vendredi 22 mars 2024

Mexican Gothic - Silvia Moreno-Garcia.


Après avoir reçu un mystérieux appel à l’aide de sa cousine récemment mariée, Noemí Taboada se rend à High Place, un manoir isolé dans la campagne mexicaine. Elle ignore ce qu’elle va y trouver, ne connaissant ni la région ni le compagnon de sa cousine, un séduisant Anglais.

Avec ses robes chic et son rouge à lèvres, Noemí semble plus à sa place aux soirées mondaines de Mexico que dans une enquête de détective amateur. Elle n’a pourtant peur ni de l’époux de sa cousine, un homme à la fois troublant et hostile, ni du patriarche de la famille, fasciné par son invitée… ni du manoir lui-même, qui projette dans les rêves de Noemí des visions de meurtre et de sang.

Car High Place cache bien des secrets entre ses murs. Autrefois, la fortune colossale de la famille la préservait des regards indiscrets. Aujourd’hui, Noemí découvre peu à peu d’effrayantes histoires de violence et de folie.


Je pensais attendre le prochain Pumpkin Autumn Challenge pour me mettre ce roman sous la dent, mais des avis enthousiastes sur Tumblr m’ont poussé à découvrir ce titre plus tôt.



Il est vrai que ce roman serait parfait pour la période automnale / Halloween. Une ambiance purement gothique avec son manoir lugubre et sinistre, son cimetière brumeux, un huis-clos oppressant, une famille avec de sombres secrets et ses fantômes, une rumeur de malédiction… Autant dire que notre héroïne, avec sa joie de vivre et ses robes colorées, va être mise à rude épreuve !



Noemi est une jeune femme qui profite des joies de la vie et qui chérit sa liberté et son indépendance dans le Mexique des années 1950 et qui préfère les études et les soirées festives à la perspective du mariage. Elle n’aime rien de plus que les villes qui grouillent de monde, la musique, les jolies robes, faire des rencontres. Quand son père reçoit une lettre troublante et confuse de la part de la cousine Catalina, il envoie Noemi dans le manoir où elle réside avec la famille de son mari, les Doyle. À son arrivée, Noemi découvre un manoir lugubre et malaisant et des habitants tout aussi dérangeants. Virgil, le mari de Catalina, un homme froid, obscur et autoritaire. Florence, la maîtresse de maison, une femme stricte qui surveille Catalina comme un vautour et qui impose le respect des règles de maison. Howard, le patriarche, un vieil homme malade et obsédé par l’eugénisme et la pureté des races. Puis, il y a Francis, le cadet, un jeune homme doux et sensible qui diffère par sa gentillesse peu conforme à l’endroit et au reste de la famille Doyle.



Au manoir, rien n’est fait pour que Noemi se sente la bienvenue. Ses visites à Catalina sont surveillées ou chronométrée. Le manoir est une bâtisse délabrée où sévissent des mœurs austères d’un autre temps et qui ne dispose pas du confort moderne. Noemi ne peut se rendre en ville sans chaperon. La famille Doyle, à l’exception de Francis, n’est guère accueillant avec Noemi. Quant à Catalina, elle est bien mal en point, elle nous apparaît comme apathique lorsqu’elle n’entend pas des voix. Un mal que l’héroïne semble commencer à avoir… ses étranges cauchemars qui semblent réels dans lesquels la maison l’étouffe et des entités lui parlent…



‘Mexican Gothic’ de Mia Araujo.


Le gros problème du roman est son rythme. Pendant une bonne partie de l’histoire, il ne se passe pas grand-chose avant que tout ne s’accélère à la fin. Plus de la moitié du roman sert à planter le décor, à décrire les personnages. Quelques éléments titillent notre intérêt lorsque Catalina évoque les voix qu’elle entend, les cauchemars de Noemi pendant ses nuits au manoir, les rumeurs et histoires autour de la famille Doyle. Il est aussi question de champignons et de moisissures, qui contribuent à la fois à l’aspect lugubre du manoir mais qui auront leur importance dans l’intrigue.



