jeudi 29 décembre 2022

Les amants de Baker Street (T.3) Les années Sussex - Isabelle Lesteplume.


Un détective peut-il vraiment prendre sa retraite ?

Angleterre, début du XXe siècle.

Propulsé par la révolution industrielle, le monde est en plein changement. Sherlock Holmes et John Watson sont désormais célèbres, leurs méthodes sont utilisées par la police et leur courrier déborde de propositions d’enquêtes.

Mais plus le temps passe, plus l’âge les rattrape et plus ils sont fatigués de devoir constamment cacher leur relation. Ils commencent à imaginer une vie différente dans un petit havre de paix perdu dans le Sussex...

Hélas, l’Histoire n’a pas dit son dernier mot. Embarqués malgré eux dans la tourmente de plusieurs événements dramatiques, ils devront se battre pour survivre...

Et pour sauver le monde entier.



Quelle bonne façon de terminer l’année et d’en commencer une nouvelle avec Sherlock Holmes et ses aventures plein la tête ! J’attendais avec impatience ce dernier tome, dévorée de curiosité en me demandant comment l’auteure allait conclure sa trilogie et ce que ce troisième tome nous réservait.



C’est la fin d’une époque ! Sherlock Holmes rend son tabli… son deerstalker pour une retraite bien méritée dans le Sussex en compagnie de son compagnon. Mrs Hudson n’est plus, nous fermons les portes du 221B Baker Street. Holmes et Watson profitent de leur retraite… oui mais pas pour très longtemps ! Une affaire importante du gouvernement britannique, en la personne de Mycroft Holmes et de son jeune agent secret, tirent Holmes et Watson de leur retraite. Il en va de la sécurité du pays, voire même de l’Europe qui est sous tension. Une guerre mondiale menace… Afin de récupérer des documents officiels importants, Holmes et Watson doivent traverser l’Atlantique et se rendre en Amérique. Pour cela, le gouvernement leur propose le nec plus ultra ! Un magnifique paquebot qui est sur le point d’effectuer son premier voyage en avril 1912… ça vous dit quelque chose ?



Holmes et Watson embarquent donc au sein du RMS Titanic ! Certains lecteurs pourraient trouver que cela fait de trop. Faut-il donc s’attendre à ce qu’ils rejouent Jack et Rose ? Si j’ai été surprise que l’auteure ait inclus le Titanic dans son roman, je ne suis pas choquée. Ce n’est pas le premier pastiche holmesien à faire embarquer nos deux héros sur le célèbre paquebot. Sherlock Holmes a été cuisiné à toutes les sauces dans les nombreux pastiches holmesiens. Il aura rencontré Sigmund Freud, confronté Arsène Lupin, le fantôme de l’opéra ou Jack l’Eventreur, enquêté sur l’affaire Mayerling, participé à la Première Guerre Mondiale en tant qu’espion… alors le faire voyager à bord du Titanic ne m’étonne pas. Je dois même avouer avoir couiné de plaisir lorsque j’ai appris qu’une partie de l’intrigue était consacrée au Titanic. Est-ce que j’ai écouté la soundtrack du film en lisant ces chapitres ? Bien-sûr que oui ! Mais je promets ne pas avoir imaginé Holmes et Watson refaire la fameuse scène à l’avant du paquebot.



Afternoon, de suwi (Source)
J’ai pris beaucoup de plaisir à lire cette partie consacrée au Titanic, le voyage aussi bien que le naufrage, d’autant plus qu’elle est chargée en émotion, ajoutons à cela que l’auteure a également introduit des personnalités qui ont bel et bien vécu et qui ont péri dans le naufrage. On se doute bien-sûr que Holmes et Watson vont s’en sortir, bien que cela ne nous empêche pas de craindre pour eux tant ils craignent de perdre l’autre et chaque séparation nous donne envie de voir les heureuses retrouvailles, après une bonne dose d’angst. J’ai également eu mal au cœur en lisant la disparition de certains personnages [spoiler] et notamment celle du jeune agent secret, qui a péri dans le naufrage [/spoiler].

Après cette partie, la suite n’en est pas moins chargée en émotions et en rebondissement. Un antagoniste bien connu refait parler de lui, en Amérique cette fois-ci, obligeant nos personnages principaux à tout mettre en œuvre pour éliminer cette menace, ce qui amène de nouvelles scènes d’action, de tension et de rebondissements et… je dois avouer qu’un élément de cette partie du roman m’a semblé vraiment too much et qui a surtout servi à créer davantage de drama entre nos différents personnages [spoiler] à savoir que Mary Morstan Watson et son amante, Cecil Forrester, ont survécu à leur naufrage et ont fait croire à leur mort pour vivre dans la clandestinité en amoureuses puis plus tard en tant que super espionnes. Pour ce coup, la rancœur de Watson m’a paru plus que justifiée [/spoiler].



Il y a aussi l’ombre de la Première Guerre Mondiale qui plane et assombrit l’intrigue. Nous sommes bien loin de l’époque victorienne et, loin de leurs premières enquêtes, Holmes et Watson doivent survivre dans un Londres en guerre tout en prêtant main forte, notamment dans les hôpitaux pour soigner les blessés. Ce dernier roman est donc riche en action et en rebondissement, avec très peu de temps morts. L’écriture de l’auteure reste très vivante et dynamique, elle captive notre attention et nous donne envie de dévorer la suite.



Malgré les moments de tension et de drame, l’auteure ne néglige pas les moments plus tendres où notre couple peut se reposer et profiter de l’autre. Malgré les obstacles qu’ils continuent de rencontrer, ils restent ce couple très uni et toujours amoureux qu’on aime, et on saura apprécier les moments de domesticité (notamment durant leur retraite dans le Sussex) autant que les moments plus dramatiques, et j’ai d’ailleurs apprécié que l’auteure reprenne l’aventure des Trois Garridebs, et son interprétation des personnages reste fidèle et intéressante à suivre. On sent véritablement que Holmes et Watson ont vieilli. S’ils restent fidèles à eux-mêmes, on sent qu’ils n’ont plus les mêmes capacités que lorsqu’ils étaient plus jeunes, qu’ils ne peuvent plus se permettre le même genre d’aventure qu’avant. Watson, notamment, qui est limité. Il se fatigue plus vite, ne parvient plus à courir aussi vite et aussi longtemps, et cela pèse sur son moral, il doute de sa valeur, s’il a encore sa place auprès de Holmes dans leurs aventures, a peur d’être mis de côté et à la fois de ralentir et limiter Holmes dans ses enquêtes.



