possession de lui petit à petit… Et contrairement au film où Jack Nicholson cède très vite à la psychopathie, l'hôtel réveillant cela en lui, dans le roman on assiste à une déchéance plus progressive du personnage qui finit véritablement possédé par l'hôtel.


Mais il n’y a pas que les fantômes ou l’hôtel maléfique, car l’autre source de peur est le huis-clos qui piège la famille Torrance, où Stephen King nous démontre que plusieurs personnes coupées du monde et enfermées ensembles peuvent très bien finir par s’énerver entre elles et en venir au drame. Loin de la civilisation, cachés par la neige qui bloque jusqu’aux fenêtres et livrés à eux-mêmes, les membres de la famille Torrance ne sont pas enviés par le lecteur.


Sans faire partie de mes livres préférés du maître King (rien ne détrônera Salem ou Ça pour le moment), j’ai beaucoup apprécié ma lecture et j’ai lu les trois dernières parties sans pouvoir m’arrêter. Pourtant… je ne dirais pas que c’était mal parti, mais j’ai ressenti des longueurs au cours de ma lecture. Les scènes de terreur comme [spoiler] le nid de guêpes mortes qui se réveillent, les animaux en buis qui prennent vie, le tuyau qui semble s’animer [/spoiler] ne m’ont pas effrayé ou impressionné (peut-être l’aurais-je été si j’avais lu ce roman plus jeune ?), et j’ai trouvé que les choses devenaient plus intéressantes et malaisantes à partir du chapitre sur la chambre 217 que Danny découvre et ce qu’il y trouve, les scènes où la salle de réception prend vie chaque soir avec ses fantômes, ainsi que l’ascenseur, où l’on voit véritablement l’hôtel jouer avec ses habitants, essayant de les conduire jusqu’à la folie. C’est un roman qui vaut largement la lecture. Stephen King n’a pas son pareil pour raconter avec talent ce genre d’histoire et à nous offrir des personnages riches et complexes et à installer une ambiance oppressante, voire effrayante. Je me tâte maintenant pour lire sa suite, Doctor Sleep !


Danny Lloyd, Jack Nicholson et Shelley Duvall dans les rôles de
Danny, Jack et Wendy Torrance dans Shining de Kubrick (1980)


Pendant un instant il fut saisit de panique et son cerveau cessa de fonctionner. Tout ce qu'il voyait c'était qu'il était enfermé dans ce tunnel glacé, sans lumière...

Je ne suis pas seul ici.

Sa respiration se transforma en râle. La peur distilla son venin dans ses veines et le paralysa. Non, il n'était pas seul, il sentait une présence malveillante qui avait attendu cette occasion pour se manifester. Peut-être une araignée géante, terrée sous un amas de feuilles mortes, ou un rat..., ou peut-être le cadavre d'un enfant, mort ici, au terrain de jeux. Était-ce possible ? Oui, un enfant avait pu trouver la mort ici. Il songea à la femme dans la baignoire, au sang mêlé de fragments de cervelle sur le mur de la suite présidentielle, puis à un enfant qui s'était ouvert le crâne en tombant du jungle gym et qui à présent rampait derrière lui, le poursuivant dans le noir, cherchant, le sourire aux lèvres, un compagnon de jeux pour l'éternité.

34. Les buis. (Quatrième partie : Prisonniers de la neige)

lundi 26 octobre 2020

Salem - Stephen King.


Le Maine, 1970. Ben Mears revient à Salem et s'installe à Marsten House, inhabitée depuis
 la mort tragique de ses propriétaires, vingt-cinq ans auparavant. 

Mais, très vite, il doit se rendre à l'évidence : il se passe des choses étranges dans cette petite bourgade. Un chien est immolé, un enfant disparaît, et l'horreur s'infiltre, se répand, aussi inéluctable que la nuit qui descend sur Salem.






En lisant le titre, on peut s'attendre à une histoire de sorcières. Il n’en est rien. Salem, ou Jerusalem’s Lot en VO, est inspiré du célèbre roman de Bram Stoker, Dracula, que Stephen King affectionne. Alors qu’il s’était penché sur le mythe du loup-garou avec L’année du loup-garou, Stephen King revisite ici le mythe du vampire.