Si l’on s’attend à de l’action, à des péripéties, il faudra prendre son mal en patience car le roman mise avant tout sur son ambiance purement gothique et mystérieuse. L’auteure prend le temps d’installer une atmosphère angoissante et malaisante et c’est efficace. Le manoir de High Place, décati, froid et humide, est décrit quasiment comme une entité à part entière, oppressante et dangereuse. Le roman m’a séduite par son ambiance purement gothique et horrifique, flirtant avec le fantastique. Si la première moitié m’a paru lente, l’arrivée des éléments surnaturels a amélioré ma lecture. C’est donc un roman horrifique, pas tant dans le sens où le but est de terrifier le lecteur, mais davantage dans l'ambiance, cette atmosphère malsaine et oppressante qui met mal à l'aise. Mais l'horreur passe aussi bien à travers certains thèmes abordés au cours du roman [spoiler] inceste, cannibalisme, fausse couche, suicide et autres joyeusetés [/spoiler], donc prudence aux âmes sensibles !


Le roman parvient à maintenir son suspense jusqu’au bout concernant la raison du mal-être de Catalina et les secrets et déviances de la famille Doyle. Il faut dire que ce sont de drôles de lascars ! Famille originaire d’Angleterre, venue chercher fortune au Mexique, qui a trouvé sa richesse en faisant exploiter des mines d’argent. Mines qui ont du fermer suite à une étrange épidémie, après une tentative de soulèvement de ses ouvriers. Ajoutons à cela que la famille Doyle a eu son lot de drames et qu’elle vit désormais recluse, figée dans les mœurs d’un autre temps. On est tenu en haleine pour connaître ce qui se cache derrière l’univers mystérieux du manoir et découvrir les secrets sombres de cette famille tordue.




Francis Doyle et Noemi Taboada (art de Basicbard sur Tumblr)



Le roman présente également une fantaisie originale. J’ai beaucoup aimé l’idée que [spoiler] les champignons, évoqués dans le roman, soient la cause de ce mal, qu’ils entrent en symbiose avec leurs hôtes – soit des membres de la famille Doyle qu’ils choisissent – et qui capte les pensées et souvenirs de ses hôtes et a le pouvoir d’influencer l’esprit des habitants de High Place, avec des cauchemars ou des hallucinations. Cela m’a rappelé l’arbre dans L’île aux mensonges, mais une version beaucoup plus maléfique [/spoiler].



Concernant les personnages, ils sont plutôt bien campés. Noemi est aventureuse et intelligente, bien décidée à ne jamais se laisser marcher sur les pieds, débrouillarde et cultivée qui a touché un peu à tout, notamment dans les sciences. Francis est le seul membre de la famille Doyle que l’on prend en sympathie et que l’on a envie de protéger contre sa propre famille. Francis m’a beaucoup touché et intrigué, et j’ai aimé l’évolution de sa relation avec Noemi. On se prend d’empathie pour Catalina qu’on espère voir se rétablir et libérée de l’influence néfaste du manoir. Quant aux autres membres de la famille, ils remplissent leur rôle.



Il m’a manqué un je-ne-sais-quoi pour que Mexican Gothic soit un coup de cœur, mais ça reste tout de même une bonne lecture ! Si le début m'a paru un brin trop lent, l’atmosphère pesante, due aux mystères qui entourent High Place, l’ambiance purement gothique, et les secrets de famille qui se dévoilent petit à petit, font peu à peu le job et l’histoire se fait finalement prenante !


Lorsque Noemí était encore petite fille et que Catalina lui lisait des contes de fées, cette dernière évoquait souvent « la forêt », l’endroit où Hansel et Gretel jetaient leurs morceaux de pain, ou le Petit Chaperon rouge croisait la route du loup. Enfant de la ville, Noemí avait compris sur le tard que les forets existaient réellement et pouvaient être placées sur une carte. Sa famille passait les vacances dans l’Etat de Veracruz, en bord de mer, sans l’ombre d’un grand arbre en vue. Même après toutes ces années, la forêt restait associée dans son esprit aux images des livres pour enfants, avec lignes au fusain et à-plats de couleur.

lundi 11 mars 2024

Jizo - Mr Tan et Mato.