L’auteure nous a offert un dernier tome aussi riche en émotion, en action et en rebondissement que les précédents, et elle clôt avec brio sa trilogie sur Sherlock Holmes que je referme à regret, tant j’aurais voulu lire d’autres aventures du détective et de son Boswell sous sa plume. J’ignore si elle se consacrera de nouveau à cet univers, toujours est-il que je suivrai sa bibliographie avec intérêt et que je découvrirai un jour avec plaisir ses réécritures M/M des contes de fées.


Le monde changeait à toute allure en ce début de siècle, lancé dans une course au progrès qui le transformerait à tout jamais. Et eux, dans tout cela ? Trouveraient-ils une place dans cette nouvelle ère ? 

— Nous ne sommes pas encore de vieux croulants, tout de même ! s’exclama Holmes, le tirant de ses rêveries mélancoliques. 

Il s’aperçut qu’ils venaient d’atteindre le 221b. Il soupira, habitué à ce que son compagnon suive le train de ses pensées sans qu’il les ait partagées à haute voix, et sortit sa clé.

(...) — Je n’ai jamais pensé que nous étions de vieux croulants, lâcha le docteur en se laissant tomber sur le sofa. Mais j’ai quelques fois l’impression d’appartenir à un univers en train de disparaître. Pas vous ? 

Holmes lui tendit son verre et s’assit à côté de lui. 

— Mon pauvre Watson, répondit-il affectueusement. Ne vous en faites pas, je suis certain que tous les hommes de votre âge depuis le début de la civilisation ont réagi de la même façon. 

— Voilà qu’on me traite de sénile, à présent…

dimanche 25 décembre 2022

La véritable histoire de Noël - Marko Leino.

Au cœur de la Laponie, pays des neiges éternelles, le jeune orphelin Nicolas est recueilli par les habitants de son village. Mais ils sont tous trop pauvres pour pouvoir l’adopter. Le Conseil des Anciens prend alors une décision inédite : chaque année, le garçon sera pris en charge par une famille différente, et il en changera le jour de Noël.

Avec une étincelle d’espoir et de joie de vivre, Nicolas décide de se consacrer à sa passion : fabriquer des jouets. Le garçon va ainsi raviver l’émerveillement au cœur de cette région glacée. Et pourrait bien être à l’origine d’une des plus belles légendes.



Dans une lointaine contrée froide vit le petit Nicolas avec ses parents et sa petite sœur Aada. Un jour que sa sœur tombe malade, ses parents sont contraints de quitter leur foyer pour chercher un médecin en ville et laissent le soin à Nicolas de veiller sur la demeure jusqu’à leur retour. Malheureusement pour Nicolas, sa famille ne revint jamais et c’est ainsi que, quelques jours avant Noël, Nicolas se retrouve orphelin. Au village le plus proche, on s’interroge sur l’avenir de l’enfant. Les hivers sont rudes et les habitants sont trop pauvres pour se permettre de l’accueillir comme un nouveau membre de leur famille. Il est alors décidé que chaque famille prendra soin de Nicolas pendant toute une année, jusqu’au Noël suivant, jusqu’à ce qu’il soit assez grand pour se débrouiller par lui-même. Tout d’abord enfermé dans son chagrin, Nicolas refuse longtemps de se lier à sa première famille d’adoption avant de se lier d’amitié avec leur jeune fils et de se découvrir une passion pour la fabrication de jouets. Pour atténuer la peine de son départ et remercier ses hôtes, Nicolas décide d’offrir à chaque Noël, avant son départ, de confectionner et d’offrir un jouet en bois aux enfants, et, d’année en année, le nombre d’enfants augmente et il faut plus de jouet. Commence ainsi une tradition que tout le monde connaît…



Ce roman imagine d’une très jolie façon l’histoire du Père Noël. Bien que je lui préfère Une seconde avant Noël de Romain Sardou qui m’a bien plus enchanté, ce roman est un joli petit conte de Noël qui se savoure à la manière d’un calendrier de l’avent, avec ses 24 chapitres, comme un petit chocolat que l’on laisse fondre sur la langue. C’est une bonne lecture pour accompagner le lecteur au cours du mois de Décembre, pour entrer progressivement dans la magie et l’ambiance de Noël.



J’ai aimé l’originalité de l’histoire, à savoir que Nicolas passe de famille en famille d’année en année, créant des liens, développant la tradition qu’il se fait de confectionner chaque Noël des jouets en bois. Nicolas est un protagoniste plaisant à suivre. C’est une belle personne, désintéressée, qui offre sans rien attendre en retour. On ne peut qu’être touché par son vécu, le fait qu’il se soit retrouvé orphelin si jeune, le fait qu’il refuse la mort de sa petite sœur et pense qu’elle est devenue une sirène, voguant dans les eaux glacées, et à qui il confectionne également un jouet. Nicolas est un personnage volontaire avec la main sur le cœur, qui a dû faire face très tôt aux épreuves de la vie, à la perte d’êtres chers, et qui a dû s’accommoder au perpétuel changement de famille. On est touché par son amour pour sa sœur, son amitié pour Eemeli, petit garçon de la première famille à l’avoir accueilli, et qui resteront amis toute leur vie. La famille d’Eemeli continuera à avoir un grand impact chez Nicolas, de génération en génération.



J’ai également beaucoup aimé le personnage de Iisakki, ébéniste, qu’on nous présente pourtant comme un vieil homme qui déteste les enfants, qui est sévère, parfois méprisant, mais qui cache – comme Nicolas – un passé douloureux. J’ai beaucoup aimé la relation qui lie Nicolas et Iisakki, d’abord un rapport serviteur-maître qui va se transformer en relation familiale touchante. Chacun deviendra le monde de l’autre, et Iisakki en apprend beaucoup à Nicolas sur le métier du bois.



Nicolas est un personnage complexe. Du Père Noël, il n’a rien du joyeux bonhomme joufflu. C’est un être qui a été brisé par la vie, si bien que Noël va devenir sa raison d’être, tout ce pour quoi il existe, quitte à en oublier le reste et négliger ses proches. Et c’est là où ça a un peu coincé chez moi. C’est une jolie histoire pleine de magie, mais il y a beaucoup de tristesse à mon goût. Nicolas se condamne à la solitude, tait son secret sur les jouets aux enfants. Il préfère qu’on le voit comme un ermite bizarre que « le bonhomme de Noël », et il se détourne de ses proches. Noël est son obsession, et il aura bien du mal à lâcher du lest. Au fur et à mesure qu’il grandit, j’ai pris de la distance avec le personnage et j’ai été moins transportée dans l’histoire qui m’a paru aussi triste qu’elle est magique. La fin rehausse le tout avec la relation touchante entre Nicolas et la fille d’Eemeli ainsi que le discours final sur l’amour, l’importance d’être entouré. La magie revient, mais cela ne compense malheureusement pas pour moi l’ensemble du récit qui est assez triste. La mission de Nicolas est très belle, il est tellement généreux et désintéressé mais au prix de se couper ainsi de ceux qu’il aime ? Ce point m’a chagriné.