Ben Mears est écrivain. Il décide de retourner dans sa ville natale, Salem dans le Maine (ville fictive) après la mort de sa femme, dans le but d’écrire un livre sur la ville et plus particulièrement Marsten House, une maison inhabitée qui est connue pour avoir été le théâtre de la mort violente de ses anciens propriétaires. Alors que Ben projette d’acheter la maison, il découvre avec stupeur qu’elle a déjà été vendue à un dénommé Straker et son collaborateur Barlow, et qu’ils ont ouvert un magasin d’antiquités en ville. Ben se résout à écrire son livre malgré tout et il s’installe en ville où il fait la connaissance Susan Norton, avec qui il noue une relation amoureuse, ainsi que Matt Burke, professeur, avec qui il va se lier d’amitié. C’est alors que des enfants disparaissent, des corps sont retrouvés et des habitants tombent malades…



Je suis ressortie complètement conquise par ce roman ! Salem est un roman qui a su me tenir en haleine du début à la fin, malgré ses longueurs. Je n’avais pas été aussi happée par une histoire de vampires depuis Dracula et Entretien avec un vampire.



Si Salem ne réinvente pas le mythe du vampire, il se présente toutefois comme un excellent roman pour ceux et celles qui aiment les vampires « classiques », ceux qui craignent le soleil et les symboles religieux, ceux qui se présentent comme des êtres charismatiques mais sanguinaires, qui séduisent autant qu’ils répandent la terreur. Leurs victimes transformées n’ont plus rien de la personne qu’elles étaient, mais sont devenues des créatures qui n’ont pour but que de se nourrir et d’obéir à leur maître. Si Barlow n’apparaît pas tout de suite, au profit de son serviteur Straker (clin d’œil au nom de Stoker, l’auteur de Dracula ?), j’ai beaucoup aimé Kurt Barlow qui, à l’inverse du film de 1979 qui le représente à l’image de Nosferatu, est un vampire européen qui ne manque pas de charisme et qui se présente comme un adversaire redoutable, sans oublier Straker qui sait être un antagoniste intéressant, sans rester dans l’ombre de son maître.

La terreur est menée avec talent, avec des scènes qui peuvent rendre mal à l’aise le lecteur [spoiler] notamment celle où, après avoir enterré un jeune garçon, l’employé se demande si les yeux du défunt sont bien fermés et qui déterre le cadavre pour en avoir le cœur net, ou encore la scène où le jeune Mark est réveillé en pleine nuit par un de ses amis, transformé en vampire, gratte à sa fenêtre et cherche à le convaincre de le faire entrer [/spoiler]. Je ne suis pas phobique des rats mais l’auteur aura presque réussi à me les faire craindre, sans compter des scènes horribles (il n’y a que dans des romans d’horreur que cet adjectif est un compliment) qui me hantent encore.



Stephen King distille le suspense à merveille, avec des phrases bien tournées qui installent une atmosphère lourde, pesante avec la tension qui monte peu à peu. Il a merveilleusement travaillé son roman (écrit à 25 ans, je suis jalouse), avec l’horreur qui se met lentement mais sûrement en place, comme un mal qui gangrène progressivement la ville de Salem. Cela commence avec une disparition, puis deux, puis plusieurs, les habitants qui sont atteints d’une étrange maladie avant de mourir ou de disparaître, et c’est une maladie bien contagieuse et dangereuse que le vampirisme !



Stephen King ne se contente pas d’écrire une histoire de vampire. Il nous présente une ville et ses habitants d’une façon telle qu’on a l’impression d’en faire partie. Il prime sur la réalité et nous décrit des situations courantes, des pensées et détails anodins, le quotidien des personnages. C’est la bourgade classique où les habitants se connaissent et ont leurs petits secrets ou soucis. L’ensemble nous paraît anodin, mais ce n’est jamais sans but. Si des personnages, même secondaires ou tertiaires, apparaissent régulièrement dans le roman, c’est pour un but précis : ils vont jouer un rôle dans l’intrigue… ou du moins, ils vont passer un sale quart d’heure ! L’auteur prend le temps de nous présenter chaque personnage et de tisser des relations entre eux.



Les personnages récurrents m’ont tous été sympathiques pour la plupart, avec une préférence pour Ben Mears, l’écrivain hanté par Marsten House, le médecin Jimmy Cody, le jeune Mark Petrie (qui n’a pas peur des grosses brutes, est très capable et qui serait même capable de manger Pennywise au petit-déjeuner) ainsi que le père Callahan, prêtre à la foi vascillante. Ils sont tous profondément humains, avec leurs forces comme leurs faiblesses. Ils sont courageux et pourtant ils doutent, ils ont peur, ils pleurent parfois. Ils traquent Barlow parce qu’ils n’ont pas le choix et le vampire sait se montrer rusé et instaurer une pointe de doute.