Aki s'est perdu et ne retrouve plus le chemin pour rentrer chez lui. 

Dans les rues, tous se montrent indifférent à son sort, sauf Jizo, un étrange garçon qui semble surgi de nulle part. 

Aki peine à lui faire confiance malgré son grand sourire, d'autant qu'il sait qu'une effroyable sorcière s'en prend aux enfants à la tombée de la nuit.



Attention, histoire à ne lire qu’une fois seul.e !



Que dire sur Jizo sans spoiler ? Car il est difficile de parler de cette histoire sans trop en révéler, et pourtant ce manga vaut tellement la peine d’être lu ! Je ne m’attendais pas à ressentir de telles émotions en commençant ce manga, et il m’a bien fallu quelques mouchoirs pour sécher mes larmes, mais qu’est-ce que ça en valait la peine !



Nous nous retrouvons auprès d’Aki, un petit garçon perdu et paniqué, qui ne retrouve plus son chemin, et qui souhaite retrouver sa mère avant qu’elle ne s’inquiète trop. Seul sur un banc, il pleure et panique alors que le monde autour de lui semble indifférent à sa détresse. Un garçon des rues, Jizo, lui propose de lui tenir compagnie, puis de l’aider à retrouver le chemin de sa maison. Mais le soir tombé, les deux enfants doivent s’arrêter dans un temple pour y passer la nuit. En effet, une terrible sorcière rôde en ville, et attrape dans ses chaînes les enfants égarés pour pouvoir les dévorer…



Un joli manga qui nous permet de découvrir un pan de la mythologie bouddhique et notamment les protecteurs des enfants et des voyageurs. C’est une histoire semblable à un conte avec un enfant perdu, une sorcière dévoreuse d’enfant, un monde étrange avec des esprits. C’est sombre, poétique, bouleversant. On devine rapidement ce qu’il se passe, mais ce n’est pas le propos.



C’est émouvant de voir la relation entre Aki et Jizo se construire pas à pas. Pourtant, leur relation ne part pas d’un bon pied. Aki est méfiant. Ne lui a-t-on pas appris, avec raison, qu’il ne fallait pas faire confiance aux inconnus ? Mais Jizo est insistant et refuse de laisser Aki seul, lui parlant de la sorcière qui ne doit surtout pas le trouver, et le conjurant de ne pas s’aventurer seul la nuit.



Pendant une partie de l’histoire, on se demande qui est Aki, d’où il vient, comment il s’est perdu, mais surtout qui est ce mystérieux Jizo, pourquoi lui vient-il en aide et pourquoi est-il aussi insistant et inquiet sur sa sécurité ? Pour ceux qui ont quelques notions en mythologie japonaise, la réponse est évidente. Pour les débutants, comme moi, l’intrigue se dévoile petit à petit, et on découvre ce que cachent les deux enfants. Et là, c’est la claque. Celle qui dévaste le cœur, celle qui retourne, que l’on ait deviné le plot twist ou pas.



J’ai aimé la thématique autour du surnaturel, à travers les esprits et la sorcière, odieuse et terrifiante dont on espère ne jamais croiser sa route, mais dont on sait la confrontation inévitable entre elle et les deux enfants (aussi terrifiante et horrible soit-elle, elle nous est rendue touchante à la fin, d’une certaine façon, bien que ça n’enlève pas ses crimes, on prend pitié d’elle malgré nous). Toute l'atmosphère de légendes et de mythes japonais est envoûtante nous embarque, et nous propose une belle invitation à un pan de la culture japonaise. Mais, les thématiques centrales du manga sont bel et bien la foi et l’amour à travers la relation entre Jizo et Aki mais aussi la relation entre Aki et sa maman.



L’amitié qui va naître et se nouer petit à petit entre Aki et Jizo est touchante, et va subir bien des épreuves entre la méfiance et le rejet d’Aki, puis le soutien et l’acceptation de l’autre. Aussi touchante est la relation entre Aki et sa maman. Je ne peux pas en dire davantage, de peur de spoiler, mais le manga nous peint vraiment une relation magnifique et bouleversante entre une mère et son enfant, une ode à l’amour maternel qui est infini.



