Qui aurait cru que lire Stephen King pourrait donner envie d'aller dans une fête foraine ou dans un parc d'attraction, sans y trouver de clown terrifiant (ceux-là sont dans les égouts…)
Son année scolaire
terminée, Devin Jones, 21 ans, aspirant écrivain mais pas devin
(oui avouons-le, c'est un jeu de mot terrible), cherche un job d'été.
Alors qu'il prévoyait de rester auprès de Wendy, sa petite-amie,
celle-ci le lâche pour aller travailler au loin avec son amie. C'est
le cœur brisé et la tête remplie d'incertitudes que Devin postule
chez Joyland, un parc d'attraction près de la côte, mêlant son
quotidien à celui des forains, apprenant leur dialecte, vendant du
rêve aux enfants sous le costume de la mascotte, et découvrant le
mystère qui entoure la maison de l'horreur, cette attraction où une
jeune femme a trouvé la mort…
Point d'horreur
dans ce roman. Ici, le maître incontesté de l'horreur nous offre
une histoire dans laquelle se mêlent nostalgie, un brin de
fantastique, une petite intrigue policière mais surtout la tranche
de vie d'un jeune homme qui va vivre des expériences qui vont lui
apprendre à grandir, à mûrir. Ce n'est pas exactement un policier,
l'enquête arrivant assez tardivement dans l'intrigue. C'est
davantage un roman d'apprentissage rempli de nostalgie avec des
pointes de mystère. Ajoutons à cela quelques notes d'humour avec,
notamment, des personnages qui n'ont pas peur des répliques drôles
ou sarcastiques.
J'ai
aimé cette atmosphère de fête foraine avec ses forains et la
parlure (langage forain inventé par l'auteur), les coulisses d'un
parc d'attraction, ses manèges, ses visiteurs, comment les forains
vendent du rêve aux visiteurs. C'est l'odeur des hot dogs et des
barbes à papa, ce sont les cris des enfants, la musique des
attractions. On baigne dans cet univers comme un poisson dans l'eau
grâce aux descriptions plus vraies que nature.
Les
personnages sont émouvants, on ressent pour eux beaucoup de
tendresse. Je pense notamment au jeune Mike et sa maman, bien que
Devin ne soit pas en reste. Ils sont terriblement humains et
touchants. On retrouve bien-sûr l'aspirant écrivain qui mène
l'enquête et l'enfant doté d'un pouvoir psychique, des figures
fréquentes dans les romans du maître King. J'ai aimé la dynamique
entre ces trois personnages et, malgré la méfiance compréhensive
et initiale de la mère, les voir s'attacher et former un trio
attachant. Le sort de Mike ne peut que nous toucher et la fin est un
déchirement. Il y a un sentiment assez bittersweet dans cette fin,
et on aurait voulu qu'ils restent ensembles tous les trois.
Il
se dégage donc de cette histoire beaucoup de nostalgie (le fait que
Devin raconte cette histoire des années plus tard ne fait que
renforcer ce sentiment), d'insouciance, de légèreté mais avec les
drames de la vie (la séparation, la mort, les illusions...). De la
douceur dans ces souvenirs et le côté thriller/policier apporte une
petite touche amère mais non désagréable. La présence d'une
enquête relevée par un soupçon de surnaturel vient émoustiller la
lecture. Si je regrette que l'enquête ne prenne finalement pas une
grande place, je reconnais que ce n'est pas le but premier du roman
et, bien qu'elle ne fasse pas frissonner [spoiler] sauf la fin où Devin est
confronté au meurtrier et la fin sanglante de l'assassin [/spoiler], cette enquête est assez intéressante pour
qu'on veuille découvrir le fin mot de l'histoire... Est-ce
simplement une histoire de meurtre dans une attraction, ou est-ce lié
à quelque chose de plus profond, de plus sinistre ?
Ce
n'est pas un roman mémorable mais j'ai passé un bon moment de
lecture. J'ai aimé ce mélange de policier et de roman initiatique,
une enquête surnaturelle qui se mêle à des tranches de vie, les
premières blessures de l'amour, l'innocence, l'intuition qui aide
parfois à jeter ses pas plus facilement dans l'inconnu, la
nostalgie, le souvenir d'un été qui bouleverse une vie, des
expériences qui nous métamorphosent et nous aident à grandir...
Mon père m’avait appris – surtout par l’exemple – que pour se rendre maître de sa vie, un homme doit d’abord se rendre maître de ses problèmes.
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