Marsten House, telle que représentée dans l'édition Special Deluxe du 
roman (2016) que je ne cesse de pleurer car il s'agit d'une édition limitée
et donc impossible à trouver.

Ce sont des personnages touchants et réalistes que les épreuves vont rapprocher. J’aurais toutefois aimé que [spoiler] le père Callahan ait continué la lutte, même après avoir été souillé par Barlow, c’est dommage parce que le personnage a du potentiel et sa confrontation avec Barlow est ma scène préférée de tout le roman [/spoiler]. J’ai particulièrement aimé les scènes avec Mark, qui m’a plu dès sa première scène où il a remis une brute à sa place, et j’ai aimé son rapprochement avec BenStephen King nous fait nous attacher à eux, mais aussi craindre pour eux. Certains vont mourir, et même atrocement. Ceux qui survivent gardent des séquelles. C’est plus qu’un roman où des personnages traquent un vampire, c’est un roman où ils essayent de survivre alors que Salem sombre peu à peu et tombe dans les griffes de Barlow.



Le roman peut faire peur car il s’agit d’un pavé de 800 pages. Pourtant, une fois plongée dans ce roman, je n’ai pas vu le temps passer tant j’étais happée par ce livre. Si les références à Dracula sont nombreuses, il ne s’agit pas d’un plagiat du roman car Stephen King nous offre une histoire à part. Si elle ne m’a pas fait peur, je ne peux nier que plusieurs scènes sont prenantes, avec une atmosphère pesante, avec un aspect de course contre la montre, vers la fin, avec une fin qui n’est ni heureuse ni noire, mais plutôt mélancolique.



Mon édition comporte également une nouvelle sur la ville de Salem dans les années 1700, où l’on découvre que, même avant l’arrivée de Straker et Barlow, le mal était déjà ancré dans Marsten House ; ainsi que de nombreuses scènes coupées qui, pour certaines, nous présentent une fin alternative pour certains personnages, ce que j’ai beaucoup apprécié et qui m’a donné l’occasion de prolonger le plaisir de la lecture.



Arrivée à la fin du roman, je ne peux que remercier le maître King pour ces merveilleuses heures de lecture, en compagnie de monstres menaçants, de héros ordinaires mais attachants et une histoire qui tient en haleine. Voici un roman que je ne suis pas prête d’oublier et qui continuera à me hanter.


L'adaptation de 1979, classique pour les fans de King, a choisi de représenter
Kurt Barlow à l'image de Nosferatu. En revanche, dans le roman, il 
finit par prendre une apparence similaire à celle de la première image.


- Y a pas de fantômes dans cette vieille maison ? demanda-t-il, voyant que le type ne se décidait toujours pas à bouger.
- Des fantômes !
L'inconnu sourit et il y avait quelque chose d'inquiétant dans ce sourire. Si un requin pouvait sourire, ça ressemblerait à ça.
- Non, non... pas des fantômes.
Il insista sur le dernier mot, comme pour signifier qu'il y avait quelque chose d'encore pire.

jeudi 15 octobre 2020

Le Molosse surgi du soleil - Stephen King.


 « Il est à moi, avait-il pensé en posant son doigt sur le déclencheur pour la première fois. Maintenant, il se demandait si ce n'était pas l'inverse. J'ai peur de lui. J'ai peur de ce qu'il fait. »

Castle Rock, le 15 septembre. Kevin Delevan fête son anniversaire. Pour ses quinze ans, il reçoit un appareil photo, un Soleil 660. Ravi, il l'essaie sans attendre... et sans savoir que parfois, quand on tente de capturer l'instant, c'est lui qui vous saute à la gorge.




Je n’avais pas prévu de lire Stephen King aussi tôt, mais l’appel d’un livre est parfois difficile à résister !