Concernant le dessin, il est efficace, alternant entre le sombre et le lumineux, le jour et la nuit, parfois joyeux, parfois angoissant. Les émotions passent même sans texte. Je ne peux pas parler de coup de cœur pour Jizo, c'est autre chose quelque chose de plus fort. Ce qui est certain, c’est que je ne suis pas ressortie indemne de cette lecture. Je ne connaissais d’autant plus pas la légende que nous conte le manga, et ça a permis à ma lecture d’être une découverte, ce qui m’a amené à faire des recherche sur cette jolie croyance.



En résumé, une lecture belle, onirique, sensible et touchante dont je ne suis pas ressortie indemne. C’est doux et poétique malgré les sujets durs que le manga aborde. C’est fantastique, c'est sombre, c'est un peu terrifiant, mais c'est palpitant et émouvant.

dimanche 10 mars 2024

Le jardin, Paris - Gaëlle Geniller.



Années 1920. Rose est un garçon, et comme toutes les filles qu'il fréquente depuis sa naissance au cabaret dirigé par sa maman, il veut danser. Avec ce second livre, l'autrice de 24 ans, Gaëlle Geniller, frappe fort.

"Le Jardin" est un cabaret parisien au succès grandissant dirigé par une femme. Toutes celles qui y travaillent ont un nom de fleur et l'ambiance y est familiale. Rose, un garçon de 19 ans, est né et a grandi dans cet établissement. Il souhaite à son tour être danseur et se produire sur la scène, devant un public, comme ses amies. Il va rapidement en devenir l'attraction principale.





Le Jardin, Paris était un titre qui me faisait de l’œil depuis ma lecture des Fleurs de Grand-Frère de la même auteure et qui s'inscrit parfaitement dans le Blossom Spring Challenge.



Nous sommes à Paris dans les années 1920. Nous plongeons dans l'intimité du Jardin, un cabaret très populaire de la capitale. Les danseuses portent toutes un nom de fleur et donnent un spectacle mêlant danse et sensualité chaque soir devant des spectateurs ravis et admiratifs. Parmi ces danseuses, il y a Rose, le fils de la propriétaire du Jardin. Étant né et ayant grandi au sein du cabaret, devenir une fleur était pour lui une évidence. C'est ainsi qu'il revêt des habits féminins et danse pour le public. Malgré le stress de ses débuts, il gagne vite une foule d'admirateurs, dont Aimé, jeune homme conquis par Rose dès le tout premier soir.




Rose est un garçon charmant, doux, sensuel. Élevé dans un monde de femmes et s'habillant comme elles, la question de son identité n'a jamais posé question ou problème. Rejoindre ce milieu, en compagnie des danseuses avec qui il a grandi, était pour lui une évidence, pour ensuite s'y épanouir comme une fleur. J'ai suivi avec intérêt son histoire. Si sa relation avec Aimé est mignonne, j'ai davantage apprécié sa relation avec sa mère, Violette, et les autres danseuses du cabaret. Si celles-ci ne sont que des personnages secondaires dans l'histoire, elles ne sont pas mises de côté et on apprend à les connaître et suivre l'histoire à leurs côtés. Le Jardin n'est pas qu'un cabaret puisque les danseuses y vivent, si bien qu'elles ont noué plus que des liens professionnels et qu'elles nous semblent former une famille, liée dans les joies comme dans les peines, avec les filles soudées comme jamais et solidaires face aux épreuves.




Si ma lecture a été plaisante, je dois avouer avoir été surprise de n'y trouver aucun élément perturbateur [spoiler] l’article du journaliste en est-il vraiment un puisque, finalement, il n'est pas un antagoniste et que ça a boosté la popularité de Rose ? [/spoiler], aucune réelle péripétie, aucune action. Personne ne s'étonne du travestissement de Rose qui est rapidement adulé par tous. Il n'y a aucun conflit, le mode de vie de Rose passe comme une lettre à la poste, alors que je m’attendais à le voir rencontrer des difficultés à travers des personnes beaucoup moins tolérantes et qui n'acceptent pas la différence. Tout le long de l'histoire, tout va bien. Nous sommes dans une version idéalisée des années folles.




