mercredi 13 septembre 2023

Mémoire de maîtres, paroles d'élèves - Jean-Pierre Guéno.


Radio France a invité ses auditeurs à prendre la plume pour tracer le souvenir d'un élève ou d'un professeur qui a marqué leur vie. plus de deux mille personnes ont répondu à l'appel.


Ce recueil n'a pas la prétention de résumer l'univers de l'école, mais les lettres qui le composent, souvent drôles, parfois poignantes, brossent un étonnant portait de famille dans lequel chacune se reconnaîtra.




Un recueil qui nous évoque le bruit de la craie sur le tableau, l’odeur de la colle Cléopâtre ou des cahiers neufs, la sonnerie qui annonce le début ou la fin d’un cours, la plume qui gratte le papier.



Mémoires de maîtres, paroles d’élèves est un recueil qui regroupe des lettres que des anciens élèves adressent à leur ancien instituteur ou institutrice d’école. Un enseignant qui les a marqué, en bien comme en mal, qui a laissé une trace indélébile en eux. Les bons professeurs, ceux qui ont été là pour l’élève quand ça n’allait pas, ceux qui ont apporté une marque d’attention et de gentillesse, parfois quelque chose de simple, mais qui demeure à jamais gravé dans la mémoire, ceux qui ont tout donné pour apporter aide et éducation à un.e élève en difficulté, à l’aider à trouver sa voie. Mais il y a aussi les mauvais professeurs, ceux qui rabaissaient leurs élèves, ceux qui ont eu une seule remarque mais qui a stigmatisé l’élève pour des années (la preuve que les mots, même les plus simples, peuvent suffire à blesser et nous marquer toute une vie) et encore à présent, ceux qui ont dégoûté l’élève des études ou, au contraire, les élèves qui ont persévéré dans leurs études pour prouver à leur enseignant qu’il ou qu’elle avait tord et se prouver qu’ils valaient quelque chose. Il y a les enseignants qui n’étaient pas méchants pour autant, juste sévères mais qui ont su révéler, à un moment, une part d’humanité.



Enseignants bienveillants, enseignants méchants. Aucun n’a laissé indifférent. Certains ont même crée, chez ces anciens élèves, une vocation, celle d’instruire à leur tour et de partager le savoir. Chaque professeur a joué un rôle fondamental dans la transmission et dans l’évolution des enfants qui leur étaient confiés, certains prenant même leur rôle très à cœur et n’hésitant pas à donner de leur personne et se sacrifier pour donner à leur élève un avenir. J’avoue avoir été néanmoins très surprise du nombre d’élèves à avoir eu le béguin pour leur enseignant. Sans doute parce que, n’ayant jamais été dans ce cas de figure, j’ai du mal à comprendre cette attraction pour un adulte quand on est enfant ou adolescent, qui plus est un enseignant, encore que c’est une situation qui n’est pas isolée ou inédite. Ce qui m’a davantage surprise et choqué étaient les enseignants chez qui l’attraction était réciproque, voire qui ont profité de leur élève. Il n’y a rien de bien explicite bien entendu mais ça m’a quand même frappé lors de ma lecture.



Toutefois, l’ensemble de l’ouvrage est une petite douceur à découvrir mais aussi une fenêtre sur le milieu de l’école au cours des précédentes décennies, depuis les années 1940 jusqu’aux années 1970 voire 1980. C’est le temps des écoles mixtes, des plumes que l’on trempe dans l’encrier, des anciens pupitres, des élèves qui vont à l’école et qui arrêtent après le certificat d’étude pour aller travailler le plus tôt possible pour aider les parents. Une époque que je suis heureuse de n’avoir jamais connue en tant qu’élève mais qui me fascine malgré tout. Les auteurs des différentes lettres ont parfois une plume magnifique et décrivent joliment l’école qu’ils ont connu, si bien que ce recueil semble être une ode à l’école. Le lieu en lui-même mais aussi son rôle en tant que transmission du savoir mais aussi lieu de sociabilisation.



En résumé, un joli recueil avec des témoignages vivants et émouvants, aucun ne laisse indifférent, et dans lesquels on peut se retrouver parfois. Bien que ces lettres nous parlent des écoles des temps d’avant, il y a un aspect intemporel que l’on retrouve dans ce milieu, et qui fait que ces témoignages nous parlent. En bref, des lettres touchantes, empreintes de nostalgie, d’innocence, de douceur, un peu d’amertume aussi, et qui me refait penser à mes anciens enseignants, depuis l’école primaire jusqu’à l’université. Ceux qui m’ont marqué, ceux qui m’ont apporté beaucoup aussi, ceux qui m’ont traumatisé, tous ceux qui se sont fait une place dans ma mémoire, pour le meilleur ou pour le pire, pour ne plus jamais en sortir.


Aujourd'hui, je fais une modeste carrière de directeur d'hôpital. J'aime mon métier et j'en suis fière. L'aurais-je fait si je n'étais passée "par erreur" dans votre classe et si je n'avais eu, grâce à vous, cette révélation, si vous n'aviez pas pris la peine de réviser certains jugements ?

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