Kevin Delevan reçoit, le jour de ses quinze ans, un appareil photo Polaroïd, un Soleil 660. Ravi, il l’essaie sans attendre en prenant une photo de sa famille. Sauf que ce n’est pas une photographie de sa famille qui en sort mais celle d’un chien noir près d’une barrière blanche. Sans comprendre, Kevin réessaye. À sa stupéfaction, l’appareil ne prend pas les photographies qu’il veut et ne renvoie que des photos du même molosse. Kevin décide alors d’aller faire examiner l’appareil chez Pop Merill, un brocanteur vieux et rusé. Après étude des photographies, Kevin s’aperçoit que le chien se rapproche de plus en plus du photographe. Pop Merill, lui, voit une occasion de gagner beaucoup d’argent en revendant l’appareil à de riches passionnés de paranormal, sans se douter que les étranges pouvoirs de l’appareil pourraient bien le dépasser…

La force du roman, et la raison qui m’a poussé à le lire, est son concept qui promet quelque chose d’original et de frissonnant, entre l’horreur et le fantastique : un appareil qui ne prend pas en photo ce que le photographe désire mais les mêmes photos, celles d’un énorme chien effrayant. D’abord, on pense qu’il s’agit des mêmes photos et que c’est un chien banal, sauf que plus l’appareil prend de photos, plus on s’aperçoit que le chien et les paysages bougent, et que le chien se retourne vers le photographe et s’avance vers lui, devenant de plus en plus effrayant et menaçant au fur et à mesure qu’il s’approche de l’objectif, laissant deviner que ce chien peut très bien sortir de l’appareil et s’en prendre au photographe. L’auteur a très bien su retranscrire la menace pesante sur les personnages, la transformation du chien en une chose monstrueuse et dangereuse, l’angoisse grandissante au fur et à mesure qu’il s’approche.

Tout semble à croire que le chien fait partie d’un autre monde dont il essaye de s’échapper, un monde dans lequel le photographe d’origine a pris les photos. On ne sait au final pas grand-chose de l’appareil. Il s’agit sans aucun doute d’un objet possédé, surnaturel puisque son détenteur ne peut s’empêcher de s’en servir compulsivement et peut le mener jusqu’à la folie. On ignore quel est le photographe à l’origine de ces photographies ni d’où sort le chien, si ce n’est peut-être des enfers, ni d’où viennent les personnages dans le monde Polaroïde qui semblent maudits car enfermés dans ce monde en deux dimensions.

Quant aux personnages, nous suivons principalement Kevin et le brocanteur, Pop Merill, un être dont la cupidité sera punie mais d’une façon bien atroce. Kevin est un personnage efficace, sans plus, mais assez malin pour se douter le premier de l’aspect surnaturel de l’appareil et à avoir rapidement deviné le danger. J’ai aimé sa complicité avec son père qui décide, malgré ses jugements, de suivre son fils et de lui faire confiance dans cette étrange affaire et qui a un passé sombre avec Merill.

L’histoire présente toutefois quelques longueurs, nous présentant des passages dont, je trouve, on se serait bien passé et qui n’apportaient pas grand-chose à l’histoire, et qui ralentissaient le rythme. Je pense qu’il a pu s’agir d’une façon pour l’auteur de ne pas arriver tout de suite à la résolution de l’histoire et de faire jouer le suspense, sauf que j’ai plutôt ressenti ça comme des longueurs. Toutefois, il est impossible de relâcher le livre lorsque la dernière photographie est prise et que l’appareil se détruit alors que le molosse en sort, ainsi que la façon de Kevin de piéger le chien et surtout l’épilogue qui se termine sur un cliffhanger frissonnant ! 

Pour résumer : Ce n'est pas le meilleur Stephen King et il souffre de longueurs mais le concept est intéressant et l'écriture de l'auteur reste plaisante à lire, donc je pense vraiment qu'il vaut le coup d'oeil, et qui est garanti sans traumatisme, juste peut-être quelques frissons !


Le chien - d'ailleurs ce n'était pas un chien, ce n'en était plus un, mais il fallait bien le désigner d'une manière ou d'une autre, même molosse devenait insuffisant - n'avait pas encore commencé à bondir sur le photographe, mais il s'y préparait [...] La tête de chien était complètement méconnaissable. Tordue, déformée, on aurait dit un monstre de foire qui n'aurait eu qu'un seul œil, noir et méchant, ni rond ni ovale, mais plus ou moins coulant, comme un jaune d'œuf dans lequel on aurait piqué la fourchette. Son museau était devenu un bec noir dans lequel deux profondes narines étaient percées, de chaque côté. De la fumée montait de ces trous - comme les fumerolles sur les flancs d'un volcan ? Peut-être - à moins que ce ne fût son imagination.