Toutefois, on peut admettre que tout ceci ne fait qu’accentuer la force et l’émotion suscitées par cette histoire et le message principal reste beau, malgré tout. Perpétuer la tradition et la joie de donner, cette dernière s'apprenant dès le plus jeune âge. Cela reste également une jolie histoire qui revisite le mythe du Père Noël, imaginer sa vie de son enfance à sa mort, son héritage et comment il est devenu ce qu’il est, sans oublier l’histoire de ses fameux symboles et attributs : les rennes, le costume rouge, les grelots, etc.



Malgré ce que je peux reprocher à ce roman, il n’en demeure pas moins une lecture agréable qui nous présente une revisite intéressante de l’histoire du Père Noël et nous transporte dans l’ambiance de Noël.


- Mais pourquoi il nous apporte des cadeaux ? s'étonna un des enfants.
Un silence s'abattit sur la boutique. Tous les enfants fixèrent Aada d'un air interrogateur.
- Parce que... commença-t-elle en réfléchissant.
Elle ferma les yeux et se projeta le visage barbu de Nicolas. Elle le voyait tel qu'elle l'avait vu sur la glace : esquissant un sourire doux, mais un peu amer.
- ... parce que le bonhomme de Noël veut que nous apprenions, à travers la joie de recevoir, à quel point il est important de donner. Quand on donne aux autres, on reçoit bien plus que ce qu'on a donné.

jeudi 8 décembre 2022

Un chant de Noël - Charles Dickens.



C'est la veille de Noël, les rues sont animées et chacun prépare joyeusement le réveillon. Le vieux Scrooge, avare et solitaire, est furieux. Il refuse l'invitation de son neveu et s'enferme chez lui. 

C'est alors que le fantôme de son ancien associé lui apparaît, suivi bientôt de trois autres spectres plus inquiétants les uns que les autres. Scrooge est entraîné malgré lui dans un fabuleux voyage à travers le temps.




Si je vous demande de citer un exemple de conte de Noël, il y a de fortes chances pour qu’Un chant de Noël soit cité et à raison. Je pense que c’est l’un des classiques dont on connaît les grandes lignes de l’histoire, sans même l’avoir lu. Il faut dire que le message universel qu’elle dégage a rendu l’histoire adaptable sur les écrans. Il faut dire que ce conte de Noël populaire, qui a un grand impact culturel, a connu moult adaptations et a été cuisiné à toutes les sauces. Pour n’en citer qu’un, le célèbre oncle Picsou s’appelle Scrooge McDuck dans la version originale, d’après le célèbre personnage de Dickens, et cette histoire a connu une nouvelle adaptation animée cette année sur Netflix qui nous a offert un Scrooge, ma foi, pas vilain du tout à regarder, hem hem.



Ebenezer Scrooge est un vieil homme cupide et solitaire, rongé par l’avarice. Il ne pense qu’à ses affaires. Rien ne saurait le perturber. Ni le plus chaud des étés ou le plus froid des hivers, et encore moins la fête de Noël, symbole de joie et de paix sur terre ainsi que du partage, de la générosité, de l’amour. C’est ainsi qu’à la veille de Noël, Scrooge envoie balader son neveu, pourtant venu l’inviter à sa réception de Noël, traumatise deux gentlemen venus récolter de l’argent pour les nécessiteux, et octroie bien malgré lui un jour de congé à son commis pour cette fête dont il ne ressent aucun attachement. Rien n’y fait. Scrooge est réticent à toute forme de gentillesse ou de générosité. Il se ferme au monde comme une huître dans sa coquille. Ne croyez pourtant pas qu’il se réserve tout son luxe pour lui, non. Scrooge vit dans une immense demeure froide et obscure. Tout ce qui compte pour lui est son travail et gagner de l’argent. Fêter Noël en famille ? Sottises ! Faire un don pour aider les pauvres ? Les hospices et les prisons ne sont-elles pas là pour les loger ?



Mais alors qu’il se prépare à passer Noël dans la solitude de sa maison, le fantôme de son défunt associé, Jacob Marley, lui apparaît pour le mettre en garde : s’il ne change pas sa façon de penser, il ne pourra jamais trouver le repos dans l’au-delà et sa cupidité ne fait que lui ajouter une chaîne l’entravant pour une éternité troublée, comme tel est le cas pour Marley. À cette intention, Scrooge recevra la visite de trois esprits après minuit. Le fantôme des Noëls passés, le fantôme des Noëls présents et le fantôme des Noëls à venir.




J’ai été séduite par ce concept de fantômes de Noël, chacun a sa propre caractéristique physique et chacun montre les Noëls de la vie de Scrooge à un moment de sa vie, l’amenant peu à peu à prendre conscience que son comportement ne fera que le mener davantage dans la solitude et la misère même au-delà de la mort. Avec le fantôme des Noëls passés, nous découvrons l’enfance solitaire de Scrooge dans un pensionnat, enfant isolé habitué aux Noëls maussades. Cependant, on lui découvre un ami au temps où il était apprenti et avec un maître bon que Scrooge respectait, ainsi qu’une histoire d’amour qui a bien commencé avant d’être avortée par l’amour grandissant de Scrooge pour l’argent. On découvre donc un garçon comme tous les autres avec sa souffrance et ses joies. Avec le fantôme des Noëls présents, nous assistons en même temps que Scrooge au Noël organisé par son neveu – qui aime son grincheux d’oncle, malgré tout, et boit à sa santé tout en regrettant son absence, ainsi que le Noël de Bob Cratchit, le commis de Scrooge, qui vit dans la pauvreté avec sa grande famille, dont Tiny Tim, rongé par la maladie, mais qui passent Noël dans la bonne humeur, malgré leur maigre festin. Vient ensuite le troisième esprit montrant à Scrooge les Noëls à venir, ce qu’il risque de se produire s’il ne fait rien.



