Avec
sa jolie couverture originale, à la façon d’un vieux livre en
cuivre abîmé, et l’ambiance promise par ce roman, l’histoire
avait tout pour me plaire… L’histoire de Joseph Delaney sent bon
le récit fantastique et horrifique,
en s’adressant aussi bien aux jeunes lecteurs qu’aux plus vieux
avec un récit qui sent bon le fantastique d’horreur. C’est un
livre parfait pour la période automne/Halloween, bien qu’il se
consomme à toute saison !
Thomas J. Ward est le septième fils d’un septième fils qui a grandi toute
sa vie dans la ferme familiale. Cette simple particularité fait
pourtant de lui quelqu’un d’exceptionnel. En effet, les septièmes
fils d’un septième fils ont le don de voir et entendre des choses
dont ne sont pas conscients les autres personnes, comme la présence
de l’obscur. Ils ont la capacité de voir les esprits tourmentés
et ressentir leur tourment et ils ont souvent la charge qui est celle
d’être un épouvanteur. Celui qui traque l’obscur, qui chasse
gobelins, sorcières et autres créatures de l’obscur, et de
débarrasser leur monde de cette menace. C’est pourquoi, l’année
de ses treize ans, un homme étrange vient se présenter à la ferme
des Ward, John Grégory, épouvanteur en quête d’un apprenti. Sous la tutelle de cet étrange maître, Tom doit passer un essai d’un
mois afin de voir si le travail d’épouvateur est fait pour lui,
s’il convient à Grégory et s’il accepte ce lourd fardeau.
Car,
en effet, bien que leur travail soit essentiel, de par leur travail
dangereux et inquiétant ainsi que la réputation que cela leur
donne, les épouvanteurs sont craints, voire même des pestiférés.
C’est un travail permanent, difficile, éprouvant et dangereux qui
attend Tom, qui apprend alors de son maître tout ce qu’il y a à
savoir sur les créatures de l’obscur et comment les vaincre. Et il
est bien dur de suivre la cadence, retenir tous les enseignements de
son maître et de calmer ses peurs et ses doutes, car c’est de tous
ces sentiments négatifs sont les spectres et autres créatures se
nourrissent…
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Tom J. Ward et l'Epouvanteur, John Grégory (de Di Weird) |
Tom
suit ses enseignements tant bien que mal et
peine à satisfaire un maître qui est peu démonstratif. Tout semble
plutôt se passer convenablement, Tom ayant réussi les premières
épreuves de son maître… jusqu’au moment où ce dernier doit
s’absenter pour affaire. Tom enfreint alors la promesse qu’il lui
avait faite : ne jamais faire confiance aux filles portant des
souliers crochus. Pourtant, suite à une situation délicate, Alice Dean, une
jeune fille aux cheveux noirs et aux souliers pointus lui sauve la
mise, en échange de son aide. Celle de donner chaque soir un gâteau
à la vieille sorcière, Mère Malkin, que l’Epouvanteur a entravé
dans un puits profond depuis des années dans son jardin. Tom hésite
car Mère Malkin est une sorcière fort redoutable dont Grégory a
formellement interdit à Tom de s’approcher de sa prison, mais il a
fait une promesse à Alice… et quel mal un simple gâteau peut-il
faire à une vieille femme affaiblie et enfermée depuis des lunes ?
Tom s’exécute à contre cœur… mais s’aperçoit bien vite que
quelque chose cloche dans ces gâteaux, car la vieille sorcière
semble reprendre des forces… et parvient à s’enfuir. Tom doit
donc réparer les dégâts avant que Mère Malkin ne sème le chaos,
avant le retour de son maître… mais que peut-il faire face à une
sorcière dangereuse qui tire sa force dans le sang de ses victimes,
lui qui n’est qu’un tout jeune apprenti, ayant à peine débuté
son apprentissage…
C'est
un roman qui mélange jeunesse et épouvante, un
mélange plutôt risqué mais
l'auteur s’en est sorti à
merveille. Joseph Delaney maîtrise avec brio l’épouvante tout en
gardant un ton jeunesse au roman. Il
offre un aspect presque gothique,
avec un cadre qui se prête à
merveille à l’histoire. Les campagnes anglaises sombres, humides
et brumeuses. Une société
médiévale. L’obscurité
menaçante. Des lieux hantés. Des nuits fraîches et angoissante où
chaque ombre, chaque bruissement de feuille peut faire frissonner.
