Je débarque après la tempête ! Eh oui, il a fallu que Netflix adapte cette série de comics pour que je m'y intéresse enfin ! Pourtant, si je n'avais pas décidé de tromper l'ennui en regardant cette série, jamais je ne me serais intéressée à Heartstopper. Bien mal m'en a pris !
Les
romances au lycée, c'est du vu, vu et revu ! On ne sait plus les
compter ! Une romance homosexuelle au lycée, c'est déjà un peu
moins fréquent, même si on retrouve le cliché du garçon populaire
et sportif du lycée et de l'autre garçon plus discret et un peu un
paria. J'admets que ce sont ces clichés qui m'ont apporté des
réticences à lire ces comics, avant l'adaptation Netflix. Pourtant,
la formule fonctionne et c'est une véritable lecture doudou que nous
offre Alice Oseman.
Les
personnages sont aussi attachants les uns que les autres. Charlie,
homosexuel qui a été "outé" malgré lui et qui a subi du
harcèlement à cause de sa différence, introverti, manquant de
confiance en lui, qui a tendance à trop s'excuser et à trop
réfléchir et ressasser. Nick, véritable golden retriever
humain, sportif, amical, bienveillant et ouvert d'esprit. Voisins de
table, ils vont peu à peu se découvrir en passant du temps
ensemble, d'abord en classe puis en dehors de l'école alors que se
tissent des liens d'amitié. L'auteure prend vraiment le temps de
construire leur histoire : ils passent du temps ensemble, s'envoient
SMS sur SMS, s'amusent, s'entraident, se dévoilent l'un à l'autre.
Charlie finit par tomber amoureux mais préfère taire cet
amour pour ne pas gâcher son amitié avec Nick. Ce dernier
réalise progressivement qu'il ressent une attirance pour Charlie
qui va au-delà de l'amitié, mais ne sait comment gérer ses
sentiments, lui qui s'est toujours cru hétérosexuel.
Si Charlie n'a aucun doute sur ce qu'il ressent pour Nick et qu'il est entouré d'une famille et d'amis qui sont conscients de son orientation, avec bienveillance, ce n'est pas le cas pour Nick qui s'interroge sur ses sentiments et qui, s'il accepte ses sentiments pour Charlie, est un peu plus dans le flou. Il se s'y retrouve pas. Quelle est son orientation ? Quel mot mettre sur ce qu'il est ? Où chercher ? À qui demander ? Vers qui se tourner ? Peut-il se confier à ses amis et sa famille, comprendront-ils ? Des questions légitimes qui chamboulent Nick. J'ai beaucoup aimé suivre ce questionnement, il est amené avec beaucoup de délicatesse et cela démontre bien l'importance de découvrir son identité, s'éduquer, en parler... J'espère que cela pourra aider adolescents comme adultes concernés par le sujet.
Outre
la romance, c'est une relation très positive qui se noue et qui va
apporter du soutien et du positif dans la vie de l'autre. Nick est
une solide épaule sur laquelle Charlie peut se reposer face
au harcèlement, notamment, et fait comprendre à Charlie
qu'il ne faut pas toujours s'excuser automatiquement et qu'il n'a pas
à trouver "normal" ou "banal" son harcèlement,
qu'il n'a pas à s'y faire car ce n'est pas normal. Charlie
est une présence rassurante et compréhensive pour Nick alors qu'il
se cherche, lui laissant le temps de se découvrir et d'annoncer
petit à petit son orientation à son entourage.
L'histoire s'accompagne d'autres personnages : Tara en couple avec la pétillante Darcy, Tao l'ami de Charlie qui est très protecteur avec lui et tout d'abord méfiant vis-à-vis de Nick, Elle qui est l'amie de Tao et de Charlie et qui a été transférée dans une école pour filles après sa transition de genre. La famille des protagonistes ne sont pas non plus en reste. Au fil de la série, le cercle des personnages s'élargit, diversifiant le récit. Certaines personnes parleront de personnages clichés, je trouve que c'est plutôt nuancé avec Nick qui s'éloigne de l'image habituelle que l'on se fait des sportifs, ou encore Charlie, malgré son côté geek et son corps chétif, va s'avérer bon en rugby.