À travers ces incroyables voyages à travers le temps, Scrooge va peu à peu s’ouvrir à l'esprit de Noël, particulièrement à travers le personnage de Tiny Tim, qui parvient à éveiller chez Scrooge de la compassion. Les esprits de Noël mettent Scrooge face à ses actions en montrant quelle opinion en ont les gens qui l'entourent, et lui font sentir l'erreur dans laquelle il se trouve en lui renvoyant ses propres paroles.



L’histoire de Scrooge est bien sûr prévisible. Le vieux grincheux antisociable va changer de mentalité à la suite de la visite marquantes de ces trois esprits qui n’y vont pas de main morte avec lui. Scrooge est confronté à son passé, ce qui rouvre ses blessures. Il découvre également ce que son entourage pense de lui, des choses belles que certains pensent de lui malgré son comportement mais aussi ce que le monde pensera de lui à sa mort. Il voit qu’au bout du compte, toute sa belle fortune ne lui servira à rien ainsi que les graves conséquences de son égoïsme. Il n’a pas besoin de tant d’argent et qu’en s’ouvrant aux autres, en étant généreux, il ne connaîtra plus les Noëls froids et solitaires et ne vivra plus jamais sans l’amour des siens.


J’ai beaucoup aimé le personnage d’Ebenezer Scrooge qui est attachant, malgré son statut de anti-héros. Il est riche, sans profiter de sa richesse pour vivre dans le luxe. On ne peut que compatir face à son enfance triste et solitaire. On découvre qu’il peut faire preuve d’amour, il l’a montré avant qu’il ne change pour le pire. On peut considérer dans un sens qu’il s’est forgé une protection suite à son passé et qu’il se plonge dans son travail au point d’en oublier le monde qu’il entoure. Ainsi, en voyant certains personnages rabaisser Scrooge, même en sachant qu’il le mérite, cela m’a fait avoir de la peine pour le personnage. J’ai toutefois un grief concernant le personnage en lui-même et l’histoire. Les changements de Scrooge ainsi que ses prises de conscience se produisent un peu trop rapidement. Les fantômes parviennent effectivement assez vite à le convaincre de changer. J’aurais aimé que ce changement se fasse de façon progressive, voir le changement se faire petit à petit, avec Scrooge qui continue de se borner malgré les changements qui s’opèrent pour enfin avoir un magnifique final. Je trouve qu’il y avait également matière à approfondir le personnage – surtout lorsque nous découvrons son passé – pour mieux comprendre comment il est devenu froid et aigri, car la partie sur son passé m’a laissé sur ma faim.



Après, je me rends bien compte qu’il s’agit d’un conte. Il faut prendre l’histoire telle quelle et ne pas s’attendre à une histoire complexe et approfondie. C’est fait pour être court et le récit remplit sa fonction de conte avec sa morale, sa magie et son ambiance fantastique. Mais – au-delà de l’aspect du conte – c’est un hymne à la bonté, au partage et aux valeurs de Noël que nous offre Dickens. C’est un message aux grandes fortunes de ce monde pour les encourager à faire preuve de générosité, d’empathie et de mansuétude.



En bref, Un chant de Noël est un conte classique tout doux, agréable à lire . De plus, l'auteur offre une belle immersion au cœur du Londres victorien, où ses habitants vivent dans la richesse ou dans la misère. Ce grand classique de noël aura su me charmer, sans me surprendre puisque je connaissais déjà l’histoire. Un roman qui mérite bien sa place parmi les grands classiques de Noël. Je trouve juste regrettable que ce ne soit pas devenue une véritable tradition de Noël, d’avoir trois esprits qui hantent un millionnaire ou milliardaire pour en faire quelqu’un de généreux.


« ― Ne vous fâchez pas, mon oncle. Allons, venez dîner demain chez nous. »

Scrooge déclara qu'il verrait son neveu aller au d... Oui, il employa cette expression blasphématoire et déclara qu'il verrait son neveu réduit à cette extrémité, avant que d'accepter son invitation.

« Mais pourquoi ? s’écria le neveu de Scrooge. Pourquoi ?

― Pourquoi vous êtes-vous marié ? demanda Scrooge.

― Parce que j’étais amoureux.

― Parce que vous étiez amoureux ! grogna Scrooge, comme si c’était la seule chose au monde qui fût plus ridicule encore que de fêter Noël. Bonsoir ! »

Premier couplet - Le fantôme de Marley.

mercredi 7 décembre 2022

Un mail au Père Noël - Sophie Castiglione.



Les fêtes de Noël s’annoncent plutôt mal pour Emy.

Fraîchement séparée d’Antoine après avoir découvert qu’il l’a trompée, Emy se désespère à l’idée de devoir passer le réveillon seule jusqu’au jour où une publicité atypique passe à la télévision. Un père Noël promet monts et merveilles à celui ou celle qui lui enverra un mail accompagné d’un unique souhait.  

Sur le coup, Emy n’en croit pas un mot… mais, finalement, au bout du rouleau, elle se lance et se confie. Le lendemain, persuadée que c’était une arnaque, elle s’aperçoit que le père Noël lui a répondu. 

Et si ce fameux mail avait le pouvoir de changer sa vie ?



Décembre, c’est la période propice aux romances de Noël bien guimauves que l’on regarde malgré tout sans vergogne. Il faut dire que si c’est parfois ridicule et plein de bon sentiments, ça fait du bien un peu de douceur et de magie de Noël dans ce monde de brutes. Cela fait quelques années que je regarde de temps en temps ces feuilletons, pour me mettre dans cette ambiance festive, mais cette année est la première où je découvre les romances de Noël sous format papier.



L’intrigue de base est assez classique : une jeune femme se fait plaquer par son fiancé quelques temps avant les fêtes, elle déprime sur son canapé et a perdu le goût de Noël, elle rencontre un homme beau, doux et charmant qui lui fait de nouveau croire en l’amour et en la magie de Noël. Tout est bien qui finit bien dans le meilleur des mondes. L’originalité de ce roman, c’est l’utilisation de la technologie. En effet, notre héroïne découvre une pub dans laquelle le Père Noël propose qu’on lui écrive. Pas à travers une lettre, non. Le Père Noël se modernise et possède sa propre boîte mail ! Bien que notre héroïne, Emy, croit à une arnaque, elle tente tout de même sa chance et envoie un mail au Père Noël à un moment où elle est au plus bas, lui racontant ses malheurs. Contre toute attente, sauf pour les lecteurs, le Père Noël lui répond ! S’ensuit alors un échange de mails, je l’avoue amusant et savoureux à lire, entre Emy et le Père Noël qui s’échangent plaisanteries, confidences et messages d’espoir.