J’ai
beaucoup aimé l’originalité qui se découle des septièmes fils
d’un septième fils, les dons et les particularités qu’ils
possèdent, le rôle d'épouvanteur et ce qui en découle. Tom a
les capacités de voir ce que d’autres ne peuvent pas voir, de
ressentir l’obscur. Grâce à des armes et à un long enseignement,
il peut devenir épouvanteur, un rôle essentiel mais souvent ingrat
tant ils sont craints et repoussés par la société, malgré ce
qu’ils leur apportent. Une triste réalité que Tom va découvrir
au long du roman. Lui, si proche de sa famille, se rend compte que
cette dernière, malgré tout son attachement pour Tom, craint pour
lui, pour ce qu’il est, et ce qui est susceptible de le suivre…
Heureusement,
Tom a des alliés. Tout d’abord, son maître, enveloppé de
mystères qui ne demandent qu’à être dévoilés le long de la
série. S’il semble difficile à plaire et qu’il est parfois dur,
c’est un allié solide pour Tom et, qui sait, peut-être ce lien
maître-apprenti pourra-t-il se transformer en amitié et va se
solidifier au fil des tomes. C’est une figure efficace de mentor
fort et sage, sévère, mystérieux, érudit que j'aime beaucoup.
Ensuite, la mère de Tom, qui a elle-aussi sa part de mystère. On
devine qu’elle est plus que ce qu’elle semble être. Peut-être
n’est-elle pas humaine. On sait qu’elle aime son fils, Tom est
celui qui lui ressemble le plus, et elle l’a mise au monde dans un
but très spécial. Il n’a pas été conçu au hasard et on sent
bien qu’elle a de grands projets pour lui, qu’elle s’attend à
ce qu’il ait une vie longue, difficile mais exceptionnelle.
N’oublions pas non plus Alice qui, malgré son rôle flou et voire
plutôt gris dans l’intrigue, est une petite fort intrigante qui a
beaucoup de potentiel. On sent que sa voie n’est pas tout à fait
tracée et que son chemin est voué à recroiser celui de Tom et que,
déjà, un lien pas comme les autres se forme entre eux, malgré la
méfiance de Grégory face à Alice.
Quand
à Tom, s’il ne m’a pas laissé une forte impression comparé aux
autres personnages, c’est un protagoniste plaisant à suivre et
auquel il est facile de s’identifier.
Il doute, prend peur, hésite mais
il a un sens du devoir assez précoce, il sait braver ses peurs et
faire preuve de courage et de loyauté. Il fait des erreurs, mais
essaye de les réparer. Ce garçon a du potentiel et je serais
curieuse de voir son évolution et comment le personnage va
s’approfondir.
Fantômes,
sorcières, gobelins, l’univers de Joseph Delaney se dévoile
encore timidement dans ce premier volume mais on apprend aux côtés
de Tom et on boit les enseignements de l’Épouvanteur. On découvre
donc en douceur mais j’ai quand même été charmée dès le début
: l’ambiance tient plus de la terreur que du féerique, mettant en
scène beaucoup de passages sombres.
Autre
chose que j'aime beaucoup : ce roman a beau reprendre le même schéma
que la plupart des romans jeunesses (un personnage avec des pouvoirs
qui suit un parcours initiatique, étudie à l'école spécialisée
ou avec un mentor, qui était discret au début mais devient plus
affirmé et téméraire), je trouve qu'il diffère
des autres livres jeunesse fantasy, il est original par l'histoire.
C'est un univers sombre, effrayant, inquiétant avec une atmosphère
oppressante, on reste sur le qui-vive, persuadé que quelque chose va
tomber sur le personnage a tout moment. L'écriture est fluide,
rythmée, je n'ai pas eu le temps de m'ennuyer
tant le récit regorge de
rebondissements !
Je
suis très encouragée à lire la suite car la magie a bel et bien
opéré sur moi, séduite par cette ambiance halloweenesque, à la
fois jeunesse et sinistre.
-
Nous sommes l'un et l'autre le septième fils d'un septième fils, et nous avons
le don de voir ce que les autres ne voient pas. Ce don est parfois une
malédiction. Si nous avons peur, certains êtres se nourriront de cette peur
; notre peur les rend plus forts. Le seul moyen de leur tenir tête, c'est de te
concentrer sur ce que tu vois et de cesser de penser à toi. C'est toujours
efficace.
2. En
chemin.