dimanche 25 février 2024

Les sœurs hiver - Jolan Bertrand et Tristan Gion.


Il y a très longtemps, il y avait deux hivers : la Grande, avec ses froids polaires et ses blizzards, et la Petite, avec ses glissades joyeuses et ses batailles de boules de neige. Mais depuis que la Petite a disparu, tout est détraqué au village de Brume ! 

Les adultes sont inquiets, plus personne ne rit aux bonnes farces d'Alfred et, surtout, les trolls passent leur temps à voler des objets, qu'ils emportent à tout jamais dans la taïga. 

Lorsque l'oncle d'Alfred se porte volontaire pour rapporter les objets volés et qu'il disparait sous ses yeux, avalé par la tempête, c'en est trop : il faut partir à sa recherche, coûte que coûte, braver les dangers de la forêt boréale, et affronter la Grande Hiver...




Je n’attendais pas grand-chose de ce roman jeunesse, outre de passer un moment de divertissement. Au final, c’est un mini coup de cœur que j’ai eu avec ce joli petit roman hivernal qui mêle aventure, nature, mythologie nordique, magie et inclusivité.


C’est un roman court qui se dévore en une journée, agrémenté par les magnifiques illustrations de Tristan Gion qu’on dévore en même temps que les mots de Jolan Bertrand. Férue de mythologie, je n’ai pas été insensible à la place de choix que s’offre la mythologie nordique, surtout en la présence de Loki, divinité du panthéon nordique que j’affectionne énormément. Forcément, cet aspect a été mon préféré du roman, mais celui-ci regorge d’autres éléments tout aussi plaisants et même envoûtants. J’ai trouvé ingénieux que l’auteur nous présente l’Hiver à travers deux figures différentes mais complémentaires, deux sœurs représentant un aspect différent de l’hiver, mais qui sont inséparables. J’ai aimé l’intrigue autour de la disparition de la Petite Hiver et comment notre jeune héro, Alfred, se met en quête de la retrouver pour apaiser la colère de la Grande Hiver et que son oncle lui soit rendu et que son village ne soit plus victime des hivers rudes et des trolls leur volant leurs affaires.



J’ai beaucoup aimé le personnage d’Alfred, son esprit d’aventure couplé à son côté farceur, mais aussi son attachement à son oncle Agnar, ses moments de mélancolie qu’il a parfois. C’est un petit garçon facétieux et attachant que l’on suit avec plaisir au gré de ses aventures, et parfois même mésaventures, dans lesquelles il n’y a pas de temps mort, où l’on rencontre trolls, renard parlant et sournois, les sœurs Hiver, le tout dans un décor forestier et hivernal, dans un univers scandinave empreint de magie, avec des notions sur le peuple viking et le peuple sami, ce qui nous dépayse le temps de la lecture. J’ai aimé découvrir des personnages tels que les sœurs Hiver, la grand-mère, l’oncle Agnar mais aussi et surtout Loki. J’ai d’ailleurs été agréablement surprise de la façon dont l’auteur a choisi de l’écrire et de le représenter [spoiler] divinité connue pour ses farces tantôt drôles, tantôt cruelles, il n’est pourtant ici ni blanc ni noir. Il a ses tords, et a causé bien du mal et du souci à nos personnages mais il nous est dévoilé comme un dieu avec lequel on sent qu’on peut s’amuser, un dieu qui souffre de solitude, qui n’est pas accepté par les autres dieux mais n’ose avouer que cela l’affecte, ainsi il recherche l’affection ailleurs, sans toutefois s’y prendre correctement [/spoiler]



J’ai été agréablement surprise de l’inclusivité (c’est rare dans les romans jeunesse, je trouve) à travers l’oncle d’Alfred, le dieu Loki bien évidemment qui est genderfluid, ou encore les trolls qui ne sont ni l’un ni l’autre et qui emploient les pronoms ul/uls, et la société dans laquelle évolue Alfred nous semble bienveillante et tolérante.



Les sœurs Hiver est un joli petit roman empreint de poésie et de magie, qui aborde aussi bien les thèmes de la famille, l’amitié, le réconfort que l’on s’apporte que des thèmes plus durs comme la solitude et la dépression avec beaucoup de justesse et de naturel. Ajoutons à cela l’aspect visuel à travers l’objet livre mais aussi les magnifiques illustrations qui accompagnent notre lecture. C'est doux, frais, touchant. Un régal pour les yeux !


– En quoi des bûches peuvent réconforter qui que ce soit ?

Cheveux Violets le regarde d’un air très sérieux.

– Ne te réconfortent-elles pas, Alfred, lorsque ton oncle et ta grand-mère en apportent chez toi pour alimenter le feu ? Ce ne sont pas les bûches en elles-mêmes qui sont réconfortantes. C’est ce que vous en faites, vous, les humains. Les bûches vous permettent d’avoir chaud. Vous vous rassemblez autour du feu pour être ensemble et raconter des histoires. Les bûches vous rendent heureux. C’est cela que nous cherchons lorsque nous venons en voler dans vos réserves, nous, les trolls. Vous brûlez les bûches pour leur chaleur. Nous les collectons pour la joie et le réconfort qu’elles vous apportent. Après tout, ajoute Cheveux Violets avec un petit soupir, nous ne sommes que des cailloux. Les émotions, ce n’est pas notre fort.

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