Bien-sûr, l’identité du Père Noël n’étonnera personne [spoiler] encore que j’avais espéré une pointe de surnaturel dans le sens où le love interest serait un lutin du Père Noël que ce dernier aurait envoyé à Emy suite à leur échange de mails, mais ce roman est tout ce qu’il y a de plus contemporain, sans la moindre touche de fantastique. Dommage… [/spoiler], cela n’enlève rien à l’originalité de l’intrigue autour des mails au Père Noël. Si l’intrigue reste assez prévisible dans son ensemble, je lui pardonne cet aspect car, dans une romance de Noël, on recherche davantage une lecture douce et sans prise de tête.



Passons aux personnages. Cela m’a amusé d’avoir une secrétaire médicale pour héroïne (en étant moi-même une) et plutôt contente d’avoir ce personnage pour nous représenter, c’est tellement rare… Et pourtant, jamais nous ne voyons Emy dans le cadre de ses fonctions car Madame prend un arrêt d’un mois pour se remettre de sa rupture, en plein mois de Décembre, laissant sa collègue se débrouiller seule (puis excusez-moi… qu’une clinique soit calme à la période des fêtes, j’en doute fort). Meilleure amie ou pas, si ma collègue me laissait en plan pendant un mois, à la période la plus chargée de l’année, pour une simple rupture sentimentale, je lui ferais son catéchisme à son retour à celle-là. Au final, Emy ne m’a pas laissé grande impression. Elle a la petite vingtaine mais elle agit souvent en adolescente. Dommage…



Tante Rose est un personnage plutôt sympathique. Cette dame pétillante, coquette, vulnérable sous sa répartie, est peut-être le seul personnage à m’avoir véritablement plu dans cette histoire, mais les parents d’Emy étaient aussi sympathiques. Patients, compréhensifs, leur bonne humeur et leur passion pour Noël m’a beaucoup plu. Je pense que cela me plairait de fêter Noël chez eux. Emy ne m’a malheureusement pas laissé grande impression, si ce n’est que c’est un personnage pas désagréable à suivre mais non mémorable. Mélanie, sa meilleure amie, est extravertie, pétillante mais un peu trop mêle-tout. Son amie vient à peine de retrouver le bonheur en amour, à la joie de Mélanie… qui décide de tout gâcher en fouillant dans le téléphone du petit-ami ! Sympa la copine… Quant au prétendant, Tim, c’est la figure du mec parfait, gentil, doux, compréhensif, beau comme un dieu… bref, ennuyeux à mourir ! Ce type n’a aucun défaut ! On ne sait rien de ses défauts, juste ses innombrables qualités ! On sait peu de choses sur son passé. L’auteure n’a pas suffisamment développé ce personnage, ce que je trouve dommage car j’aurais aimé prendre le temps de le connaître et m’attacher à ce personnage…



La romance se met d’ailleurs trop rapidement en place à mon goût, je n’ai pas eu l’impression de voir les sentiments se développer, ce qui est dommage car le but des romances est tout de même de nous faire nous attacher aux personnages et avoir envie qu’ils se mettent ensemble, attendre le baiser tant désiré et que se concrétise cet amour. Au final, ça ne m’a pas emballé plus que ça. Toutefois, la plume de l’auteure est agréable à la lecture et les pages se tournent avec fluidité, ce qui nous donne un roman plutôt agréable à lire, sans prise de tête. Hélas, non mémorable, et que je retiendrai surtout pour son originalité autour du mélange entre Noël et internet.



— Tu sais quoi, j’ai peut-être une idée pour te remonter le moral.

— Si tu as un billet pour les Maldives, avec une chambre au bord de l’eau et un cocktail décoré d’une ombrelle, je serai peut-être intéressée.

— Bécasse ! pouffa ma mère, ravie de voir que je n’avais pas perdu mon sens de l’humour. Avec ton père, on va attaquer les décorations de Noël. Puisque cette année, tu es à la maison, tu pourrais te joindre à nous comme au bon vieux temps ?

Noël, famille, bonheur, joie… tout ce que j’étais incapable de faire. Bon sang, j’avais une mère sadique ! La magie de Noël n’était plus. Elle avait pris ses jambes à son cou et s’était tirée bien loin d’ici. Je soufflai face à ma mère pour lui montrer que je n’étais pas en état de faire quoi que ce soit.

— Je passe mon tour.

— Hors de question, jeune fille ! rétorqua cette sorcière bien décidée à me faire sortir de mon lit d’hôpital beaucoup trop tôt à mon goût. On va commencer par le sapin, tu adorais ça toute petite.

lundi 5 décembre 2022

[Bilan] Ice Cream Summer Challenge 2022


Avec un peu (beaucoup, passionnément...) de retard, voici le petit bilan de fin de challenge pour le Ice Cream Summer Challenge, première édition de ce challenge saisonnier mais certainement pas la dernière, espérons-le ! 



- L'île au trésor, de R.L. Stevenson : une très bonne découverte ! Un bon roman d'aventure et de piraterie, malgré quelques longueurs et un démarrage difficile. Beaucoup d'action et de rebondissements, avec des personnages principaux attachants (je pense notamment à Jim Hawkins et Long John Silver).


- Les vacances d'Hercule Poirot, de Agatha Christie : un sympathique moment de lecture, comme toujours avec la reine du crime. Ça se lit toujours avec beaucoup de plaisir et de fluidité, presque un roman de plage pour mieux frissonner sous le parasol. Cela dit, ce n'est pas le plus mémorable de ses romans et je n'en garderai qu'un vague souvenir.


- L'incroyable voyage de Coyote Sunrise, de Dan Gemeinhart : un sympathique roman plein d'émotion et d'aventure, qui aborde des thèmes graves mais qui se veut optimiste. Un joli roman pour l'été, cela dit je ne le relirai pas.



- Heartstopper, de Alice Oseman : une très jolie découverte ! Des traits doux, des personnages attachants, une atmosphère qui fait du bien au moral, avec beaucoup de tolérance et de bienveillance malgré les sujets difficiles évoqués. J'ai toutefois moins aimé le tome 4 qui apporte une touche beaucoup plus amère et s'éloigne un peu du schéma des tomes précédents.


- Joyland, de Stephen King : un thriller plutôt sympathique sous fond de fête foraine et qui se mélange au roman d'apprentissage. J'ai passé un bon moment de lecture mais ce ne sera certainement pas une lecture mémorable.


- Un océan d'amour, de Grégory Panaccione et Wilfrid Lupano : une bande-dessinée très sympathique et touchante. Une aventure rocambolesque qui sent bon la Bretagne, sous fond d'écologie.