Je ne saurais dire si j'accroche ou non à ce choix scénaristique. D'un côté, je m'attendais vraiment à ce qu'il y ait un élément perturbateur, que Rose soit heurté à des obstacles ou des critiques, ou du moins qu'il se passe quelque chose et cela m'a déconcerté. L'auteure aborde le thème du travestissement, de l'androgynie, l'identité de genre, ce qui est très bien mais j'ai l'impression que ces sujets manquent de profondeur. C'est une histoire très en douceur et très épuré. D'un autre côté, ça fait du bien quand même de voir un monde sans conflit, où tout se passe bien. C’est un monde idéalisé comme on aimerait le vivre chaque jour. C'est emprunt de bons sentiments, de tendresse et de poésie et ça fait du bien à voir pour une fois. Et peut-être que, finalement, chaque histoire évoquant ces sujets n'a pas besoin d'élément conflictuel ou d'opposition. Cela nous montre aussi que tout peut se passer sans heurt, avec un esprit ouvert et avec bienveillance.



C'est aussi une plongée intéressante dans le monde du cabaret, de la danse et de la musique. Les dessins sont très beaux et représentent magnifiquement l’univers du cabaret. Les costumes sont sublimes et les dessins arrivent à faire ressortir la magie de la danse. Le trait est très doux, c’est tout en couleur et en lumière. J'ai vraiment beaucoup aimé la façon de l'auteure de peindre les années folles, surtout concernant les toilettes, la beauté joyeuse des danses. J'ai admiré et même observé avec envie les habits de Rose et des autres danseuses, qu'il s'agisse des costumes de cabaret ou des vêtements de jour, combien j'aurais aimé essayer ces robes !


En résumé, une histoire douce et bienveillante brillant de mille couleurs. Une jolie petite découverte.


jeudi 7 mars 2024

Changer l'eau des fleurs - Valérie Perrin.


Violette Toussaint est garde-cimetière dans une petite ville de Bourgogne. Les gens de passage et les habitués viennent se réchauffer dans sa loge où rires et larmes se mélangent au café qu’elle leur offre. Son quotidien est rythmé par leurs confidences. Un jour, parce qu’un homme et une femme ont décidé de reposer ensemble dans son carré de terre, tout bascule. Des liens qui unissent vivants et morts sont exhumés, et certaines âmes que l’on croyait noires, se révèlent lumineuses.

Après l’émotion et le succès des Oubliés du dimanche, Valérie Perrin nous fait partager l’histoire intense d’une femme qui, malgré les épreuves, croit obstinément au bonheur. Avec ce talent si rare de rendre l’ordinaire exceptionnel, Valérie Perrin crée autour de cette fée du quotidien un monde plein de poésie et d’humanité.



Changer l’eau des fleurs était l’un des romans que j’avais le plus hâte de lire pour le Blossom Spring Challenge, ainsi je n’ai pas tardé à l’emprunter le plus vite possible à la médiathèque pour le lire.



Que dire, à part : quel ENNUI total et Dieu merci, je n’ai pas dépensé un seul centime pour ce livre !


L’histoire est celle de Violette Toussaint (nommée ainsi car sa peau était de cette couleur quand la sage femme l’a trouvé à la naissance, si, si), garde-cimetière dans une ville de Bourgogne, une femme abîmée par la vie mais qui continue à prendre la vie comme elle vient, à chérir son travail, son quotidien, sa petite maison, ses amis. Elle a pris l’habitude de recevoir les gens de passage ou les habitués du cimetière dans sa maison, à leur prêter une oreille attentive, découvrir leur histoire et celle du défunt que ces gens viennent voir. Petit à petit, nous sommes amenés à découvrir la vie de Violette, les drames qui ont parsemés sa vie, comment elle est devenue ce qu’elle est, etc.