9.

dimanche 20 septembre 2020

L'année du loup-garou - Stephen King.


Quand arrive la pleine lune, une peur sans nom s'empare des habitants de Tarker Mills, petite bourgade tranquille nichée au creux des profondes forêts du Maine. Tous entendent, derrière la plainte du vent, des grondements de fauve auxquels se mêlent encore les échos d'une voix humaine. Le monstre est là. Qui tuera-t-il ? L'horreur commença en janvier sous la lueur glacée de la pleine lune. Un premier hurlement insoutenable déchira la nuit. C'était le début de "L'année du loup-garou".



Après ma lecture de Ça, je m'étais dit que ce ne serait pas ma dernière lecture de Stephen King. Si je suis assez courageuse, j'attaquerai le pavé que représente Salem, qui trône dans ma bibliothèque depuis des années. En attendant, voici un roman assez court et illustré dans lequel Stephen King se penche sur le mythe du loup-garou...

La structure du roman est assez simple, chaque chapitre correspond à un mois de l'année, de janvier à décembre où le loup-garou s'en prend aux habitants de la ville de Tarkers Mills. Il y a d'abord un cheminot, puis une jeune fille fleur bleue, et d'autres s'ajoutent au tableau. Chaque cycle de pleine lune signe l'arrêt de mort pour une malheureuse victime, jusqu'au soir du 04 juillet, où le jeune Marty voit la bête de près... et survit à cette rencontre.

Comme évoqué précédemment, L'année du loup-garou est un roman court. Le livre est plutôt fin, et les "chapitres" ne sont pas très longs, entre 3 et 5 pages pour les premiers chapitres, comme des sortes de mini-histoires où Stephen King nous présente vaguement la victime avant de décrire l'arrivée du loup-garou puis l'attaque. Rapide, simple mais efficace ! Les chapitres s'allongent au fur et à mesure que nous avançons dans l'année et dans l'histoire. Que les chapitres soient courts ou longs, Stephen King parvient à faire planer la menace en quelques lignes... l'évocation de la lumière presque aveuglante de la lune, l'ombre du loup-garou qui n'est jamais loin, son hurlement triomphant, puis la population dont la peur grandit au fil des mois. Ce qui ne ressemblaient qu'à des attaques isolées devient une véritable menace. La terreur plane au sein de cette petite ville du Maine, on croit à un tueur en série, on prend à la plaisanterie l'hypothèse du loup-garou, jusqu'à ce que le courage de la victime s'envole lorsqu'elle est confrontée au loup. Après des mois de terreur, les habitants réalisent qu'il est temps pour eux d'agir et d'organiser des battues. Bientôt, il n'y a plus aucun doute : la Bête est parmi eux... mais qui est-elle ?

Bernie Wrightson - L'année du Loup-garou | Garou, Loup garou, Dessin bd
On peut être loup-garou et avoir envie
d'aller à l'église !
L'histoire en elle-même est donc assez assez classique : un loup-garou sévit dans une petite ville (du Maine bien évidemment, si l'on connaît bien le Maître King) et les habitants n'y croient pas, jusqu'au jour où... même si le scénario n'a rien d'original, Stephen King parvient tout de même à captiver ses lecteurs.trices. Néanmoins, le plus intéressant dans l'ouvrage n'est pas seulement la menace de la Bête, mais le tableau de la ville de Tarkers Mills dans lequel l'auteur nous plonge dans la vie quotidienne des habitants de cette petite ville et nous montre leurs petites habitudes, leurs vices aussi, avec talent et simplicité.

C'est un récit qui se lit assez rapidement dans lequel Stephen King a su mettre en place une ambiance sombre, plombante et froide. Rien de bien traumatisant et à nous donner des cauchemars la nuit, mais pas non plus un récit à mettre dans les mains d'un jeune public, car l'histoire est délicieusement frissonnante. On ressent toute la menace de la lune, sa lumière brillante mais inquiétante, on devine le loup qui rôde et le danger qui plane, sans oublier les illustrations effrayantes et parfois sanglantes, qui donnent une autre dimension au récit. J'aurais toutefois apprécié que ces illustrations se soient situées après l'attaque du loup, certaines étaient au début du récit et spoilaient l'événement à venir. Aussi efficace ce récit soit-il, je n'aurais pas été contre un récit plus étoffé et approfondit pour rester plus longtemps dans cette traque au loup et la peur croissante des habitants, afin de mieux frissonner !