- Et que quelqu'un vous tende la main, de Carène Ponte : un joli roman idéal pour l'été (ou hors saison) avec beaucoup de tendresse et d'optimisme... peut-être même au moins de frôler l'idéalisme. Je ne nie toutefois pas que c'est un véritable page turner qui fait du bien.


- Félin pour l'autre, de Wataru Nadatani : un manga que je n'aurais réussi à terminer qu'en décembre à cause de difficultés à trouver les derniers tomes ! Malgré l'attente, j'ai vraiment beaucoup aimé découvrir ce manga. C'est un manga doux et mignon, feel good et hilarant mais avec plus de profondeur qu’on ne pourrait le croire au départ, avec une belle mise en avant du comportement félin, ce qui est vraiment appréciable car c'est très instructif et ça montre bien que les chats sont plus que d'adorables boules de poils mais des êtres vivants avec leur propre tempérament.


- Ne m'oublie pas, de Alix Garin : Une histoire émouvante et « bittersweet » sur Clémence et sa grand-mère, l’amour qu’elles se portent, les adieux, la nostalgie, les moments de tendresse et les étincelles face aux difficultés de voir quelqu’un qu’on aime face à la maladie d’Alzheimer. Je déplore toutefois des scènes qui m’ont laissé perplexes car inutiles ou bizarres, la fin brutale et la conclusion un peu trop romanesque.



- Radium Girls, de Cy : une lecture non prévue au départ mais qui remplace un livre que je n'ai pas pu lire. Cette BD a de jolis traits doux et elle est touchante et instructive car elle s'intéresse à l'histoire méconnue et tragiques des radium girls. Toutefois, je regrette que l'auteure n'ait pas creusé en profondeur l'Histoire dans l'histoire et qu'elle ait survolé de nombreux aspects.


- California Dreamin', de Pénélope BagieuUne BD biographique plutôt intéressante rendant hommage à Mama Cass, une grande artiste que je ne connaissais pas, et l’histoire des Mamas & Papas, et qui donne envie de se plonger dans leurs chansons. Malgré tout, cette BD ne me laisse pas de souvenir mémorable, je me suis même parfois ennuyée. Peut-être que je ne l’ai pas bien compris et apprécié à sa juste valeur.


- Mermaid Prince, de Kaori Ozaki : Outre la troisième histoire, qui donne son nom au recueil et qui fut une lecture très sympathique, je n'ai pas du tout accroché aux autres histoires et j'ai ressenti de la frustration car j'ai eu l'impression qu'elles étaient inabouties en comparaison de la dernière.


Les comptes à la loupe


Livres prévus : 12
Livres lus : 12, avec juste une entorse sur une catégorie où je n'ai pas lu le livre prévu au départ et que j'ai remplacé par une bande-dessinée.


Le mot de la fin


Hormis une entorse sur une catégorie où je n'ai pas pu lire le livre prévu au départ ainsi que Félin pour l'autre que je n'ai réussi à finir qu'après le challenge, j'ai plutôt réussi à remplir mes objectifs, ainsi je ne m'en suis pas trop mal sortie pour ce challenge estival. J'ai pris beaucoup de plaisir à y participer, et participerai avec grand plaisir à l'édition de 2023 !


Mon t
op 3 

L'île au trésorR.L. STEVENSON

HeartstopperA. OSEMAN
Félin pour l'autreW. NADATANI

dimanche 4 décembre 2022

Félin pour l'autre ! - Wataru Nadatani.


Kensuke Fuji vit un drame… Il adore les chats, mais ces derniers ne le calculent pas !

Ses sœurs y étant allergiques, le lycéen n’a jamais eu la chance d’avoir eu un matou à la maison, et il n’a pas vraiment le mode d’emploi pour leur plaire...

Sa vie bascule le jour où disparaît Tamako, une charmante chatte de gouttière qu’il croisait tous les matins. Parti à sa recherche, Kensuke va faire la rencontre de Jin Nekoya, un "maître chat", qui comprend parfaitement le langage félin. Désormais, le lycéen fera tout pour devenir le disciple de Jin, quitte à accepter les défis les plus improbables, et enfin se faire aimer des chats !

Tout ça sous le regard halluciné de Yamada, une copine de lycée…




Être un amoureux des chats mais ne pas pouvoir vivre et s’occuper d’eux, c’est l’étrange drame que vit Kensuke Fuji. À défaut de pouvoir avoir un chat à lui – sa mère et ses sœurs étant allergiques – Kensuke se contente d’observer les chats des rues, les prendre en photo, étudier leur comportement, les adorer et les vénérer de loin. Jusqu’à sa rencontre avec Jin Nekoya qui va bouleverser son quotidien. Véritable maître chat, ce dernier a une relation fusionnelle avec les chats, connaît tout d’eux et il est capable de communiquer avec eux. Le rêve ultime pour Kensuke qui met tout en œuvre pour devenir le disciple de Jin Nekoya et ainsi bénéficier de son savoir pour tout comprendre des chats et se faire aimer d’eux. C’est au rythme de nombreux entraînements et péripéties que Kensuke va apprendre à comprendre le comportement des chats, leur vie sociable, leurs émotions, leurs besoins et comment y répondre.



Un manga sur les chats. Rien de bien original, me direz-vous, et il est vrai que nombreux sont les mangas mettant en vedette nos adorables boules de poils. Félin pour l’autre présente quelques particularités qui le font se démarquer quelque peu des autres mangas. Il ne s’agit pas ici d’un énième manga qui montrent les chats comme d’adorables et mignons compagnons à quatre pattes qui rendent notre vie plus drôle et plus adorable (mais attention, ce manga nous présente bel et bien les chats comme super trognon avec des scènes super adorables qui donnent le sourire aux lèvres), mais apporte également un discours pertinent et instructif sur les chats, leur comportement, leur vie sociable, comment discerner ce qu’ils veulent et ce qu’ils nous disent, comment les comprendre et comment prendre soin d’eux, qu’est-ce que leurs mimiques et expressions disent d’eux et de leur ressenti.



À travers l’expérience qu’il va se forger tout le long du manga et l’enseignement de son maître chat, Kensuke va apprendre ce que signifient les comportements félins et comment les interpréter, et c’est au final un bon enseignement pour le lecteur, même pour les heureux parents de chats, car si certains éléments nous semblent simples et évidents – lorsque l’on est habitué à vivre en compagnie féline – d’autres le seront peut-être moins. C’est très respectueux des chats, ils ne sont pas traités comme des peluches mais comme des êtres vivants qui ont besoin d’attention comme ils ont besoin de leur espace personnel, et qui ont chacun une personnalité différente.