Heartstopper
aborde aussi des questionnements importants sur l'amour, l'amitié,
les relations enfants/parents, l'acceptation de soi mais aussi de sa
sexualité, la difficulté du coming out, le harcèlement
scolaire. Il véhicule des messages importants sur l'estime de soi,
la tolérance, l'ouverture d'esprit, mais aussi et surtout le fait
que l'amour ne sauve pas. On ne peut pas toujours aider ceux qu'on
aime car ce n'est pas forcément le rôle du partenaire (il faut
s'adresser à la famille, ou à un professionnel) mais qu'on peut
être présent dans les bons comme dans les mauvais moments, et
prêter une oreille attentive.
La série évoque aussi
les troubles alimentaires, la mutilation, l'aide psychologique et...
c'est là où ça a coincé. Alors que j'étais enchantée par les
trois premiers tomes, je dois avouer que le quatrième est celui que
je préfère le moins... Je dois être l'une des rares d'ailleurs !
Bien qu'il est important d'aborder ces thèmes et de quelles façons
on peut demander de l'aide, j'ai trouvé que cela plombait et
noircissait le récit. Certes, Heartstopper abordait au départ
des thèmes comme le harcèlement, la peur du regard des autres et la
difficulté du coming out, mais cela n'altérait en rien la
douceur, la légèreté et l'optimisme du récit. Ici, le quatrième
tome se penche trop sur les problèmes de santé mentale de Charlie,
au détriment du récit qui, s'il reste tendre et optimiste, donne au
récit une touche bien amère. Ça brise vraiment le schéma habituel
de Heartstopper. Pour le mieux, diront la plupart des
lecteurs. Je ne suis malheureusement pas de cet avis. La BD qui a
toujours été légère, mignonne, réconfortante... bref, une
lecture cocooning... s'est assombrie dans ce tome. Or, quand je lis
Heartstopper, c'est pour trouver quelque chose de léger, de
chaleureux, d'optimiste, et j'ai moins eu cette impression. Oui,
c'est important d'en parler mais il y a déjà bien assez de drame et
de tragédie dans les fictions Young Adult.
Un
autre point à m'avoir chagriné est que, même si l'histoire se
centre sur Charlie et Nick, c'est davantage l'histoire
de Charlie qui est mise en avant, surtout dans le tome quatre.
Alors certes, son histoire est importante, d'autant plus que c'est le
personnage qui souffre le plus de ses problèmes, mais j'ai regretté
de voir Nick autant passer en retrait, car lui-aussi a des
choses à raconter, lui-aussi a ses difficultés (un père quasi
absent, un frère qui le rabaisse sans cesse) mais tout ceci est
traité bien trop vite. Idem pour les autres personnages qui méritent
d'être un peu plus mis en lumière.
Image tirée de la série |
Néanmoins,
Heartstopper est une lecture qui fait du bien au moral, avec
des personnages attachants, un trait doux et aéré, une histoire
simple, loin des affres et de la violence de ce monde (même s'ils
vivent des désagréments). C'est une histoire très emprunte de
modernité, avec l'omniprésence des téléphones portables, nos
personnages s'envoyant une vague de SMS lorsqu'ils ne sont pas
ensembles, la présence du langage d'internet, différentes fictions,
etc.
C'est
également une lecture qui parle et nous interroge, abordant des
sujets souvent épineux de cette période compliquée qu'est
l'adolescence où des milliers de questions envahissent l'esprit.
C'est une bonne représentation LGBT pour les jeunes comme pour les
adultes qui cherchent à comprendre leur sexualité et pour
l'acceptation des autres. Il n'y a rien de vulgaire, ni de sexuel.
C'est à la fois attachant et optimiste, malgré les thèmes parfois
compliqués qui sont abordés.
En
bref, Heartstopper est un bonbon de tolérance et de
modernité. Une bande-dessinée tendre qui fait beaucoup de bien.
C'est beau, c'est touchant, ça fait du bien. Un bijou de tendresse
et d'émotion.
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