Le mari de mon frère se présente comme un manga « tranche de vie », composé de quatre tomes dans lesquels nous suivons Yaichi, homme au foyer, qui élève seul sa fille Kana suite à son divorce. Sa petite vie paisible est rapidement chamboulée par l’arrivée d’un grand Canadien aux allure de bûcheron, Mike Flanagan, qui fait un peu tâche dans ce petit quartier japonais. Époux de Ryôji, frère jumeau de Yaichi, il décide de séjourner au Japon afin de découvrir le pays de son mari disparu. Une occasion pour lui de marcher sur ses pas, découvrir les endroits qui ont marqué sa vie et faire connaissance avec sa famille. Bien que réticent, Yaichi réalise qu’il ne peut pas refuser une telle requête et accueille son beau-frère chez lui.
Yaichi est tout d’abord mal à l’aise vis-à-vis de ce beau-frère auprès de qui il ignore comment se comporter, d’autant qu’il ne sait rien concernant les homosexuels. Mike, quant à lui, débarque avec sa personnalité d’occidental peu au fait des mœurs et traditions des japonais et peut sembler par moment trop familier avec un hôte qui agit avec retenue et pudeur. Ce séjour est donc l’occasion pour Mike de découvrir la culture au Japon et le mangaka ne se fait pas prier en nous présentant plusieurs aspects de la culture japonaise, notamment à travers la gastronomie, les sources thermales, les temples, mais aussi le tempérament des Japonais, si différents de celui des Occidentaux.
Au fil des chapitres, nous assistons aux doutes et questionnements de Yaichi qui revoit peu à peu son jugement sur les homosexuels et se rend compte de son ignorance. Pour mieux comprendre cette histoire, il est bon de savoir ou de se rappeler qu’au Japon, le mariage entre personnes du même sexe n'est pas autorisé, contrairement au Canada. Aussi, Yaichi a-t-il du mal à trouver les mots et les gestes envers Mike, par méconnaissance du sujet et par crainte du qu’en dira-t-on et du jugement de son voisinage. À contrario sa fille, Kana, est dénuée de ces craintes et des préjugés qui peuvent encombrer l’esprit des adultes. Elle est naturelle dans son insouciante enfantine et son enthousiasme tellement charmant, et elle a tôt fait d’adopter cet étrange oncle venu du froid et qui ressemble à un nounours.
C’est ainsi que, progressivement, le fossé entre Yaichi et Mike se comble, grâce à la pétillante Kana, ravie d'accueillir un nouveau membre dans la famille, mais aussi grâce à Ryôji, dont ils partagent le souvenir. Chacun apprend des choses sur la culture de l’autre, entre Orient et Occident, mais aussi par rapport à Yaichi qui apprend à être plus ouvert et tolérant vis-à-vis de l’homosexualité, et cela lui permet aussi d’en apprendre plus sur son frère disparu, sa vie au Canada, et une facette de lui méconnue par Yaichi.
C’est un manga feel good qui présente la culture gay sans stéréotypes ni fantasmes. C’est une histoire pleine de fraîcheur et de douceur, qui nous présente des personnages attachants et sensibles. Yaichi se remet en question et évolue très rapidement vers plus de tolérance et de compréhension tandis que Mike émeut par sa tristesse après la mort de son mari, mêlée à la joie de rencontrer sa famille et de découvrir les lieux de son enfance. Kana est un petit rayon de soleil, rayonnante, curieuse, un peu brusque dans ses questions mais jamais sans mauvaises intentions.
Ce manga aborde avec sensibilité le divorce et la monoparentalité mais aussi bien-sûr l’homosexualité, et il remet en cause certaines idées reçues (par exemple, il ne faut pas penser que, dans un couple homosexuel, un fait la femme et l’autre l’homme ; ou alors, c’est idiot de penser qu’un homosexuel sera forcément attiré par nous si on est un homme à se retrouver dans son périmètre ; ou encore que les homosexuels seraient une mauvaise influence pour les enfants). On peut d’ailleurs remarquer que, entre deux chapitres, le mangaka offre une ou deux pages pour mieux nous instruire sur le sujet. Il aborde notamment des points comme : le coming out, la gay pride, la marche des fiertés, le outing, ou encore l’histoire du drapeau LGBT. J’ai trouvé cette initiative intéressante et, si j’avais quelques notions, j’ai appris et redécouvert bien des choses.
En résumé : un manga familial, profondément humain et touchant, qui nous offre une belle leçon de vie et traite avec bienveillance, aussi bien de l'homosexualité, de la société, de la famille que des différences culturelles. C’est une jolie ode à la tolérance et à l’acceptation. C’est doux, mélancolique, attendrissant et joyeux à la fois. Ce n’est pas un coup de cœur mais ça n’en reste pas moins une jolie découverte.
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