Nos personnages sont plaisants pour la plupart. Kensuke est un protagoniste drôle et attachant et profondément respectueux des chats, c’est un véritable passionné au grand cœur, allant jusqu'à consacrer des heures voire des journées à observer les félins, comme un véritable zoologue et qui, s’il fait des erreurs dans le soin qu’il apporte aux chats, est toujours soucieux de bien faire, d’apprendre, et de respecter les chats. Jin Nekoya, le maître chat, a un design qui rappelle les héros de manga d’action, c’est une figure de sage enseignant et un véritable passionné dans ce qu’il fait. Ces deux personnages forment un duo plutôt sympathique qui fonctionne très bien. Yamada, l’amie de Kensuke, semble la plus raisonnable parmi tous ces amoureux des chats et, si elle ne partage pas la même passion folle des chats, n’est pas pour autant insensible au charme de ces boules de poil. Elle nous semble plus sensée, souvent complètement dépassée par les actions et les réflexions de son ami et des autres passionnés de chats, mais elle prend le tout avec humour. Et si cette passion la dépasse parfois, elle puisqu'elle n'hésite pas à leur prêter main forte. À noter que nos personnages félins finissent par avoir aussi leur propre voix, et c’est agréable d’avoir quelques chapitres du point de vue des félins.



Le manga possède cependant un amour qui ne peut pas forcément plaire à tout le monde, car ses personnages sont souvent haut perchés dans leur amour des chats, cela donne de nombreuses situations cocasses, originales et burlesques, parfois ridicules mais ce n’est pas vraiment négatif. C’est très haut perché et loufoque mais ça reste gentiment parodique et ça ne tourne l’amour des chats en de l’exagération ou au ridicule. Cela n’empêche pas non plus d’avoir des moments touchants, et le manga comporte six tomes au total, ce qui nous empêche de nous ennuyer ou d’éprouver de la lassitude face au schéma du manga avec son accumulation de péripéties.



Il est aussi intéressant de noter que le manga s’intéresse aussi bien aux chats des rues qu’aux chats domestiques. Parmi nos protagonistes félins, nous avons toutes sortes de chats, des chats errants aux chats de maisons, sans forcément nous présenter les chats des rues comme malheureux. Il y a des personnages et associations pour prendre soin d’eux, les nourrir, tout en leur laissant leur autonomie (certains ne parviennent pas à se faire à la vie dans un foyer, mais considèrent la rue comme leur territoire). Enfin, j’aime que ce soit des personnages masculins qui sont gagas des chats, parce que la société a tendance à montrer les femmes comme plus attirées par les chats, et les chiens pour les hommes. Ici, nous avons des personnages féminins mais davantage masculins qui sont de véritables amoureux des chats, qui les soignent, prennent plaisir à les brosser, les câliner, les embrasser, sans que ce soit tourné en ridicule ou pointé par d’autres personnages qui se moquent car ce n’est pas considéré comme viril.



Un autre aspect que j’ai beaucoup aimé est que le manga reste très positif. S’il aborde des aspects comme le soin aux chats malades ou les dangers que courent les chats des rues, ce qui est une piqûre de rappel nécessaire, le manga reste toujours dans l’humour, la légèreté. C’est très positif, garanti sans coup et blessures pour nos boules de poils ! À noter également un joli coup de crayon. C’est propre et net, avec le contraste amusant des humains dessinés de façon cartoonesque et les animaux dessinés de manière réaliste.



En résumé, Félin pour l’autre est un manga doux et mignon, feel good et hilarant mais avec plus de profondeur qu’on ne pourrait le croire au départ, avec une belle mise en avant du comportement félin. C’est à la fois instructif, plein d’action et de rebondissements. Pour les amoureux des chats (mais pas que), je recommande !


samedi 3 décembre 2022

Dark Rise - C.S. Pacat.

Une nouvelle ère de Ténèbres se profile…

L’ancien monde n’est plus. Ses héros sont morts, ses châteaux en ruine, et la bataille épique entre l’ombre et la lumière a sombré dans l’oubli. Seuls les Stewards s’en souviennent, et veillent, siècle après siècle, pour protéger l’humanité du retour du Roi obscur.

À Londres, Will est en fuite, pourchassé par les hommes qui ont tué sa mère. Lorsque Violet lui sauve la vie, tous deux se retrouve plongé dans le monde de légendes et de magie des Stewards. Alors qu’ils s’entraînent à leurs côtés, c’est dans le camp opposé que risque de se retrouver Katherine, fille de bonne famille désargentée. Car l’ombre avance ses pions… dont le plus dangereux est le vénéneux James, qui fut étroitement lié au Roi Obscur. Peu à peu les anciennes alliances se reforment, ou sont appelés à être brisées. Dans cette guerre qui menace leur monde, les descendants des combattants des deux camps n’ont d’autre choix que de jouer leur rôle… à moins que tout destin puisse être défié.


Qu’on se le dise, je n’aurais sans doute jamais posé les yeux sur Dark Rise, outre sa jolie couverture qui m’aurait au moins invité à prendre le livre pour y découvrir son résumé, si l’auteure n’avait pas été C.S. Pacat. C’est parce que j’ai beaucoup aimé Prince Captif que j’ai décidé de laisser sa chance au premier tome de sa nouvelle série.

 

L’histoire se déroule en 1821 à Londres, dans un univers dans lequel subsistent quelques reliquats d’une magie longtemps disparue après le combat épique entre un Roi maléfique et une mystérieuse Dame qui l’a jadis aimé avant d’arrêter sa folie. Will Kemper est un orphelin de 16 ans, travaillant comme simple docker lorsque, du jour au lendemain, il se retrouve à fuir des hommes menaçants cherchant à le kidnapper. Tout porte à croire que c’est lié à la mort de sa mère, assassinée pour une raison obscure. Son chemin croise celui de Violet, jeune bâtarde d’une puissante famille d’aristocrates anglais, qui lui sauve la vie. Après bien des péripéties, ils rencontrent et rejoignent les Stewarts, un ordre mystérieux qui travaille à empêcher le retour du Roi Obscur que les fidèles de ce dernier, en la personne de Simon, cherchent à orchestrer… Pour Will, c’est également un moyen de démasquer enfin les meurtriers de sa mère.

 

Si je dois être honnête, le roman ne m’a paru bien transcendant et il m’a fallu attendre la moitié du livre avant de commencer à m’intéresser à l’intrigue. Le début était sympathique mais l’histoire souffre ensuite de nombreuses longueurs, et j’avais bien été tentée de sauter quelques pages pour voir s’il allait arriver quelque chose d’intéressant.