Il m’est rapidement devenu évident que l’histoire allait être longue, et ça ne va pas en s’arrangeant. Tout continue à aller à un rythme lent, j’ai d’ailleurs fini par survoler des pages sur la fin. Si le « mystère » autour d’Irène Fayolle et pourquoi elle veut reposer auprès d’un autre homme que son mari ne m’a fait ni chaud ni froid, j’ai eu un semblant d’intérêt pour l’affaire autour de [spoiler] la mort de la fille de Violette et comment son père cherche à découvrir la vérité [/spoiler], et la thématique autour du deuil d’un enfant était vraiment touchante. Il y a aussi eu quelques petites rencontres sympathiques parmi les gens que Violette est amenée à rencontrer, et le petit groupe gravitant autour de Violette forme une dynamique plutôt sympathique (les employés du cimetière et des pompes funèbres notamment).


Ce qui m’a sauté aux yeux était aussi l’omniprésence des histoires d’amour, et par n’importe lesquelles. Je n’ai pas pu m’empêcher de remarquer que la quasi totalité des histoires d’amour n’était que l’objet d’une tromperie. Nous n’avons pas UN SEUL personnage, surtout féminin, qui ne trompe pas son conjoint ou qui n’est pas la maîtresse, sans que ces femmes veuillent quitter leur mari pour autant, sans doute pour ajouter de la tragédie à ces histoires d’amour, d’autant plus que ces femmes trouvent rarement leur grand amour auprès de leur mari mais toujours auprès de l’autre homme avec qui elles trompent leur conjoint. Qu’est-ce que je dois en déduire ? Qu’on ne peut connaître l’amour véritable qu’en trompant son conjoint et en allant coucher ailleurs ? Vu la panoplie de personnages et les histoires qu’ils racontent sur eux et sur le défunt qui leur est cher, je ne m’étonne pas de trouver des histoires de tromperie… mais enfin, quand c’est la quasi totalité des personnages, on est quand même en droit de penser que c’est exagéré, et que c’est romancer les histoires d’infidélité au maximum. À croire que l’auteure est allergique aux histoires d’amour sans infidélité.


Enfin… est-ce que je peux parler d’histoires d’amour quand il s’agit plus exactement d’une sorte d’« amour passion » qui est complètement déconnecté de la réalité, une sorte de folie qui prend chacun de ces personnages sans qu’on en perçoive la chaleur ou l’alchimie, d’autant que certaines de ces relations sont très discutables (un demi frère et une demi sœur, une tante et son neveu, etc), des viols banalisés, etc.


Le concept était pourtant intéressant. Notre personnage principal qui exerce le métier peu commun de gardienne de cimetière, découvrir davantage ce métier méconnu, les rencontres que Violette fait à travers son métier, découvrir ces personnes et leur histoire ainsi que l’histoire du défunt. L’occasion de découvrir une panoplie de vies différentes et passionnantes… mais la plupart de ces histoires ne sont que des romances et des infidélités. Pour l’originalité et la diversité, on repassera…


Ajoutez à cela des phrases dites à la Anna Gavalda, c’est-à-dire avec des métaphores qui ne tiennent pas debout, des phrases qui se veulent poétiques ou philosophiques mais qui sonnent très étranges. Vous voulez des exemples ?


« Je suis gardienne de cimetière, je ne bois que des larmes »
« Quand une femme perd son mari, on l'appelle une veuve. Mais quand une femme perd son amant, comment l'appelle-t-on ? Une chanson ? »
« L'automne est une berceuse pour la vie à revenir. »
« 
Mon mari avait 10 ans de plus que moi quand je l'avais rencontré. Cette différence d'âge lui donnait de la hauteur. J'avais l'impression d'être un papillon qui regarde une étoile »


De façon paradoxale, d’autres dialogues sont écrits avec une certaine vulgarité, notamment les scènes de sexe (et il y en a…), par exemple « Il m'a retournée. Sans me regarder. Il a baissé ma culotte, il a écarté mes cuisses. Pas de caresses. Pas de mots du tout. Il m'a baisé par derrière sans me regarder, me faisant pousser des cris de truie qu'on égorge » (très romantique tout ça…), ce qui ne colle pas avec l’ambiance générale du livre qui baigne le plus souvent dans le pathétisme et le tragique. Nous avons donc affaire soit à des dialogues crus, des longueurs, des répétitions, ou bien des phrases incompréhensibles dans leur poésie ou philosophie… Personne ne se parle comme ça dans la vraie vie, ce n’est vraiment pas crédible !