La fin peut paraître précipitée, ou plutôt manquant de suspense car on peut deviner assez facilement comment l'intrigue va se terminer mais l'auteur a fait le choix de nous dévoiler l'identité de la Bête avant la fin, pour mieux découvrir la psychologie du personnage et comment ce personnage a pu devenir le loup. C'était plutôt intéressant à découvrir [spoiler] le fait qu'il ignore d'abord être la Bête et se réveille avec du sang séché et ses vêtements déchirés, avant de s'en rendre compte, mais de se dire que c'est la volonté de Dieu. Son dernier meurtre où il s'en est pris à un homme coupable d'adultère l'illustre bien, comment ce personnage décide de punir à sa façon ceux qui ont péchés [/spoiler] ainsi que les manigances de notre héro pour découvrir qui est le loup-garou et comment se défendre. J'ai d'ailleurs beaucoup apprécié le héro, Marty, et l'initiative de l'auteur de mettre en scène un personnage handicapé en duel contre le loup-garou, et celui qui en viendra à bout, la preuve qu'on peut être en fauteuil roulant et botter les fesses d'un monstre ! C'est un jeune garçon courageux et capable, et j'ai aimé sa complicité avec son oncle Al.

Il ne s'agit certainement pas du meilleur King (on ignore le fait que je n'ai lu que deux ouvrages de l'auteur, ahem) mais l'auteur s'en est tout de même bien sorti et j'ai pris plaisir à découvrir sa revisite du mythe du loup-garou. Si le résultat n'a rien d'exceptionnel ou d'inoubliable, ce récit reste tout de même assez plaisant, et l'on découvre avec plaisir les illustrations qui accompagnent le texte, et je pense que L'année du loup-garou pourrait très bien convenir pour une première lecture du maître incontesté de l'horreur, surtout si on a des appréhensions !


Une chose inhumaine s'est abattue sur Tarkers Mills, invisible comme la pleine lune qui vogue tout en haut du ciel ténébreux. Elle a nom loup-garou, et sa survenue présente n'a pas plus de raison d'$etre que n'en aurait celle d'une épidémie de cancers, d'un assassin psychotique ou d'une tornade meurtrière. Son temps est venu, simplement, et le sort lui a fait choisir pour théâtre cette banale bourgade du Maine où l'événement de la semaine est le repas collectif dont les places vendues à l'encan servent à financer les œuvres de la paroisse [...] Dehors, la neige recouvre peu à peu les traces de la créature. Le vent crie d'une voix déchirante qui évoque des hurlements de plaisir. Mais d'un plaisir sans âme, sans Dieu, sans soleil - jouissance de gel opaque et d'hiver ténébreux. 
Le cycle du loup-garou a débuté.

mercredi 18 octobre 2017

Ça, tomes 1 et 2 - Stephen King.



Enfants, dans leur petite ville de Derry, Ben, Eddie, Richie et la petite bande du « Club des ratés », comme ils se désignaient, ont été confrontés à l’horreur absolue : ça, cette chose épouvantable, tapie dans les égouts et capable de déchiqueter vif un garçonnet de six ans… 
Vingt-sept ans plus tard, l’appel de l’un d’entre eux les réunit sur les lieux de leur enfance. Car l’horreur, de nouveau, se déchaîne, comme si elle devait de façon cyclique et régulière frapper la petite cité.


« Ils flottent, Georgie. ». Sans avoir vraiment lu le célèbre roman de Stephen King, je pense que cette phrase est devenue suffisamment culte avec les années pour l'associer au terrible clown décrit par le maître de l'horreur des années auparavant. Ça n'est pourtant pas le roman que j'aurais pensé lire un jour, pour la simple et bonne raison que l'horreur n'est pas une thématique qui m'attire dans la littérature. Cependant vous connaissez la chanson : il ne faut jamais dire jamais, ou encore : il y a une première fois à tout. Et, je l'avoue, j'ai été tentée de découvrir ce roman après avoir visionné le téléfilm de 1990 par curiosité. Alors, ça passe ou ça casse ? Nous allons voir ça tout de suite !

Mais d'abord, de quoi ça parle ?

D'un clown tueur qui terrorise des enfants.