 

Il faut dire que, contrairement à Prince Captif où l’on rentrait directement dans le vif du sujet, l’auteure a pris ici son temps pour poser son histoire, nous faire connaître les lieux et les différents personnages, pour autant je n’ai pas réussi à appréhender l’univers – qui reste assez classique et peu palpitant quand on connaît les codes du genre fantasy/fantastique – et les personnages, mis à part Violet qui a su m’intéresser dès le début… sans oublier James bien-sûr, mais j’y reviendrai. J’ai trouvé que la plupart des personnages manquaient de profondeur et peinaient à se démarquer des autres écrits du genre. Nous avons un roi puissant et maléfique, ses sbires qui jurent de le faire revenir pour qu’il puisse soumettre le monde à sa tyrannie. Nous avons un ordre de gentils « chevaliers » régit par des règles de contrôle, pureté, abstinence, etc, qui combat depuis des lunes pour empêcher ce retour. Nous avons aussi Will, le protagoniste, que l’histoire nous présente comme l’Élu destiné à combattre ce roi maléfique, qui ne possède de sa mère qu’un mystérieux médaillon, qui est le supposé descendant de la Dame, qui va rejoindre l’ordre secret auprès de qui il va s’entraîner pour devenir un combattant hors pair car il est le seul à avoir le pouvoir d’empêcher le retour du roi. Ce roman nous présente tout simplement le combat entre le bien et le mal.

 

Tout ceci paraît donc bien cliché et n’apportait rien de transcendant. Il m’a fallu attendre plus de la moitié de l’intrigue pour découvrir que C.S. Pacat se servait de ces clichés pour mieux les démanteler un à un partir de la seconde moitié du roman et c’est là où ça commençait à devenir intéressant ! Je pense notamment aux Stewarts qui finissent par révéler malgré eux les fissures de leur ordre si parfait et dont certaines actions sont beaucoup moins héroïques qu’ils n’essayent de le faire croire. Il y a également James de St Clair, le bras-droit de Simon, son impitoyable fidèle qui n’est pas un simple antagoniste. Il n’est ni blanc, ni noir, et certaines de ses motivations nous sont révélées, nous apportant plus de profondeur au personnage et plus de sympathie [spoiler] il n’agit au final que pour son intérêt dans le sens où il ne souhaite plus être contrôlé, récupérer le collier pour ne plus être privé de son libre arbitre et choisi de suivre Will par loyauté et non parce qu’il y est forcé [/spoiler]. Et, enfin, il y a Will. Il est l’exemple principal de C.S. Pacat qui détruit les clichés de la fantasy/fantastique, avec un plot twist des plus inattendus [spoiler] à savoir qu’il n’est pas l’élu, mais la réincarnation du Roi Obscur et il a utilisé ces pouvoirs vers la fin du roman, a fait verser le sang. Cela ne fait pas subitement de lui un antagoniste, on ignore encore s’il change réellement de camp, comment cette découverte va bouleverser le personnage et l’intrigue mais en tout cas j’ai hâte de le découvrir [/spoiler]

 

On a donc un vrai décalage entre les deux moitiés du roman et je pense que la première partie me semblerait bien meilleure maintenant en sachant ce qu’il se passe par la suite. Car la lecture de la première moitié de roman fut vraiment laborieuse, ce qui est dommage car, si on passe au-delà de cela, l’univers construit est prometteur, avec une atmosphère assez sombre, une mythologie intéressante et des personnages et relations qui ne demandent qu’à être développés. Malgré les clichés que l’histoire présente, celle-ci se révèle comme bien plus compliquée que cela. Elle repose sur la fatalité. Il est question de réincarnation. De ce fait, le personnage réincarné est-il condamné à répéter l’histoire ou, au contraire, peut-il prendre la main sur sa vie et se forger soi-même sa propre destiné ? Peut-il se libérer des entraves du passé et construire son présent ? Le but de l’intrigue, finalement, est de savoir si le passé est condamné à se répéter ou si on a un choix, si la perception du passé colle bien avec ce qu’il s’est produit, et ainsi de suite. Il y a un personnage principal qui est concerné, et je suis vraiment curieuse de voir ce que C.S. Pacat va faire de ce personnage, mais aussi sur l’autre personnage à m’avoir intrigué dès le début.



Je parle de James St Clair. Il se présente comme l’un des antagonistes, pourtant Will ressent un lien auprès de ce jeune homme qui lui est pourtant inconnu. Il va ressentir de l’intérêt pour James, de l’empathie également et n’est-ce-pas ce que les lecteurs ressentent pour ce personnage ? S’il se dévoile un peu dans ce roman, James reste énigmatique et on finit par découvrir chez lui une volonté d’échapper aux entraves du passé, ne plus être manipulé ou privé de sa volonté mais bien de décider de lui-même de sa propre destiné. Sur la fin, on découvre à qui va sa loyauté, davantage par conviction que par contrainte ou par intérêt. Je suis vraiment curieuse de voir ce que l’auteure nous réserve pour James et comment elle va développer la relation entre Will et James (certains personnages sont LGBTQ+, nous réserve-t-elle une romance entre Will et James ? Affaire à suivre !)

 

En résumé, c’est un roman prometteur malgré une première moitié lente et peu transcendante avec moult clichés, mais Dark Rise présente des éléments prometteurs et intéressants qui compensent la frustration dans laquelle m’a laissé la première partie du roman. Après tout, je n’avais pas été emballée par le premier tome de Prince Captif, mais je lui avais laissé sa chance car j’avais aimé certains éléments de l’intrigue et aussi – mais surtout – le personnage de Laurent… à l’instar d’un autre blondinet arrogant, James.



Si je trouve dommage qu’il y ait un tel décalage entre les deux moitiés du roman, je lirai la suite de cette série, car la seconde partie du roman était bien plus intéressante que la première, et que les dernières informations me donnent envie de voir la façon dont C.S. Pacat va pouvoir développer la suite de son histoire, d’autant plus que sa plume a beaucoup mûri depuis Prince Captif, elle apporte un soin particulier aux descriptions.


Le son nonchalant des talons de bottes vernies foulant les pavés. Un pas après l'autre, James sortit de la pénombre, et le pouls de Will s'emballa. Son adversaire portait une tenue de soirée à la coupe exquise. Tout s'estompa autour de Will, le monde devint insignifiant, James étant désormais le seul être réel à l'habiter. Toi, toi, toi. La beauté extraordinaire de James était un spectacle douloureux - comme un couteau qui le poignardait.