Concernant les personnages, je ne les ai trouvé ni attachants ni mémorables, y compris l’héroïne que j’ai trouvé insipide, apathique et manquant cruellement de caractère ou encore son mari qui est passé de salaud à victime le plus simplement du monde. Il y a quelques personnages comme LéonineSasha et Célia qui sauvent un peu les meubles, mais sans plus.


Bref, c’est un roman avec un concept de départ intéressant, il y a de bonnes idées, quelques passages sympathiques mais ça reste un pêle-mêle d’histoires sans queue ni tête, un roman composé à 99 % d’histoires de tromperies, avec une écriture déconcertante. Ce roman n’était vraiment pas fait pour moi. Après, je ne juge pas ceux qui l’ont adoré, à chacun ses goûts… Il faut dire que l’histoire a un vrai potentiel sympathique, mais je m’attendais à quelque chose de différent. J’admets ne pas être le bon public pour ce roman et je le laisse volontiers à d’autres lecteurs/trices plus enthousiastes que moi.


En général, les visiteurs aiment se prendre les pieds dans les chats du cimetière. Beaucoup d'entre eux se disent que leur défunt se sert des félins pour leur faire un signe. Sur la tombe de Micheline Clément (1957 - 2013) il est écrit : "Si paradis il y a, paradis ne sera que si j'y suis accueillie par mes chiens et mes chats."

samedi 2 mars 2024

Les guerres de Lucas - Renaud Roche et Laurent Hopman.


Scrupuleusement fidèle à la réalité historique, méticuleusement documenté, Les Guerres de Lucas met en scène l’invraisemblable épopée de George Lucas, enfant rebelle passé à côté de la mort, prodige du nouvel Hollywood et visionnaire indomptable.

Une exploration inédite des coulisses de Star Wars, de l’enfer du casting au tournage cauchemardesque, où querelles entre acteurs, histoire d’amour secrète et désastres en pagaille jalonnent le quotidien. Un bourbier gigantesque dont sortira pourtant une œuvre majeure qui changera à jamais le cinéma.

Les Guerres de Lucas est une plongée en apnée dans les affres de la création, intense et poignante, mais drôle malgré tout. Making of ultime, success-story jouissive et leçon de cinéma, une ode à la magie de l’enfance et à la persévérance.


Je m’étais jurée d’en finir avec les achats impulsifs, après en avoir tant fait il y a des années pour finir avec des livres dont, pour la plupart, je n’ai jamais lu. Mais, quand j’ai vu cet ouvrage, comment aurais-je pu résister, quand Star Wars m’accompagne depuis mon adolescence, depuis ma découverte de la première trilogie en K7 puis de la prélogie au cinéma.


Je ne regrette pas du tout cet achat. Cet ouvrage est un petit bijou pour quiconque aime, a grandi (ou pas) avec Star Wars et veut découvrir ou redécouvrir l’histoire de son créateur, George Lucas, et comment Star Wars, l’œuvre de sa vie, est venu au monde.



L’ouvrage se présente donc comme une biographie de George Lucas. Natif de Californie, il a dévoré de nombreux comics et pulp magazines dans sa jeunesse. Fan des courses automobiles, il s’est d’abord rêvé pilote professionnel avant d’intégrer l’école de cinéma, malgré l’opposition de son père qui souhaitait le voir reprendre le commerce familial, où il produira de nombreux courts métrages et fera la rencontre de Marcia, monteuse, qui deviendra son épouse, et Francis Ford Coppola avec qui il se liera d’amitié. On découvre un homme passionné, travailleur, introverti et qui parle peu. On apprend aussi ses faiblesses, ses soucis de santé notamment dû à son anxiété (il n’hésitait pas à se couper des mèches de cheveux quand il était en stress), mais c’est aussi un homme avec un rêve, une vision, une créativité et un sens du détail. J’ai également beaucoup aimé découvrir l’importance de Marcia, son épouse, véritable pilier dans la vie de son époux, aussi bien sur le plan personnel que professionnel car elle a aussi apporté sa pierre à l’édifice « Star Wars » et l’a aidé à sauver son film.