Oui, mais pas que ! Notre aventure débute en 1957 à Derry, ville américaine tout à fait normale, exceptée le monstre qu'elle abrite. Car en effet, depuis des siècles, Derry est hantée par une étrange créature inconnue qui se terre dans les égouts. Un jour, un petit garçon nommé Georgie s'amuse sous la pluie avant de rencontrer la créature qui se présente à lui sous le nom de Grippe-Sou le clown. Une funeste rencontre puisque le clown en question s'attaque au pauvre Georgie qui y laissera la vie. Les mois passent suivant cette tragédie, les enfants de Derry disparaissent petit à petit. Les rescapés raconteront avoir fait une étrange rencontre avec une créature ayant revêtu la forme de leur plus grande peur. Parmi ces survivants, un groupe de sept amis auquel fait partie Bill Denbrough, le grand frère de Georgie. Afin de découvrir l'identité de la créature terrorisant les enfants de Derry et pour l'empêcher de nuire, les sept enfants décident d'affronter leurs peurs et leurs traumatismes d'enfance pour vaincre la créature qu'ils ont baptisé Ça


Stephen King, maître incontesté
de la fiction d'horreur.
Ça fut une lecture très satisfaisante et intéressante, avec un univers et une intrigue très riches. Donc, on peut dire que ça a passé chez moi, mais que ça m'a un peu fatigué. Car oui, Ça est un roman très long. On n'approche certes pas des romans de G.R.R. Martin, mais c'est un roman relativement long et donc, pas toujours évident à lire. Il faut de la patience et surtout beaucoup d'intérêt pour l'intrigue. Stephen King décrit avec beaucoup d'attention et de détails son univers, en passant par l'histoire de la ville des siècles même avant sa création, à la vie de personnages secondaires voire tertiaires, ajoutons à ça une alternance au niveau des chapitres puisque nous plongeons non pas dans une, mais dans deux époques différentes.

Car oui, l'intrigue du roman est divisée en deux périodes différentes et se poursuit de façon non linéaire entre ces deux époques. Ainsi, nous découvrons peu à peu les événements qui ont pris place pendant ces deux périodes presque en même temps, à l'inverse du téléfilm de 1990 et du premier volet de la nouvelle adaptation, sortie cette année, qui ont d'abord choisi de raconter l'enfance de nos héros et les premières rencontres avec Ça, puis de passer aux années d'adulte avec la confrontation finale avec le clown. En fait, si nous alternons entre ces deux périodes, c'est que nos personnages adultes essayent de reconstruire ce passé, épisode par épisode. Car oui, avant de vaincre une bonne fois pour toute le monstre, il est nécessaire de se remémorer le passé et de comprendre ce qu'il s'est passé la dernière fois qui a permis de mettre en déroute le clown.

Au centre de l'histoire, sept enfants, tous bizutés à l'école et connaissant presque tous une situation familiale difficile. Nous avons Eddie, un asthmatique ayant une mère ultra-protectrice ; Richie, le comique de service virant un peu sur l'impertinent ; Beverly, la seule fille du groupe ; Mike, un Afro-Américain victime du racisme local ; Ben, rondouillard féru de l'histoire de Derry, Stan, Juif passionné par les oiseaux, et enfin Bill, souffrant d'être bègue et de parents indifférents depuis la mort de Georgie. C'est lui qui dirige le groupe qui s'est auto-nommé le Club des Ratés car les autres enfants voient en lui un leader, et là où chaque garçon du groupe en pince un peu pour Beverly, tous vouent une admiration sans borne pour Bill. Ces sept personnages forment l'une des amitiés les plus touchantes et les plus soudées que j'aie eu l'occasion de lire jusqu'à présent. Une amitié d'une force incroyable. Lorsqu'ils sont ensemble, on sait qu'ils sont à leur juste place, et le roman nous le montre bien. Chacun est mis en valeur, et chacun a une force égale à leur traumatisme, et c'est un pur bonheur de lire sur eux.


