lundi 10 juillet 2023

Le Roman de la Momie - Théophile Gautier.


Pharaon aime Tahoser qui aime Poëri. C'est à son retour d'Éthiopie que Pharaon porte un regard chargé de volupté sur la fille du grand prêtre. Lui qui rentre couvert de gloire, lui qui n'a plus rien à désirer du monde, roi, presque Dieu, se sent soudain esclave de la jeune Égyptienne. 

Mais Tahoser, merveille de beauté et de grâce, se languit d'un jeune homme aux prunelles sombres qu'elle a entrevu sur la terrasse luxuriante d'une maison. Aussi n'hésite-t-elle pas à se dépouiller de toute sa splendeur pour conquérir le cœur de Poëri l'exilé, l'Hébreu... 

Fastueuse histoire d'amour qu'un jeune lord anglais découvre dans le papyrus d'une tombe inviolée de la vallée des Rois. Ci-gît, avec encore toute l'apparence de la vie, une jeune femme morte depuis plus de trente siècle.



Décidément, entre la momie d’Anne Rice et celle de Théophile Gautier, les momies ne sont pas l’unanimité chez moi !


Le roman avait pourtant tous les ingrédients à sa disposition pour me plaire. Le cadre de l’Égypte antique, le mystère autour de la vie d’une momie qui se dévoile peu à peu, des références bibliques.


Au final, ce fut une victoire que de parvenir à achever ce roman. J’ai eu beaucoup de mal à avancer, ce n’est qu’à partir de la page 160 de mon édition que je suis parvenue à véritablement entrer dans l’histoire et me laisser entraîner par elle. J’attendais désespérément que quelque chose se produise, histoire de ne pas finir assommée par tant de descriptions, un point qui m’a d’ailleurs surpris car je n’avais pas eu cette impression avec La Morte Amoureuse. À croire que l’auteur a amassé tout ce qu’il pouvait en connaissances sur l’Égypte antique (ses monuments, les vêtements, chaussures, bijoux, etc) pour en tartiner son roman et faire ainsi rêver ses contemporains.


Les premières pages nous plongent en plein milieu du XIXe siècle. Un jeune aristocrate anglais, Lord Evandale, et un égyptologue allemand, le docteur Rumphius, explorent une tombe inviolée grâce à l'aide d'un escroc grec dénommé Argyropoulos. Ils y découvrent le sarcophage d’un pharaon mais, lorsqu’ils l’ouvrent, ils découvrent non pas le pharaon reposant pour l’éternité mais la momie parfaitement bien conservée d’une jeune femme de grande beauté. Près de la momie, un papyrus que le Dr Rumphius va déchiffrer, révélant les secrets de l’histoire de cette mystérieuse jeune femme, Tahoser.


L’écriture est indéniablement belle, riche, esthétique mais le récit est vraiment noyé par de trop nombreuses descriptions et de phrases longues. L’auteur est vraiment très perfectionniste et minutieux dans son écriture, rien n’échappe à sa plume. Tout est décrit dans les moindres détails. Le pharaon entre dans une pièce ? Description de A à Z de la pièce, son décor, description du physique, des bijoux et des vêtements des danseuses ou des serviteurs et, ce, sur plusieurs pages. L’héroïne va d’un point A à un point B ? Longues descriptions des lieux qu’elle traverse. Bref, le récit est trop descriptif à mon goût et si je reconnais toute la beauté et la richesse de l’écriture, l’avancée dans le récit fut vraiment très laborieuse, surtout pendant la première moitié du roman.



Le démaillotage de la momie de Tahoser, par Alex Lunois (1901)
35 siècles après et pas une seule ride !

Ce n’est que lorsque Tahoser décide de fuir son palais pour aller à la rencontre de Poëri que le récit prend une autre dimension. Si l’auteur reste toujours dans la description, l’action commence à s’installer de plus en plus avec la tension amoureuse entre Tahoser, Pharaon et Poëri, et que les références bibliques n’apparaissent à travers l’histoire de Moïse.


Pourtant, le paradoxe est que j’ai été à la fois assommée par les nombreuses descriptions mais qu’elle a su me charmer à certains moments. On ne peut nier la volonté de l’auteur de nous transporter ailleurs le temps de son récit, de nous faire rêver et voyager, de nous présenter une Égypte antique aussi fidèle possible et aussi vraie que nature. Si l’omniprésence et la longueur des descriptions a eu raison du charme qui avait opéré chez moi, je ne peux nier que l’auteur a réussi malgré tout. Si j’ai achevé le roman, l’Égypte antique demeure présente dans mes pensées et je ne demande qu’à replonger dans un autre ouvrage sur cette fascinante époque. Vous comprenez pourquoi je parle de paradoxe ?


Le roman de la momie n’est pas qu’un condensé de descriptions sur l’Égypte antique. Il y a de la romance et de la tragédie à la clé ! Courant romantique oblige, on découvre la thématique du triangle amoureux. Tahoser, fille d’un grand prêtre d’Égypte, n’a que seize ans lorsqu’elle tombe amoureuse d’un homme plus âgé qu’elle : Poëri. Or, ce dernier n’appartient pas à la même classe sociale et au même peuple qu’elle car Tahoser est Égyptienne et Poëri est Juif. Autre obstacle, il aime Ra’hel d’un amour partagé. Alors que Tahoser se languit de son aimé, désespérant qu’il la remarque un jour, elle est remarquée elle-même, sans le savoir, par le pharaon qui n’aura de cesse de la faire chercher dans toute l’Égypte.


Les personnages sont efficaces sans pour autant être mémorables. Pharaon est un poil obsédé et colérique, mais beau parleur tout de même, avouons-le. Tahoser est plutôt moderne pour son époque. Elle ne reste pas dans l’inaction et cherche à prendre en main son destin et de la faire avancer, elle essaye de changer sa vie. Même lorsqu’elle se soumet au désir de pharaon, elle n’est forcée en rien et il attend patiemment son amour. Ce n’est lorsque pharaon se dévoile davantage comme humain que comme divinité vivante qu’elle commence à l’aimer. Le récit n’en demeure pas moins tragique pour autant. Ra’hel a une personnalité assez attachante et Poëri remplit bien son rôle.


Le récit biblique s’incorpore bien à l’histoire égyptienne et nous (re)découvrons à travers Tahoser l’histoire de Moïse, les plaies d’Égypte et l’exode des Juifs hors d’Égypte et peu à peu les morceaux se recollent concernant l’histoire de Tahoser par rapport à ce que nous avons découvert au début du roman.


Le roman de la momie est un classique dont la lecture fut laborieuse, toutefois je suis finalement contente de l’avoir découvert. Si l’auteur est très pointilleux dans son récit, nous offrant des descriptions à n’en plus finir, il est malgré tout parvenu à me faire voyager et à m’entraîner dans l’histoire, bien que ce fut long à démarrer !


« – Et si j’en aimais un autre ?”

Pharaon mordit violemment sa lèvre inférieure ; puis il se calma et dit d’une voix lente et profonde :

“Quand tu auras vécu dans ce palais, au milieu de ce splendeurs, entourée de l’atmosphère de mon amour, tu oublieras tout. Ta vie passée semblera un rêve ; la femme aimée d’un roi ne se souvient plus des hommes. Va, viens, accoutume-toi, commande, fais, défais ; je te donne l’Égypte. Si le monde ne te suffit pas, je conquerrai des planètes, je détrônerai les dieux. Tu es celle que j’aime. Tahoser, la fille de Pétamounoph, n’existe plus.” »

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