Car, bien-sûr, on ne peut pas parler de George Lucas sans évoquer Star Wars, l’œuvre de sa vie et ce roman graphique est vraiment une lettre d’amour à cette saga. Les auteurs sont des fans et cela se ressent aussi bien dans l’écriture que dans le graphisme.


Les guerres des Lucas… titre à la fois évoquant Star Wars, aussi connu sous le titre de La Guerre des Étoiles, mais aussi parce que c’est une véritable guerre que George Lucas et son entourage ont du mener pour s’imposer face aux studios qui le produisait, et pour que Star Wars puisse enfin voir le jour. Ce qui nous est dépeint dans ce livre n’est pas un joli conte de fées comme Hollywood aime les montrer. La réalisation de Star Wars fut un combat mené sur plusieurs fronts qui mit plusieurs fois en péril la santé de son créateur, et la route fut bien longue et semée d’embûches pour faire accepter son film aux studios hollywoodiens réfractaires aux idées novatrices, sans oublier les multiples réécritures de son scénario jugé (à raison) comme trop complexe ou fouillis, et le tournage chaotique entre les mauvaises conditions météorologiques, les problèmes techniques ou les conflits entre acteurs.

Annoncé dès le départ par les studios et des personnes extérieures comme une catastrophe cinématographique, Star Wars a su s’imposer comme l’un des plus gros succès de tous les temps et trouver rapidement son public, notamment grâce à des effets spéciaux révolutionnaires, des effets sonores créatifs et mémorables ainsi qu'une musique inoubliable signée John Williams, et des personnages pour la plupart mémorables (notamment Dark Vador qui s’est imposé comme l’un des méchants les plus cultes du cinéma).



Si j’ai aimé découvrir la vie de Lucas, j’ai également beaucoup aimé découvrir l’histoire derrière Star Wars, comment ce projet impossible s’est concrétisé, contre vent et marée. J’ai beaucoup aimé les différentes anecdotes de tournages dont certaines qui font vraiment sourire ou qui émeuvent. C’est un bijou truffé d’anecdotes et d’information et de références. On apprend vraiment plein de choses, dans les moindres détails (d’où vient le design de Chewbacca ? Le bruit des sabre-lasers ou des droïdes ? Les vaisseaux spatiaux ?). C’est aussi très enrichissant de découvrir le fonctionnement de l'industrie du cinéma en général à travers le livre.



Quel plaisir aussi de voir sur papier les acteurs (Mark Hamill, Carrie Fisher, Harrison Ford, Alec Guinness, Peter Cushing, etc), comment ils ont obtenus leur rôle, les liens qui se sont tissés entre eux ou même les conflits, les histoires d’amour, mais quel plaisir aussi de croiser d’autres personnages connus, que ce soit brièvement ou pendant quelques scènes, comme SpielbergCoppola, et certains jeunes acteurs et actrices encore illustres inconnus tels que Jodie Foster, John Travolta ou Christopher Walker qui ont auditionné pour des rôles dans Star Wars (chose que j’ignorais). Après, sans doute est-ce un peu romancé (je pense qu’Alec Guinness n’était pas aussi convaincu par le film au départ, par exemple), mais je laisse passer car j’ai vraiment apprécié ma lecture !



Je ne m’étendrai pas davantage sur cet ouvrage, car il y a tant à dire. Pour résumer, c’est une biographie rythmée, drôle, touchante et passionnante de bout en bout, une vraie mine d'or pour tous les amoureux de cette saga ! Je remercie les auteurs de m’avoir immergé dans cet univers qui me suit depuis des années !


Pour terminer, la musique iconique !