Le Club des Ratés, par Rich Kelly.
Mais Ça, c'est aussi l'histoire d'un clown, et pas n'importe quel clown car là où n'importe quel clown normal se satisfait des rires d'un enfant, celui-là se satisfait et se nourrit de leurs peurs, car Ça est une créature très ancienne venant de très loin qui se cherche plus que tout à effrayer les enfants avant de les dévorer, la peur les rendant plus… appétissants. Ça est une créature qui se terre dans les égouts de la ville et qui hiberne pour se réveiller tous les 27 ans et commencer un cycle de terreur de plusieurs mois pour se nourrir avant d'hiberner à nouveau. Chaque réveil de Ça est accompagnée d'une catastrophe au sein de la ville : incendie, explosion, … car Ça est le cœur de Derry, l'un ne va pas sans l'autre. Elle influence Derry, si bien que [spoiler] lorsque Ça est définitivement détruit, la ville ne lui survit pas et s'écroule à son tour, obligeant les rescapés à fuir et vivre ailleurs. Les scènes où Derry se meurt sont d'ailleurs tout simplement incroyables, j'ai rarement lu des scènes aussi intenses ! [/spoiler]

À côté de nos héros et du clown psychopathe, nous avons quelques personnages secondaires et tertiaires : les parents des enfants, leur famille une fois adulte, d'autres enfants détestables et dérangés qui n'ont presque rien à envier au clown en terme de cruauté. Les habitants de Derry, enfants comme adultes, sont influencés parfois indirectement par Ça, donc du coup on a une bande de tordus, racistes, homophobes. Aussi, des adultes soit indifférents, soit qui n'ont aucune emprise sur les événements et laissent leurs enfants se faire tuer ou entre-tuer sans pouvoir faire quoique ce soit, comme s'ils n'étaient pas conscients de ce qui se déroule, comme si le clown les rendaient aveugles de ce qu'il se passe réellement.

Mais finalement, est-ce que ça fait peur ?

La réponse est oui, ça fait peur, l'ambiance est pesante et menaçante, nous sommes sur le qui vive car on s'attend à rencontrer le clown (ou les petites brutes de l'école) à tout moment et cette ambiance, cette anticipation, résonne avec la peur des enfants. Donc oui, on peut dire que ça fait peur car l'auteur ne lésine pas avec les scènes horrifiques, mais on peut dire aussi que ça met surtout mal à l'aise. Si Ça a son lot de scènes terrifiantes (on en survit, rassurez-vous ! Moi qui suis une grande froussarde, je n'ai pas été traumatisée), nous avons aussi des scènes plutôt malsaines, donc attention aux âmes sensibles car le roman contient de nombreuses évocations de pédophilie, une scène où un enfant torture et tue un animal, une scène de sexe infantile… qui m'ont fait reposer le livre à plusieurs reprises et où il est aisé de comprendre pourquoi les différentes adaptations de Ça ont choisi de ne pas adapter ces scènes sur l'écran.

Néanmoins ces scènes malsaines ne sont pas parsemées partout dans le roman, et le roman n'en demeure pas moins palpitant et plaisant à lire (aussi plaisant un roman sur un clown tueur d'enfants peut-il être). Ce roman cherche avant tout à nous faire entrer dans  l'horreur et le malaise de la ville de Derry, et il y parvient ! On s'imprègne totalement de Derry, son atmosphère, son histoire, ses habitants. Mais, n'ayez crainte, ce roman ne contient pas que scènes d'horreur et scènes malsaines, même s'il s'agit d'un roman d'horreur, car ce roman c'est aussi une histoire sur l'enfance, le courage et sur l'amitié et Stephen King décrit merveilleusement bien ces thèmes. Ses héros, enfants comme adultes, sont le cœur du roman et ils le portent magnifiquement bien et ce n'est pas que la force de leur imagination et de leur conviction qui aide nos personnages à survivre, c'est aussi les liens profonds qui les unissent.

En somme, une première rencontre avec King plutôt satisfaisante. Je suis prête à retenter l'expérience un jour avec un nouveau roman du maître de l'horreur !


*a wild Pennywise appears*



Peut-être que ces histoires de bons ou mauvais amis, cela n'existe pas; peut-être n'y a-t-il que des amis, un point c'est tout, c'est-à-dire des gens qui sont à vos côtés quand ça va mal et qui vous aident à ne pas vous sentir trop seul. Peut-être vaut-il toujours d'avoir peur pour eux, d'espérer pour eux, de vivre pour eux. Peut-être aussi vaut-il la peine de mourir pour eux, s'il faut en venir là. Bons amis, mauvais amis, non. Rien que des personnes avec lesquelles on a envie de se trouver; des personnes qui bâtissent leur demeure dans votre cœur.